Entrevues

D’une réserve indienne au Barreau

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Céline Gobert

2015-08-03 15:00:00

Cet avocat de formation a connu la pauvreté noire d’une réserve indienne. Il est aujourd’hui le député NPD de Manicouagan et a confié son histoire et son parcours à Droit-inc...

Me Jonathan Genest-Jourdain a connu la pauvreté noire d’une réserve indienne
Me Jonathan Genest-Jourdain a connu la pauvreté noire d’une réserve indienne
Me Jonathan Genest-Jourdain a grandi au 51ème parallèle, à Uashat, une réserve amérindienne située dans la région administrative de la Côte-Nord.

Lorsqu’il était jeune, il se nourrissait dans les poubelles. Le sol de son appartement ressemblait à un marécage de bière, échappée à terre par un père alcoolique.

Le 2 mai 2011, pourtant, il devient le premier député autochtone élu au Québec avec Roméo Saganash. Dans la circonscription de Manicouagan, il représente le Nouveau Parti Démocratique (NPD).

C’est de sa réserve natale que cet avocat de 36 ans, né d’un père Innu et d’une mère québécoise blonde aux yeux bleus, confie à Droit-inc que la route pour en arriver là a été longue.

« J’ai compris qu’il fallait que je me dépasse pour ne pas terminer comme mes cousins ou mon père, en train de travailler ma cirrhose du foie ou de quêter dans la rue », déclare celui qu’un avocat originaire de Matimekosh, Me Armand McKenzie, a pris sous son aile alors qu’il n’avait encore que vingt ans et des dreadlocks sur la tête.

Membre d’un gang de rue

Au printemps 2000, il part suivre un cours d’été d’initiation au droit pour autochtones. C’est le choc. Le jeune homme qu’il était n’était alors pas du tout préparé à faire face à la foule d’Ottawa et à la « normalité » des habitants.

Difficile à concevoir mais quand on a vécu au milieu de l’alcoolisme et de la toxicomanie, l’apprentissage de la normalité n’est pas si facile.

Au départ, Me Genest-Jourdain fréquente des gangs de rue, s’habille comme les rappeurs de L.A. et vit avec une communauté de « rastafariens », des africains, des maghrébins, des haïtiens. Plus tard, il tombe amoureux d’une fille, son père est médecin, c’est elle qui l’amène dans le droit chemin.

La route vers le succès

Me Genest-Jourdain fréquentait des gangs de rue
Me Genest-Jourdain fréquentait des gangs de rue
Ensuite, c’est la success story, comme on dit. En 2004, il décroche un baccalauréat en droit de l’Université Laval et entame un certificat de deuxième cycle en droit de l’entreprise. En 2007, il devient membre du Barreau du Québec. En 2009, il commence à militer sur la scène politique municipale dans le cadre de la campagne de 2009 à Sept-Îles. Jusqu’à l'élection fédérale du 2 mai 2011 où il est élu député.

« Je n’y croyais pas moi-même, et nos adversaires non plus ne s’attendaient pas à cela. L’arrivée des néo-démocrates a changé le visage politique », lance celui qui a un jour reçu un coup de fil de l’homme politique Jack Layton lui proposant de se joindre au NPD. « Je lui ai précisé que je n’avais jamais voté de ma vie mais que je voulais bien venir l’éclairer sur les réalités sociales des réserves indiennes. »

Le 26 mai 2011, il est nommé porte-parole adjoint de l’opposition officielle du Canada pour les Affaires autochtones et développement du Nord. Si le NPD entre au gouvernement en octobre, l’avocat indique qu’il se battra bec et ongles pour la création d’une division des affaires indiennes.

C’est possible !

Aujourd’hui, il exerce au sein de son propre cabinet ouvert en 2010. Il s’occupe des dossiers pro bono en santé mentale. Les mandats concernant la responsabilité criminelle pour troubles mentaux sont sa grande force. Il possède une belle voiture et un condo à Gatineau et revient chaque été dans sa réserve. .

« C’est possible !, a-t-il envie de dire aux jeunes de sa réserve. Je suis un vrai modèle et pas un mensonge alimenté par l’industrie, je suis un jeune de chez eux qui parle la langue, qui a étudié et qui a fait preuve de persévérance pour le bon chemin ».

C’est à son tour de superviser un jeune, son cousin dont le père est décédé. « Je viens d’une culture d’échanges oraux, c’est notre façon traditionnelle de faire : un aîné supervise un plus jeune. Je fais la même chose que mon avocat a fait pour moi quand j’avais 20 ans », conclut-il.
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20 commentaires

  1. DSG
    des gangs de rue
    Am I supposed to be inspired just because he stopped doing what he never should have done in the first place?

