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Non, Me Khuong n’a pas d’accent!

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Céline Gobert

2016-02-05 15:00:00

La bâtonnière Khuong a vivement réagi sur Twitter dans l’affaire qui oppose les anti-blackface à Louis Morissette. Indignée, elle se confie à Droit-inc…

« J'ai ZÉRO accent. M'en affubler d'un renforce et perpétue les stéréotypes. Inacceptable. », a lâché une Me Lu Chan Khuong fâchée jeudi sur sa page Twitter.




La bâtonnière Khuong a vivement réagi sur Twitter dans l’affaire qui oppose les anti-blackface à Louis Morissette.
La bâtonnière Khuong a vivement réagi sur Twitter dans l’affaire qui oppose les anti-blackface à Louis Morissette.
La raison de sa réaction? Un article de la chroniqueuse Sophie Durocher, dans le JDM, qui a pris la défense de Louis Morissette, réalisateur de l’émission Bye Bye pris au coeur d’une polémique qui l’oppose aux anti-blackface.

Rappelons-le, le « blackface » est une pratique théâtrale dans lequel le comédien incarne une caricature stéréotypée d’une personne noire, par exemple en prenant un accent ou en se peignant le visage en noir.

Petit résumé des faits pour ceux qui n’auraient pas suivi l’affaire : lors du Bye Bye de fin d’année, diffusé le soir du 31 décembre, un sketch sur François Bugingo, le journaliste noir dont La Presse a révélé les faux reportages, a été imité et moqué par Normand Brathwaite, noir lui aussi. Louis Morissette a plus tard expliqué qu’il avait été obligé d’embaucher un noir car les boss de Radio Canada ne voulaient pas qu’il prenne un blanc et tombe dans la pratique du « blackface »,

Pas du goût de Khuong

Sophie Durocher, chroniqueuse au Journal de Montréal
Sophie Durocher, chroniqueuse au Journal de Montréal
Une pétition, rédigée par les anti-blackface taxés de « moustiques » par Morissette, a ensuite circulé, dénonçant cette pratique - pétition que Me Khuong a d’ailleurs signé et qui demande entre autres des excuses à Morissette ainsi qu’une abolition de la pratique du blackface au Québec et un plus grand investissement des médias et des gouvernements en faveur des minorités et des personnes racisées.

Dans le JDM, Sophie Durocher a donc ironisé sur le fait que les anti-blackface, signataires de la pétition intitulée « Nous ne sommes pas des moustiques » auraient « préféré que le Bye Bye engage une comédienne asiatique (pour imiter Me Khuong) plutôt que de demander à Hélène Bourgeois-Leclerc de se plisser les yeux et de parler avec un accent cambodgien. »

Ce qui n’est pas du tout du goût de Me Khuong!

Dégradant

« Cela fait deux fois qu’ils me caricaturent au Bye Bye, explique à Droit-inc Me Khuong. La première fois, c’était en 2010 pendant la Commission Bastarache. » À chaque fois, l’accent est mis sur des clichés : une plaisanterie sur la fondue chinoise en 2010, une autre sur un prétendu accent asiatique en 2015.

« Ils m’ont donné un accent que je n’ai pas! s’insurge Me Khuong, et ils contribuent à renforcer des stéréotypes et des clichés. On ne fait pas cela pour Obama, on ne lui donne pas un accent de noir. »

Selon elle, alors qu’ils auraient pu rire de son faciès, de ses traits, de sa gestuelle ou de son habillement, ils ont choisi de mettre en avant un cliché « dégradant. » « Il faut qu’on arrête de dire que les asiatiques sont des blanchisseurs, qu’ils aiment la soupe won-ton et la fondue chinoise ! » lance la bâtonnière élue en colère, qui pense qu’il faut davantage prôner la diversité.

Dans les deux sketchs du Bye Bye 2010 et 2015, ils ont malmené la communauté asiatique, selon elle. « Si une caucasienne avait posé les mêmes gestes, aurait-elle un accent? Non. Ils auraient exagéré ses traits et sa gestuelle, mais sans accent! »

On ne peut plus rien dire ?

En matière de liberté d'expression, Me Khuong veut être traitée comme Me Synnott
En matière de liberté d'expression, Me Khuong veut être traitée comme Me Synnott
Selon Louis Morissette, on ne peut plus rien dire en humour à cause de tels groupes de pression. Durocher, quant à elle, est d’avis que si les personnes racisées demandent à apparaître davantage dans les médias, elles doivent aussi accepter de se faire caricaturer.

« J'ai travaillé fort pour m'intégrer et c'est ce qu'on attend des immigrants. J'ai adopté les valeurs et la culture des québécois. Pourquoi on revient sur un accent que je n'ai pas ?, rétorque Me Khuong. Pourquoi on n'accentue pas mes traits physiques, mes gestes, comment je m'habille..comme on le fait pour les causasiens ? À M. Couillard, on ne lui donne pas un accent, idem pour Dr. Barrette. Pourquoi moi ? »

Et la liberté d’expression ? « C'est rire des asiatiques que d'agir ainsi . La nouvelle génération, personne n'a cet accent "asiatique". C'est rétrograde. C'est de nous confiner dans un ghetto. Les préjugés et stigmates, c'est assez! Traitez moi comme une causasienne. Traitez moi comme Mr Couillard, Dr Barrette, Me Bernard Synnott.. N'importe quel blanc. La question c’est d’agir avec un asiatique ou un noir de la même façon que l’on agit avec un blanc, avec le même traitement. »

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