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Les femmes prennent le pouvoir !

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Céline Gobert

2015-12-08 15:00:00

C’est une véritable révolution au sein de la profession que compte bien mener l’associée-directrice de Gowlings pour promouvoir la place des avocates en cabinet. Attention, les femmes veulent le pouvoir!

Me Joëlle Boisvert, associée-directrice de Gowlings
Me Joëlle Boisvert, associée-directrice de Gowlings
C’est en dégustant des croissants, du café et des fruits frais, que 370 personnes d’affaires, comprenant une majorité de femmes et plusieurs avocates de grands bureaux, ont écouté les conseils de Me Joëlle Boisvert le 4 décembre dernier lors d’un déjeuner-conférence organisé par la Chambre de commerce de Montréal à l’occasion de la conclusion du défi Effet A.

La première associée-directrice femme des bureaux de Montréal de Gowlings faisait partie des six leaders de ce défi de 100 jours dont l’objectif était de « développer l’ambition au féminin », dixit la VP de la Chambre de commerce Sévrine Labelle, animatrice de la discussion matinale. Il s’agissait notamment pour chacune des six leaders de « mentorer » des jeunes professionnelles.

Accompagnée sur scène de Diane Giard, VP à la Banque nationale et de Geneviève Biron, présidente du Groupe Biron, Me Boisvert a présenté au parterre attentif ses solutions, ses « 3P » pour permettre aux femmes d’atteindre les plus hauts sommets professionnels.

Un sujet plus que jamais d’actualité lorsque l’on sait que, statistiquement, sur 100 entreprises québécoises, seulement une dizaine sont dirigées par une femme.

« Je veux faire une différence !, a -t-elle d’emblée lancé aux professionnelles présentes. Il y a une inadéquation entre le nombre de femmes qui entrent sur le marché du travail et le nombre de femmes que l’on retrouve aux postes stratégiques ».

Que sont donc les 3P, les « trois promesses», de Me Boisvert ?

Mes Sévrine Labelle, Geneviève Biron, Diane Giard, Joëlle Boisvert
Mes Sévrine Labelle, Geneviève Biron, Diane Giard, Joëlle Boisvert
P pour « Proactivité » : On parle là de la proactivité de la direction et des leaders qui doivent prendre une part plus active dans l’élaboration de la carrière des femmes. « Même si les politiques sont là, les résultats, eux, ne sont pas au rendez-vous », a-t-elle indiqué. Il faut donc dialoguer avec les talents féminins, de ce qu’elles projettent, ainsi que de leur progression de carrière.

L’éducation des leaders permettra de poser des gestes concrets et de mettre un frein aux « biais inconscients » qu’ils subissent sans le savoir, tel par exemple le fait de ne s’entourer que de gens qui leur ressemblent et donc de ne pas favoriser la diversité au sein de leur firme.

P pour « Productivité » : Il faut repenser la productivité quand on l’applique aux femmes, qui fonctionnent différemment que les hommes, s’éloigner des carcans implantés et se montrer plus malléables au niveau des structures fixes, comme les horaires de travail.

« On doit repenser la façon dont on travaille, la façon dont on évalue la productivité, a-t-elle expliqué à Droit-inc à la fin du déjeuner. Pourquoi doit-elle être évaluée uniquement en fonction de ce qui se passe dans des heures ouvrables ? Pourquoi nos organisations ne sont-elles pas prêtes à mettre en place des solutions plus en lien avec l’évolution du monde ? ».

P pour « Promotion » : Les femmes n’ont pas suffisamment de modèles. Il est nécessaire de promouvoir les femmes leaders à l’intérieur même des organisations. « On doit s’assurer que les femmes et les hommes dans les bureaux d’avocats s’engagent à passer le relais à d’autres femmes en leur donnant les outils nécessaires pour que les talents restent dans nos organisations », explique l’avocate.

« Toutes les statistiques démontrent qu’il y a un exode des femmes de la profession juridique, notamment dans les grands cabinets. Il y a donc un problème. Sur le plan économique, c’est abominable que nos organisations perdent des femmes qui sont dans la fleur de l’âge. Cette question-là c’est du pur business. »

Notons que Me Boisvert a également profité de la conférence pour annoncer qu’un premier leader avait accepté de se lancer dans le défi d’implanter les 3P au sein de sa firme. Il s’agit de Erik J. Ryan, vice-président directeur, Marketing, stratégie et relations extérieures chez SNC-Lavalin.

Qu’ont appris les avocates coachées par Me Boisvert ?

