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Le top 5 des comportements douteux lors de partys de Noël

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Sébastien Parent

2017-12-14 14:50:00

Ils peuvent vous mener à des sanctions sévères, nous rappelle notre expert en droit du travail, car un salarié à un party de bureau, c’est comme s’il était au bureau...

Me Sébastien Parent est doctorant en droit du travail et libertés publiques à la Faculté de droit de l’Université de Montréal
Me Sébastien Parent est doctorant en droit du travail et libertés publiques à la Faculté de droit de l’Université de Montréal
En cette période des fêtes de fin d’année, l’incontournable party de bureau a déjà eu lieu pour certains, alors que d’autres attendent impatiemment sa venue pour présenter à leurs collègues leurs « moves » de danse tant pratiqués pour cette occasion ou leurs tout nouveaux vêtements « funky ».

Si ce moment de l’année rime avec festivité, atmosphère détendue et échange informel entre collègues - sans oublier évidemment les boissons alcoolisées -, il arrive à l’occasion que certains dérapages se produisent.

Voici donc un top 5 de conduites particulières, certaines frôlant presque l’invraisemblance, ayant donné lieu à des mesures disciplinaires lors d’une fête de Noël organisée par l’employeur.

# 5 : Tenir des propos irrespectueux à l’endroit d’un cadre

À la fin de la soirée dansante de fin d’année, des salariés se réunissent dans une chambre de l’hôtel pour poursuivre la fête. C’est à ce moment que le plaignant s’insurge de la présence d’un cadre et l’invective en ces termes : « moi si j’étais à ta place, je cri**erais mon camp d’icitte ! ». Face au refus du salarié de présenter des excuses, l’employeur lui imposera une suspension de 4 jours.

L’arbitre de grief conclut qu’il s’agit d’un manque de politesse flagrant à l’endroit d’une personne en autorité. Il réduit toutefois la durée de la suspension à 2 journées étant donné que la sanction initiale est à ses yeux trop sévère.

Brasserie Labatt et Union des routiers, brasseries, liqueurs douces et ouvriers de diverses industries, section locale 1999, D.T.E. 2002T-326 (T.A.).

# 4 : Voler l’argent amassé pour les cadeaux d’un tirage de Noël

Des tirages moitié-moitié étaient organisés dans l’entreprise au cours du mois de décembre afin de financer l’achat de cadeaux pour le grand tirage de la veille de Noël.

Prenant un peu d’avance sur ses résolutions de la prochaine année, le salarié responsable d’acheter les cadeaux utilisa plutôt l’argent pour rembourser ses dettes personnelles.

Considérant que ce geste malhonnête constitue un vol au sens du Code criminel et que cela a rompu le lien de confiance, l’arbitre de grief confirme le congédiement du salarié.

Conseil canadien des Teamsters, section locale 931 et Purolator Courrier ltée, D.T.E. 2003T-417 (T.A.).


# 3 : Violenter son directeur et son contremaître

Lors d’une fête de Noël organisée par l’employeur dans un salon de quilles, voilà qu’un employé n’ayant consommé rien de moins que 5 pichets de bière et quelques verres de vin entend sa conjointe l’appeler à l’aide.

Sans s’enquérir de la situation et volant au secours de sa tendre moitié, le plaignant intervient violemment en empoignant par le collet son directeur. Il tente de lui assener un coup de poing, avant de le bousculer sur une table de billard. Pour en ajouter, il lança son téléavertisseur - on se doute que la décision date un peu - sur la poitrine de son contremaître qui assistait à l’altercation. Il n’en fallut pas plus pour que l’employeur lui impose un congédiement.

Bien qu’une agression contre un supérieur constitue une attaque contre l’autorité de l’employeur et que des actes de violence doivent être réprimandés sévèrement en milieu de travail, l’arbitre de grief remplace le congédiement par une suspension de 9 mois, notamment en raison du dossier disciplinaire vierge du plaignant et de l’état de fatigue dans lequel il se trouvait - on l’imagine - à la fin de la soirée.

Nettoyage de drains A. Ducharme (2000) inc. et Syndicat national des travailleuses et travailleurs de l’environnement (FEESP-CSN), D.T.E. 2001T-1030 (T.A.).


# 2 : Briser une chaise et menacer le gérant du restaurant

À l’occasion d’une fête de Noël se tenant dans un restaurant, tout bascula pour un salarié lorsqu’il ne trouva plus son manteau à la fin de la soirée. Submergé d’une grande colère, il brisa une chaise en la projetant sur une distance d’environ 3 mètres. Par la suite, il menaça le gérant du restaurant de lui casser les jambes dans l’éventualité où il ne retrouverait pas son manteau.

Non seulement ces gestes n’ont pas été d’une quelconque utilité pour retrouver ledit manteau, mais ont mérité au salarié une suspension disciplinaire de 3 jours.

Pour l’arbitre de grief, ces gestes constituent un manque de civilité et sont tout à fait inacceptables, en plus de porter atteinte à la réputation de l’employeur. Ainsi, la sanction disciplinaire imposée par l’employeur a été maintenue.

Association internationale des machinistes et des travailleuses et travailleurs de l’aérospatiale, district 140, section locale 2309 et Servisair, D.T.E. 2009T-448 (T.A.).

# 1 : Le « projet laxatif » dans le verre de sa chef de service

Lors d’une retraite fermée organisée par l’employeur, deux gestionnaires et un secrétaire ont élaboré un plan, lequel consistait à déposer un laxatif dans le verre de vin de leur chef de service ... au moment crucial où elle s’apprêtait à se rendre au spa après le souper.

Le concept était fort simple : « ils se disent qu’elle les fait « ch*er », à leur tour ils lui réservent le même traitement ».

