Nouvelles
Du ouï-dire pour prendre des décisions
Agence Qmi
2015-03-03 13:01:00
L’Autorité des marchés financiers vient de se faire rabrouer par un juge qui lui reproche d’utiliser du ouï-dire pour décider si une entreprise peut soumissionner sur des contrats publics…
Le pouvoir discrétionnaire dont elle jouit depuis 2012 est mal appliqué et peut mener à rendre des entreprises coupables « par association ».
C’est la première fois que le gendarme des marchés financiers se fait taper sur les doigts pour sa gestion du nouveau système qui est censé renforcer l’intégrité dans l’octroi des contrats publics.
Selon la loi, toute entreprise qui désire soumissionner pour un contrat de plus de 5 millions de dollars du gouvernement doit d’abord s’adresser à l’AMF.
Or, selon le juge Alain Michaud, de la Cour supérieure, l’AMF n’a pas été équitable en juin 2014 en refusant cette autorisation à l’entreprise Terra Location de Gatineau.
Refus de s’expliquer
Le jugement détaille l’histoire invraisemblable de Terra Location, victime, selon le juge Michaud, d’accusations vagues et mal fondées. L’AMF a refusé une autorisation de soumissionner à la firme parce que, selon elle, Terra aurait fait affaire avec deux sous-traitants impliqués dans la fausse facturation.
Or, l’AMF n’a jamais voulu dire à Terra qui étaient ces sous-traitants ni quand ils auraient été dans l’illégalité.
La raison est simple: ni l’AMF ni l’UPAC ne connaissaient leur identité. Elles se fiaient à Revenu Québec, qui ne voulait pas leur donner cette information.
« Coupable par association »
« Il faut comprendre que Terra serait “coupable par association”, pour avoir transigé avec des sous-traitants que Revenu Québec identifie comme (...) fournisseurs de factures de complaisance. Quelle est donc cette infraction signalée par du double ouï-dire et dont les principaux acteurs ne sont connus ni de l’UPAC ni de l’AMF? » demande le juge.
Selon le juge, cette façon de procéder soulève des questions très sérieuses. « Comment Terra fait-elle pour se défendre de ces accusations, sans connaître l’identité de ceux qu’on lui reproche de fréquenter ni la date de ces fréquentations ? » demande-t-il.
« Le Tribunal considère être ici en présence d’une contravention élémentaire et évidente aux règles de justice naturelle », écrit-il.
Contactée, l’AMF a dit qu’elle allait étudier le jugement avant de décider si elle en appelait.
Le PDG de Terra, Éric Bruyère, a préféré réserver ses commentaires pour l’instant.
Pour lire le jugement, cliquez ici.
Pour Terra Location inc. : Dunton Rainville, Mes Alain Chevrier et Sébastien Delisle
Pour l'AMF : Mes Chantal Hamel et Julie-Maude Perron
Publier un nouveau commentaire