Mes Mary-Pier Marcheterre et Mila Badran de chez Gowlings
Mes Mary-Pier Marcheterre et Mila Badran de chez Gowlings
Me Mary-Pier Marcheterre, avocate de 28 ans chez Gowlings et nouvelle maman, a eu deux « grandes révélations » suite à l’effet A. D’abord, elle a cessé de s’excuser. « Quand on va voir nos supérieurs pour demander conseil ou faire du brainstorm, on a tendance à débuter en disant “Pardonne-moi”, “Excuse-moi mais je viens te voir pour…”. »

Ensuite, elle a cessé de se culpabiliser, de ne pas souper avec sa fille par exemple. « Il faut accepter ces choses-là, accepter notre imperfection, notre déséquilibre. Il faut arrêter de se culpabiliser parce qu’on n’est pas là », confie-t-elle à Droit-inc.

C’était d’ailleurs le conseil majeur de Me Boisvert « Les femmes peuvent jouer tous les rôles 24h/24 et 7j/7 sans avoir à choisir : j’ai toujours été une mère, une amie, une amante, une sportive et une professionnelle. Ce sont des vases communiquants. Il faut qu’elles intègrent tout ce qui les rend heureuses, que ce soit la maternité ou un sport, et qu’elles arrêtent de se cloisonner. »

Me Caroline Dion de Blakes, âgée de 27 ans, va quant à elle pouvoir implanter les conseils reçus directement au sein de son cabinet. « Souvent, les femmes regardent le train passer et il peut être trop tard avant qu’elles prennent l’initiative de faire le saut et d’aller de l’avant », dit-elle.

Mes Émilie Therrien de Fasken et Caroline Dion de Blakes
Mes Émilie Therrien de Fasken et Caroline Dion de Blakes
Même son de cloche du côté de Me Émilie Therrien de Fasken Martineau, âgée de 34 ans, qui confie qu’il peut être difficile pour les femmes de tout simplement être elles-mêmes…« On a des chemins tout tracés pour nous, ce n’est pas tout le monde qui y fitte. Les organisations ont tout intérêt à tenir compte des aspirations de chacun. »

Enfin Me Mila Badran de Gowlings, âgée de 28 ans, a confié à Droit-inc avoir vécu une expérience « extraordinaire ». « On peut avoir le syndrome de l’imposteur, ou de la difficulté à s’affirmer en tant que professionnelle. Le fait d’avoir moins de leader féminin rend plus difficile pour nous de prendre notre place car on est entourées d’hommes, plus mûrs », a-t-elle indiqué. Une problématique à laquelle le premier et le troisième P du programme de Me Boisvert souhaite répondre.

Trois questions à Me Boisvert :

Droit-inc : On a beaucoup entendu parler de modèles ce matin, quels sont les vôtres ?

Me Joëlle Boisvert : « J’ai créé mon propre modèle et j’ai décidé très tôt dans ma carrière d’être authentique et de m’assumer et je n’ai jamais été gênée de prendre l’ascenseur à 6 heures pour aller faire autre chose, dont notamment jouer avec mes enfants, et de dire à un client : « ça va me faire plaisir de te parler mais ce sera à 8 heures ». Lorsque c’était urgent, on se parlait à 8 heures. De nombreuses fois des clients ou des collègues m’ont dit : « ah, 8 heures, ça va aller à demain alors ! »

Concrètement, comment allez-vous implanter les 3P chez Gowlings en tant qu’associée directrice et comment allez-vous modifier vos politiques internes ?

Je n’ai pas besoin de modifier mes politiques. C’est ça qui est la grande chose avec les 3P. En principe, tous les cabinets d’avocats ont des politiques qui se veulent inclusives avec un objectif de diversité, pour faciliter l’accès aux femmes et au partnership. Au-delà des grandes politiques, il s’agit de mettre en action au quotidien ces 3P. Mon équipe de direction doit être proactive dans l’identification des talents et dans les discussions autour de leur projection de carrière. La performance devrait être évaluée moins en fonction de l’utilisation d’une période de temps que par les résultats obtenus.

Et les hommes dans tout cela ?

Quand on essaie d’identifier des solutions, ce n’est jamais au détriment de l’intégration des hommes dans la solution, ce qui est pour moi fondamental. Dans mon organisation je travaille avec des hommes intelligents et exceptionnels qui comprennent qu’ils doivent aussi valoriser les talents féminins.

Il est vrai que l’on constate des différences dans la gestion de l’échec : quand une femme échoue, c’est généralement sa faute. Quand c’est un homme, c’est généralement la faute de tout le monde ! (rires). Mais ni l’un ni l’autre n’est totalement exact, on doit toujours faire dans le gris.

J’aime l’inclusion et la diversité et toutes les études démontrent qu’une organisation, une équipe ou une famille diversifiée au niveau de ses idées et idéologies est plus efficace et performante. On a les politiques, maintenant il faut passer à l’action, PPP !
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13 commentaires

  1. Avocat
    Avocat
    il y a 8 ans
    Avocat
    Il y a de plus en plus d'avocates et avocats pour la même charge de travail. Puisque les femmes sont moins productives que les hommes, elles compenseront en nombre.

    • Anonyme
      Anonyme
      il y a 8 ans
      Me Atudorei
      Daniel,

      Tu veux vraiment prendre la place de DSG comme troll de service?