    • Pierre Cyro
      Pierre Cyro
      il y a 8 ans
      ... Mai 2011 un accident de la nature
      Son élection en mai 2011 est l'effet Jack Layton.
      Pas plus, mais pas moins.
      C'est le député qui s'est fait prendre à dormir à la chambre ... des Communes. Jean-René Dufort de Radio-Canada en a déjà parlé abondamment.

    • Anonyme
      Anonyme
      il y a 8 ans
      Faites dodo, monsieur. Comme vos vieux sénateurs...
      Pauvre vous... L'avez-vous jamais repris depuis???

  2. AMG
    Bravo!
    La preuve qu'il y a de l'espoir, bravo, belle persévérance et résilience!!

    Aussi, on peut arrêter de dire "réserve indienne" lorsqu'on sait que le mot "indien/indienne" est erroné(e)? Autochtone, Premières nations, Amérindiens... Pour avoir travaillé en droit autochtone, les mots justes sont d'une grande importance!

  3. Anonyme
    Anonyme
    il y a 8 ans
    D.
    Je crois aussi qu'il faudrait bannir l'expression «pauvreté noire»...

  4. Rodrigue
    Rodrigue
    il y a 8 ans
    M
    Il a une belle voiture et un condo à Gatineau. Voilà la réussite d'une vie!

  5. Jean H. Gagnon, Ad.E.
    Jean H. Gagnon, Ad.E.
    il y a 8 ans
    Bravo et merci Me Jonathan Genest-Jourdain
    Bravo à Me Jonathan Genest-Jourdain, ainsi qu’à son mentor, Me Armand McKenzie.

    Il est un des très rares Amérindiens (plus précisément, Métis puisque sa mère n’est pas une Amérindienne) à avoir réussi à sortir de la misère qui, sous bien des formes, afflige un grand nombre de personnes des Premières Nations confinées dans des réserves et privées de ressources adéquates pour vivre correctement.

    L’histoire de Me Genest-Jourdain nous rappelle aussi cette réalité que nous oublions trop souvent que vivent ces « Peuples Invisibles » (selon l’expression du poète cinéaste Richard Desjardins) qui, il y a moins de 500 ans, ont accueilli sur leurs territoires ces visiteurs venus de pays européens et leur ont permis de survivre dans cet environnement qu’ils ne connaissaient pas (notamment en leur montrant comment s’y nourrir et comment se soigner de maladies, tel le scorbut, qui ne leur auraient pas permis de survivre en Amérique du Nord sans l’aide des Amérindiens).

    À l’approche de nouvelles élections fédérales, il est peut-être temps de demander à nos gouvernements de mettre en place, de concert avec les Premières Nations, des plans et des mesures concrètes qui leur permettront de pouvoir vivre correctement et, même, comme Me Genest-Jourdain, d’espérer pouvoir se tailler des carrières sans avoir pour autant à sacrifier leurs cultures et leurs coutumes ancestrales.

    Je souhaite enfin à Me Genest-Jourdain d’être réélu à la prochaine élection. Nous avons grand besoin de députés qui connaissent et comprennent la réalité des Peuples Amérindiens.

    Bravo et merci pour le modèle que vous offrez à la jeunesse Autochtone.

    Jean

  6. Zeta
    Votre plume...
    Je vous remercie de partager ce parcours qui saura en inspirer certains et vous félicite pour l’intérêt porté aux juristes issus de divers milieux.

    Cela dit, permettez-moi de souligner l’importance de choisir avec soins les mots que vous utilisez pour décrire certaines réalités culturelles, économiques ou sociales. Je déplore l’utilisation que vous faites des termes et des expressions telles que « réserve indienne », « pauvreté noire »…sachant qu’à cela s’ajoute d’étranges tournures de phrases où il devient difficile de ne pas assimiler des « dreadlocks sur la tête » aux fréquentations de « gangs de rue » ou encore au fait que votre protagoniste vivait au sein d’une communauté de « rastafariens, d’Africains, de Maghrébins, d’Haïtiens ». D’ailleurs, au sujet de ce dernier énoncé, je refuse de croire que vous n’y voyez pas là une perpétration des stéréotypes négatifs trop longuement associés à certaines de ces communautés. Tâchez d’informer vos lecteurs et d’élever le débat sans remplir vos textes de formules rabâchées, qui ont perdu toute originalité.

    • Anonyme
      Anonyme
      il y a 8 ans
      D'accord
      Zeta, vous m'enlevez les mots de la bouche.

    • APF
      Merci
      Les miens aussi. C'est honteux.

    • Jones
      Jones
      il y a 8 ans
      D'accord.
      Tout est dit.

  7. Anonyme
    Anonyme
    il y a 8 ans
    Pourquoi les commentaires négatifs?
    Quelles que soient les circonstances, ce jeune homme est un membre productif de la société et un modèle pour ceux de sa communauté. C'est positif, encourageons-le plutôt que de le jalouser

  8. Anonyme
    Anonyme
    il y a 8 ans
    Bravo
    Je n'arrive pas à croire comment les gens sont négatifs sur ce site...

