Le mariage d’une Québécoise avec un danseur cubain annulé par la Cour

C’est en effet la conclusion du juge de la Cour supérieure Charles Ouellet, dans sa décision rendue le 3 juillet dernier. Il annule le mariage intervenu entre monsieur et madame, sous prétexte le seul objectif du premier était de tromper la seconde et de profiter d’elle afin d’immigrer au Canada, rapporte La Presse.

Me Céline Audet-Otis de Therrien Couture Avocats, la procureure de madame, obtient donc gain de cause contre Me Juliana Rodriguez, qui représentait monsieur.

Revenons sur les faits. En 2010, lors d’un voyage à Cuba, madame (dont le nom est tu, car nous sommes en matière familiale) rencontre monsieur, un danseur dans l’hôtel où elle séjourne. Éprise de lui, elle voyagera plusieurs fois à Cuba pour revoir monsieur, qui a près de 25 ans de moins qu’elle.

En 2011, madame et monsieur se marient à Cuba. Dès lors, des démarches sont entamées afin que le nouvel époux immigre au Canada pour vivre avec sa femme. Mais les autorités canadiennes refusent la demande. Les motifs : la différence d’âge entre les époux et la courte période écoulée entre le mariage et la demande.

Un avocat en droit de l’immigration conseille alors à madame d’attendre quelques années, pour convaincre alors les autorités du bien-fondé de la demande.

La relation des parties se poursuit donc à distance, alors que madame visite monsieur à Cuba tous les trois mois. La deuxième demande en immigration, en 2014, est acceptée. En 2015, il immigre effectivement et s’installe chez madame. Pendant quelques mois, tout va bien, si ce n’est que madame pourvoit à tous les besoins du couple.


Une double vie

Mais après leur déménagement dans une autre ville, quelques mois plus tard, leurs relations se détériorent. Monsieur a des conversations Facebook secrètes, il est évasif quand elle le questionne relativement à son emploi, et elle découvre des condoms dans son auto.

Par ailleurs, il appert en fait que monsieur avait aussi, et depuis plusieurs années, une relation avec une employée de l’hôtel où il était danseur, à Cuba.

Enfin, alors qu’il avait demandé de l’argent à madame pour rencontrer un supposé cousin en Équateur pour l’aider à immigrer au Canada, il s’avère que cet argent a plutôt servi pour un voyage en France. Madame découvre le pot-aux-roses en 2016. Elle demande donc le divorce ou, subsidiairement, l’annulation du mariage.


Nullité et divorce

L’annulation du mariage se distingue du divorce. En effet, le mariage emporte des effets définitifs entre les parties, dont certains subsistent malgré le divorce. En contrepartie, prononcer la nullité d’un mariage revient à dire que celui-ci est réputé ne s’être jamais produit. Les époux n’ont donc plus aucune obligation l’un envers l’autre. On pense notamment au partage du patrimoine familial.

Les tribunaux sont habituellement hésitants à prononcer la nullité. En effet, dans des circonstances semblables, la preuve de l’adultère, d’un mauvais traitement d’un époux par l’autre ou même d’agressions sexuelles n’est pas suffisante pour obtenir l’annulation du mariage. Il faut une preuve que l’intention réelle d’un époux n’était pas vraiment de vivre maritalement, mais d’immigrer au pays. Cette preuve se fait généralement par présomption.

Or, le juge considère que cette intention a été prouvée en l’espèce. Il déclare que le témoignage de monsieur n’a aucune crédibilité. Ainsi, alors qu’il allègue avoir quitté sa famille et ses amis pour émigrer au Canada, il admet par ailleurs vouloir y demeurer en cas de séparation. Il a par ailleurs menti à madame au sujet de son voyage en France. Enfin, au moment des procédures, il utilisait toujours frauduleusement l’adresse de madame alors qu’il n’y demeurait pas réellement.

En conséquence, le tribunal déclare monsieur de mauvaise foi et le mariage nul.