    • Anonyme
      Anonyme
      il y a 8 ans
      Absurde
      Quel commentaire aberrant. Pourquoi une femme serait-elle moins productive qu'un homme ?

    • Archimède
      Archimède
      il y a 8 ans
      Productivité
      La conciliation travail famille pèse plus lourdement sur les femmes que sur les hommes. Les hommes n'ont pas acquis la faculté d'enfanter. Il est fréquent qu'une femme décide de ralentir son niveau de productivité après avoir eu des enfants. Celles qui maintiennent un rythme d'enfer le font au prix de sacrifices familiaux. C'est difficile de tout faire. Il est injuste de dire que les femmes sont moins productives. Elles font souvent des choix de vie différents.

    • Anonyme
      Anonyme
      il y a 8 ans
      re Productivité
      Femme n'est pas synonyme de mère.

      Merci de prendre note.

    • Avocat
      Avocat
      il y a 8 ans
      Troll alert
      PLEASE DON'T FEED THE TROLL.

    • Archimède
      Archimède
      il y a 8 ans
      Mère vs femme
      C'est parfois vrai. Même dans les familles reconstituées, la femme a tendance à prendre les responsabilités dévouées à une mère.

    • incompertus
      incompertus
      il y a 8 ans
      je me demande
      Ok, alors si nous sommes d'accord que la productivité est généralement moindre.... mais le salaire doit être égal... qu'est-ce que les employeurs auront-ils tendance de faire?

    • Avocat
      Avocat
      il y a 8 ans
      Avocat
      Donc c'est normal lorsque ce salaire est moindre.

    • Avocat
      Avocat
      il y a 8 ans
      Avocat
      Il est synonyme de risque de materner à tout moment. Les gens qui ont la croissance de leur entreprise à coeur doivent garder un oeil vigilant à ce sujet.

    • Anonyme
      Anonyme
      il y a 8 ans
      re Avocat
      "Femme" n'est pas synonyme de "personne fertile".

      Merci de prendre note.

      Prendre note aussi de l'année en cours: 2015.

    • Avocat
      Avocat
      il y a 8 ans
      Avocat
      Ça, l'employeur ne le sait pas toujours.
      Il n'a pas non plus le droit de le demander.
      Donc c'est un risque connu.

  2. Anonyme
    Anonyme
    il y a 8 ans
    Et la remuneration liee a l avancement de carriere en pratique privée?
    Quand une personne qui pratique le droit en pratique privée prend une decision d avoir des enfants, il y aura potentiellement un impact financier a gérer. Pour les femmes, celui-ci est plus difficilement évitable car il aura nécessairement une absence plus ou moins prolongée du bureau. Plusieurs hommes décident aussi de ralentir le pas pour passer plus de temps en famille et leur "performance" en souffre que ca soit en nombre d heures facturées ou en maintien de clientèle (book). Pour ces hommes, c est plus facile pour le bureau a gerer, on ajuste la remuneration. C est dans le cas des femmes que ca cause un casse-tete et je m explique.

    Meme si apres une absence de quelques mois, voire une annee, l avocate reintegre le cabinet dans ses fonctions, les clients qu elle desservait et les mandats qu elle faisait auront été repartis ailleurs. Pour les sociétaires qui essentiellement recoivent du travail d associés, si la masse critique est suffisante, ca se gere quand meme relativement bien. On remunere l avocate "comme si" elle faisait les memes heures que les sociétaires qui ne se sont pas absentés, du moins le temps que ca se replace.

    Mais eventuellement, surtout lorsque la remuneration est celle d une sociétaire senior dans le partnership track, ou celle d une associée, une partie de celle-ci est basée sur ce que cette personne génère ou gère comme clientele. Son "book". Or toute absence prolongée, pour maternité ou autre raison, impacte souvent negativement ce book. Et surtout si ca arrive a plusieurs reprises dans une période de temps relativement courte, par exemple, 2-3 fois sur 5-7 ans...

    Donc dans ce cas on fait quoi? On paie la meme remuneration a une personne qui, sur une base strictement de chiffres, apporte moins qu'une personne qui ne s est pas absentée? Ca se fait parfois. Sur une période d'absence, c est plus facile. Quand y en a eu plusieurs, ca parait parfois plus sur un cheminement de carriere sur 10 ans mettons.

    En toute équité pour ceux, hommes et femmes, qui choissisent de se consacrer uniquement au travail versus ceux, majoritairement des femmes, s'absentent plus longtemps et plus souvent pour créer une famille, est-ce soutenable de penser qu il n y aura aucun impact financier negatif? C est un defi pour tous a gerer. Et c est un tabou dans plusieurs bureaux.

    C est plate que ca ne soit pas davantage discuté ouvertement. Meme si on aura droit (du moins des grand bureaux) a un langage parfume a la rose, je peux vous dire que les gens au remuneration committee passe un temps substantiel a concilier le financier avec l équité.

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