    Enfin, bravo à ce jeune homme...

  9. Lecteur
    Lecteur
    il y a 8 ans
    Mauvais reportage
    Le ton de ce reportage est de mauvais goût. Les Innus de Uashat mak Mani-Utenam comptaient déjà plusieurs professionnels parmi leurs 700 membres même avant l'admission au Barreau de Me Genest-Jourdain. Il y a au moins quatre autres avocats parmi eu dont deux ont plus d'une décennie d'expérience chacun. Par ailleurs, celui qui a déjà mis les pieds les réserves de Uashat (enclavée dans la ville) ou Mani-Utenam (quelques kilomètres à l'est) saurait que ce sont des communautés bien entretenues et ne démontrant pas "la pauvreté noire". On peut reconnaître ce que Me Genest-Jourdain a accompli sans tomber dans le misérabilisme condescendant.

    • TLP
      Oui & non
      Je viens de cette région et ce que vous dites est globalement exact.

      Toutefois, même si "les réserves" de Sept-Iles peuvent sembler bien entretenues, la réalité est toute autre & les jeunes sont très mal encadrés. Plusieurs sombrent encore dans la drogue et dans l'alcoolisme (dans un % beaucoup plus élevé que le reste de la population régionale).

      Encore aujourd'hui, un pourcentage appréciable de leur population n'a pas d'emploi et ils sont très peu scolarisés.

      On ne peut enlever à Me Genest-Jourdain ses réussites académiques. Pour ce qui est de son bilan en tant que député ; disons qu'il a beaucoup plus fait parler de lui à Infoman que pour ses réalisations dans la région ou à Ottawa.

  10. nat tang
    nat tang
    il y a 8 ans
    lectrice
    La loi sur les Indiens s appliqué encore don le terme réserve indienne est de vigueur. Métis signifie la nation Métis du Manitoba. Le métissage s'ecrit métis tout court.
    Tous les députés devraient avoir la responsabilité des Autochtones, pas seulement les députés Autochtones. Bravo pour votre réussite encore jeune mais je ne suis pas inquiète pour vous ! Les jeunes s en viennent, c est bien :)

    • Jean H. Gagnon, Ad.E.
      Jean H. Gagnon, Ad.E.
      il y a 8 ans
      Il y a bien des Métis au Québec...
      Merci "nat tang" de votre commentaire.

      Cependant, il y a bien au Québec, plusieurs "Métis", dont Me Genest-Jourdain et moi, qui sont fiers de leur héritage.

      Tout comme pour le mot "Autochtone", ne croyez-vous pas que ce serait aussi une marque de respect d'identifier les "Métis" du Québec (qui sont aussi reconnus par nos tribunaux comme un peuple "Autochtone") avec une majuscule au début?

      Je vous en remercie.

      Jean

  11. Me Stéphane Lacoste
    Me Stéphane Lacoste
    il y a 8 ans
    Une question de rigueur
    L'article et les divers commentaires illustrent bien le besoin de rigueur dans le choix des mots et la méconnaissance de certains quant aux mots et quant au droit. Il est bien d'en prendre note et d'apprendre Il est surtout important de féliciter Me Genest-Jourdain, même s'il est du mauvais parti ;)

    Le travail de député est énorme et j'admire tous ceux qui le font, même si je suis parfois ou souvent en désaccord avec leurs positions politiques.

  12. Stéphanie
    Stéphanie
    il y a 8 ans
    Histoire inventée?
    Bonjour à vous tous,

    Je connais la cousine de Me Genest-Jourdain et elle semble dépeindre un e tout autre réalité que celle que Me Genest-Jourdain a affirmé. En effet, elle a publié sur facebook que c'était un tissu de mensonges. Serait-il possible qu'il s'est fabriqué une autre réalité de sa vie durant sa jeunesse pour faire "pitié" et que les gens votent pour lui? Je pense vraiment que les gens qui ont publié cet article devrait faire quelques recherches afin de déterminer qui dit vrai, car s'il a menti et s'est inventé une histoire pareille, c'est urgent qu'on le retire de la politique. Je vous lance donc le défi suivant: "Êtes-vous capable de faire la lumière sur cette histoire?"

  13. JF Roy
    JF Roy
    il y a 8 ans
    Sa famille contredit le contenu de cet article
    Me Genest-Jourdain raconte et arrange "sa" vérité. De l'avis de sa cousine propre, cet article n'est qu'un tissu de mensonges.

    http://www.journaldequebec.com/2015/08/12/un-depute-du-npd-choque-sa-famille-en-relatant-une-presumee-jeunesse-difficile

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