Pierre-Marc Johnson en guerre contre le populisme

Dans un discours évoquant tant Platon et Aristote que Locke et Montesquieu, l’avocat et ancien premier ministre Pierre-Marc Johnson a livré, à l’occasion de la cérémonie de remise des prix du Barreau, à Québec, ses réflexions sur la société, le droit qui la régit, et les dérives potentielles que fait planer une force vive de nos sociétés: le populisme.

L’avocat-conseil chez Lavery était récipiendaire de la Médaille du Barreau, soit la plus haute distinction honorifique.

Me Johnson a évoqué les mouvements populistes qui émergent un peu partout, de l’Europe aux Philippines en passant par la Turquie, et dans une moindre mesure, aux États-Unis, protéger « brillamment » par la constitution américaine, dit-il, et de l’importance d’ériger des remparts pour y faire face: « l'émergence du populisme qui s'intègre dans la démarche électorale doit nous faire prendre conscience de la fragilité des acquis sociaux et du progrès des droits et libertés. Par le fait même celle de la vie démocratique », a-t-il dit. Or, la démocratie « permet que le droit évolue de façon ordonnée et cohérente avec la société et les valeurs que les élus et les tribunaux y perçoivent ».

Les chefs de ces mouvements populistes « sont les porteurs d'une rage populaire qu'ils alimentent eux-mêmes par un discours qui intègre les frustrations du quotidien. Ils éveillent la peur de tout; ils encouragent le sentiment de victimisation dans les populations qui subissent les effets du changement technologique, social et économique ».


Libre échange

Le négociateur en chef du Québec dans l’Accord économique et commercial global Canada-Union européenne, en veut à la diabolisation que le populisme fait de ces accords commerciaux.

«Le discours populiste diabolise les traités de libre-échange en les dépeignant comme source de perte de prospérité, a dit Pierre-Marc Johnson. Pourtant le commerce international dans les deux sens représente 82% du PIB de l'Union européenne et plus de 60% de ceux du Québec et du Canada.»


De l’importance des avocats

Dans ce climat délétère, « l'adaptation ou l'inadaptation à ces changements et perturbations taille une place au droit, aux juristes et aux avocats », a dit Pierre-Marc Johnson. « Le droit que nous avons appris nous fait défendre les intérêts du client. Mais le droit que nous avons appris oblige à réfléchir, à accorder le bénéfice du doute, à rechercher la vérité, à vaincre les préjugés, à s'attarder à la complexité des réalités sociales et politiques, à exercer notre curiosité dans la recherche des solutions possibles aux défis sociaux. Les juristes, les avocats et la profession (...) doivent reconnaître la démagogie et ne pas hésiter à la dénoncer ou à la confronter. »

Il appartient aux juristes, aux avocats et au Barreau, ajoute-t-il, « de trouver des moyens de présence, d'alerte et de pédagogie auprès du public quand l'indépendance des tribunaux est mise à mal, quand la liberté de presse est menacée, quand le droit à l'intégrité de sa réputation est bafoué, quand le droit à l'égalité subit des assauts ».


« Qui est ta meute? »

Pierre-Marc Johnson a conclu en remerciant ses proches, et ses « chers consoeurs et confrères »: « Il y a 30 ans maintenant, a-t-il dit, je quittais la politique active. J'hésitais entre le retour à la médecine ou au droit. J'ai consulté nombre de proches dont un oncle qui m'a demandé : « qui est ta meute ? », Malgré des moments occasionnels de nostalgie de la satisfaction d'oeuvrer comme médecin d'urgence ou on se sait utile, ma meute, je le sais, c'est vous. »