Déprimés ? Décrochez votre téléphone

Lancé le 1er avril 1996, le Programme d'aide aux membres du Barreau (Pamba) offre un service d'aide et de consultation pour les avocats victimes d'alcoolisme, de toxicomanie, d'épuisement professionnel, de stress et d'autres problèmes de santé mentale.

Un numéro de téléphone est disponible 365 jours par année 24 heures par jour. À l'autre bout du fil, c'est Me Marie-Christine Kirouack qui accueille la détresse de ses interlocuteurs.

Gestionnaire du programme depuis février 2011, elle intervient en première ligne, garantissant une totale confidentialité aux personnes qui sollicitent son aide. « C'est avant tout un rôle d'écoute, sans jugement; la personne peut tout me dire et je vais m'occuper d'elle », indique l'avocate en droit de la famille qui a été intervenante en gestion de crise lors d'une première carrière.

En fonction de la situation qui lui est exposée, elle réfère ensuite la personne à un professionnel de santé. Le programme prend en charge jusqu'à six séances d'une heure avec un thérapeute, qui peut aussi être choisi par l'avocat.

Les conjoints des membres du Barreau, les stagiaires et étudiants de l'École du Barreau peuvent aussi bénéficier du programme qui est financé grâce à la cotisation professionnelle dont il représente 0,3% du montant total.

L'an dernier, 892 dossiers ont été référés à des professionnels, ce qui représente une hausse de 25 % par rapport à l'année précédente. Si cette augmentation se justifie aussi par une meilleure connaissance du programme chez les membres, pour Me Kirouack, il existe une explication conjoncturelle. « D'un point de vue mondial, les choses ne vont pas bien, nous sommes dans une période plus noire, et pour les avocats comme les autres, c'est plus difficile.»

Elle indique également que de manière générale, même si certains tabous demeurent, les avocats hésitent moins à consulter qu'à une époque précédente.

Quelques chiffres

D'après le rapport 2013 présenté par le conseil d’administration de Pamba au Conseil général du Barreau du Québec, ce sont les femmes qui font majoritairement appel au service, et représentent 67,7 % de bénéficiaires.

En terme de groupes d'âge, les 22-35 ans sont le plus représentés (46,1%) alors qu'ils ne sont que 25,9% des membres du Barreau. Ils sont suivis par les 46-65 ans (29,9%) et les 36-45 ans (23,6%).

Entre 2006 et 2013, on constate un rajeunissement de la clientèle, les 22-35 ans passant de 29% à 46,1% tandis que les 36-45 ans sont descendus de 39% à 23,6%.

Les raisons pour lesquelles les avocats demandent de l'aide sont variées. Dans 31,7% des cas, ce sont des difficultés d'ordre familial qui sont le premier motif de référence, suivi par la dépression (26,2%). Le travail est la cause de la détresse dans 9,2% des cas, derrière la maladie (11,7%) et l'anxiété (11,2%).

Par contre, les difficultés professionnelles arrivent en tête des deuxièmes motifs d'appel (26,3%) devant le stress (26%) et la famille (18,1%).

La toxicomanie (2,6%) et les jeux (0,2%) sont des problématiques peu rencontrées dans le cadre du programme. Un groupe d’entraide, Juri-secours, a été spécialement mis en place pour les avocats aux prises avec un problème d’alcoolisme.

C'est à l'automne que la demande d'aide est la plus importante: entre septembre et novembre 2013, 290 dossiers ont été ouverts alors que la moyenne mensuelle est de 72. « C'est comme pour tous les services d'aide: à cette période tout le monde est fatigué, la grisaille affecte le moral », commente Me Kirouack.

Elle conseille à ses confrères de faire appel au programme dès l'apparition des premiers symptômes de mal-être. La fatigue extrême, l'impatience, les problèmes de sommeil sont autant de signes avant-coureurs à considérer.

Un conseil pour ne jamais avoir à recourir au programme ? « Prendre des temps d'arrêt et s'octroyer des loisirs, c'est indispensable pour trouver l'équilibre !»