Jurisprudence

L'avarice reprochée à FMC

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Emeline Magnier

2014-07-21 15:00:00

Fraser Milner Casgrain s'est fait taper sur les doigts par la Cour du Québec pour avoir réclamé une somme supplémentaire à un client alors qu'une entente sur honoraires avait été convenue…

Un contrat, c'est un contrat; il est la loi des parties. C'est en substance l'un des enseignements principaux martelés par les professeurs de droit des obligations à la faculté.

C'est aussi ce qu'a rappelé la juge de la Cour du Québec Eliana Marengo à Fraser Milner Casgrain s.e.n.c.r.l. (FMC) dans une décision|http://citoyens.soquij.qc.ca/php/decision.php?ID=9DD9047EDF22443D7C80D399188A6EE6 datée du 13 juin dernier.

Le cabinet d'avocats est intervenu en appel pour Gestion Lebski inc., dans le cadre d'une action en diffamation et a poursuivi la compagnie en paiement de la somme de 36 258,11 dollars pour services professionnels rendus et débours encourus.

Considérant qu'un budget d'appel avait été établi entre les parties, ce qui constituait une entente écrite sur honoraires, la magistrate a sévèrement rejeté la demande de FMC.

Les faits

 Me Stéphane Teasdale, associé chez Dentons
Me Stéphane Teasdale, associé chez Dentons
Depuis 20 ans, Me Stephane Teasdale, associé chez Dentons (anciennement FMC, devenu Dentons en 2013 à la suite de la fusion|http://www.droit-inc.com/article9016-Les-associes-de-FMC-disent-oui-a-Dentons entre SNR Dentons, Salans et Fraser Milner Casgrain), est l'avocat de Gestion Lebski inc. et des autres compagnies que détient son représentant, Monsieur Sylvain Leblanc.

Ce dernier a suivi son conseil quand il a quitté|http://www.droit-inc.ca/article522-Stephane-Teasdale-chez-Fraser-Milner-Casgrain Miller Thomson pour se joindre à FMC en 2007 et lui a confié de nombreux dossiers importants.

Quand la compagnie a décidé d'aller en appel d'un jugement ayant de graves conséquences pour elle, Me Stefan Martin, alors avocat chez FMC et connu comme étant un spécialiste chevronné en matière de diffamation, lui a fait parvenir un document intitulé « Frais d'appel » en février 2010.

Se basant sur son expérience dans d'autres dossiers, l’avocat fixait alors un budget total de 61 500$ - incluant les frais de transcription et de confection du mémoire - pour instituer les procédures et plaider l'affaire.

Mais plus tard, le cabinet devait considérer qu'il n'avait pas été payé pour la totalité des services rendus et poursuivait son client pour le paiement d'une somme supplémentaire de 36 258,11 dollars devant couvrir les frais afférents aux différents incidents survenus pendant l'instance.

« Façon d’agir déraisonnable »

Pour la juge Marengo, cette réclamation n'est pas fondée. « Lorsque l'avocat Stefan Martin (…) rédigeait ce document (…) ce n'était pas pour rien », écrit-elle dans sa décision rendue séance tenante.

Elle qualifie le document intitulé « Frais d'appel » d'entente écrite sur honoraires, les parties étant liées par un contrat de services professionnels.

Si le mot « approximatif » y est utilisé, il ne saurait en l'espèce justifier le paiement d'honoraires supplémentaires. L'article 2107 du Code civil du Québec prévoit en effet, qu'en cas d'estimation relative au prix, le client n'est tenu de payer une augmentation que dans la mesure où elle résulte de services qui n'étaient pas prévisibles par le prestataire lors de la conclusion du contrat.

Or, dans ce dossier important et contesté, les incident n'étaient pas imprévisibles. « Comment donc justifier cette augmentation importante de prix qui est venue doubler le montant des honoraires demandés ? Impossible », indique la magistrate.

Elle rappelle aussi que dans le passé, les parties fonctionnaient selon ce mode opératoire et que FMC a toujours réduit ses factures pour les rendre conformes à l'entente, factures qui ont d’ailleurs toujours été honorées par le client. « Ici, suite à un concours de circonstances, (…), on a voulu profiter de la défenderesse et de M. Leblanc et mettre de côté l'entente intervenue entre les parties, au risque de le répéter, sans motif valable », ajoute la juge Marengo.

La genèse du problème

Pour M. Leblanc, le changement de comportement de son conseil serait justifié par la fusion entre FMC et Dentons. Sans tirer de telles conclusions, la juge n'en est pas moins cinglante: « Leblanc a donc peut-être raison d'opiner que le problème dans le présent dossier découle de la fusion intervenue entre la demanderesse et l'autre bureau d'avocats. Quoiqu'il en soit, le Tribunal est néanmoins convaincu que la genèse du problème résulte plutôt d'une autre chose, à savoir l'avarice.»

Elle ne manque pas non plus de souligner le défaut par le cabinet de respecter son obligation de renseignement envers sa cliente alors qu'il ne l'a pas avisée de son intention de ne plus respecter le budget établi. « Cette obligation de renseignement n'est pas arrêtée dans le temps. Elle ne meurt pas à un moment donné durant le mandat. Elle accompagne l'avocat tout au long du mandat. C'est lui le spécialiste, et il doit protéger les intérêts de son client. »

Pour sanctionner cette façon d'agir, le Tribunal a rejeté la demande de FMC relative aux débours taxables de 1335,65 dollars, inclus dans la note d'honoraires.

Pour lire le jugement, cliquez ici|http://citoyens.soquij.qc.ca/php/decision.php?ID=9DD9047EDF22443D7C80D399188A6EE6.

Les avocats des parties
Me Catherine Pilon
Dentons Canada s.e.n.c.r.l.
Avocats de la demanderesse


Me Claudia Desjardins-Belisle
Miller Thomson s.e.n.c.r.l.
Avocats de la défenderesse
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