En dépit de l’échec de leur projet, dû au fait que leur cible était déjà assez avancée, n’étant plus en état de consommer un verre de plus, les deux gestionnaires et le secrétaire ont tout de même été congédiés.

L’arbitre de grief substituera au congédiement du secrétaire une suspension de 15 semaines, tandis que le Tribunal administratif du travail remplacera le congédiement des deux gestionnaires par une suspension de 26 semaines.

St-Onge et Sobey’s Québec inc., 2016 QCTAT 6258.

Le pouvoir disciplinaire de l’employeur lors des évènements sociaux

Retenons que ces évènements sociaux sont considérés comme étant directement reliés à la vie de l’entreprise, ce qui explique le pouvoir disciplinaire de l’employeur en pareilles circonstances. En effet, la jurisprudence confirme que la présence du salarié à un party de bureau s’inscrit dans le cadre de son emploi.

À noter que certains décideurs considèrent que l’état d’ébriété du salarié peut constituer une circonstance atténuante dans le contexte d’une fête de fin d’année, alors que d’autres sont d’avis que l’ivresse du plaignant ne peut en aucun cas excuser une conduite inacceptable.

En espérant que votre party de Noël sera à la hauteur de vos attentes et se déroulera dans l’harmonie, un joyeux temps des fêtes à tous !


Me Sébastien Parent est doctorant en droit du travail et libertés publiques à la Faculté de droit de l’Université de Montréal. Il est aussi chargé de cours à Polytechnique Montréal où il enseigne le droit du travail. Auparavant, il a complété le baccalauréat ainsi que la maîtrise en droit à la Faculté de droit de l’Université de Montréal. Il est également titulaire d’un baccalauréat en relations industrielles de la même institution. Écrivain dans l’âme et procureur devant la Cour suprême du Canada dès le début de sa carrière, Me Parent commente l’actualité récente en matière d’emploi afin que salariés et employeurs connaissent bien leurs droits et obligations respectifs.
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9 commentaires

  1. Le Gros Roger
    Le Gros Roger
    il y a 6 ans
    Problème réglé
    J'ai réglé le problème. Je ne me présente plus dans ce genre d'évènements. Même les regards sont maintenant susceptibles de sanctions. J'aime trop ma fonction pour la mettre à risque en me présentant en un lieu où il y a de l'alcool et des représentantes du "deuxième sexe" comme disait De Beauvoir. C'est maintenant devenu trop fou.

    Vive l'ère post factuel !!!

    • JB
      Bonne affaire!
      Pas sûr que les représentantes du "deuxième sexe" aient envie d'avoir Le Gros Roger à leur party surtout si celui-ci est incapable prendre de l'alcool en leur présence et de bien se tenir!

    • Avocatdudiable
      Avocatdudiable
      il y a 6 ans
      Voilà !!!
      Excellent point qui démontre la géométrie variable de l'espace public actuel. Un Gros Roger sur la bière, on en veut pas. Un beau Pierre-Alexandre sur la poudre, oui par exemple... surtout s'il est un chouia soyboy et soumis !!!

    • JB
      Wrong!
      Ni de l'un ni de l'autre!!! On peut tu juste avoir des collègues de travail normaux (gars et filles) qui savent se comporter décemment dans de telles circonstances? Pas d'extrêmes, est-ce encore possible?

  2. Anonyme
    Anonyme
    il y a 6 ans
    expert ?
    Peut-on qualifier d'expert un avocat de 2 ans de pratique ?
    Je n'enlève rien à ses études, mais de là à le qualifier d'expert...

  3. S.P.
    Re: expert ?
    Joyeux noël à vous aussi!

  4. Anonyme
    Anonyme
    il y a 6 ans
    Vous manquez le meilleur: quand l'employeur se fait prendre la main dans le sac
    Explorez le thème "manoeuvres traitresses de l'employeur à l'encontre d'un employé honnête". Il y a de bonnes.

    Par exemple, le cas d'un policier de la rive-sud chargé de gérer des fonds recueillis pour l'achat de cadeaux de Noel destinés à des enfants défavorisé, et d'effectuer les achats.

    L'argent recueilli avant Noel est conservé par le constable "Ladouceur" (les curieux pourront facilement retrouver son nom) jusqu'à l'été suivant. C'est à ce moment qu'il achète, au prix le plus bas de l'année, les cadeaux pour le Noel suivant. Cela permet d'acheter davantage de cadeaux, qu'il entrepose chez lui avant de leur distribution durant le Noel suivant. Ainsi, l'argent receuilli avant Noel 2010 paye les cadeaux de Noel 2011, l'argent recueilli avant Noel 2011 paye les cadeaux de Noel 2012, etc... Il met en oeuvre cette procédure pendant plusieurs années, à la connaissance de tous, et fait une tenue de livre impeccable (reçus, état et variations des inventaires, ...).

    Une année, l'employeur le sanctionne en lui reprochant soudainement d'avoir conservé l'argent recueilli avant Noel, et de cacher frauduleusement chez lui les cadeaux destinés aux enfants. Grace à sa tenue de livre, le constable Ladouceur réussi à rétablir les faits, et à neutraliser les médisances de certains de ses collègues et de la direction. Il est entièrement blanchi.

    Évidemment, il n'est rien arrivé à ceux qui ont tenter de le salir.

    • Anonyme
      Anonyme
      il y a 6 ans
      Peut-on avoir le nom du policier impliqué?
      Croustillante histoire de Noel que celle-là...

  5. Pirlouit
    Pirlouit
    il y a 6 ans
    Alcool
    Très drôle cet article

    3 jours de suspension pour le gars du manteau ... il aurait pu avoir un dossier criminel !

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