Le travailliste

Réforme des normes du travail : le Québec, bien loin de la France!

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Sébastien Parent

2018-05-10 14:15:00

Notre chroniqueur propose un regard croisé sur les normes du travail nouvellement réformées du Québec et celles en vigueur en France...

Sébastien Parent est chargé de cours à Polytechnique Montréal où il enseigne le droit du travail
Sébastien Parent est chargé de cours à Polytechnique Montréal où il enseigne le droit du travail
À chaque 1er mai, le gouvernement du Québec augmente le taux horaire du salaire minimum, qui s’est élevé cette année de 11,25 dollars à 12 dollars. Parallèlement, en mars dernier, la ministre du Travail, Dominique Vien, déposait son projet de loi 176 visant à modifier la Loi sur les normes du travail et à faciliter la conciliation famille-travail. Une modernisation des normes minimales du travail qui était attendue depuis déjà plusieurs années.

Bonbons à saveur préélectorale ? Possible.

Cela dit, les nouvelles normes du travail proposées dans cette réforme sont-elles exorbitantes ? Pour y répondre, posons un regard croisé sur certaines normes du travail de la France, dont le modèle a inspiré, à l’époque, notre législation en la matière.

Plus de vacances !

Excellente nouvelle pour les passionnés de voyage (ou pour les plus sédentaires qui préfèrent consacrer leur été à la rénovation de leur résidence), ils pourraient acquérir une troisième semaine de vacances après avoir cumulé trois années de service continu au sein de la même entreprise.

Or, en vertu de la loi actuelle, il faut plutôt compter cinq années de service continu avant de pouvoir passer de deux à trois semaines de vacances annuellement. Ce n’est pas le Pérou, comme on dit.

La France offre, quant à elle, cinq semaines de vacances payées, et ce, dès la première année de travail. Quand même tentant d’envisager un déménagement outre-Atlantique, non ?

Des journées de maladie rémunérées

En cas d’absence pour cause de maladie, le salarié peut s’absenter de son travail, pendant une période d’au plus 26 semaines sur une période de 12 mois consécutifs. À ce jour, cette absence est sans salaire tandis qu’avec la réforme projetée, les deux premières journées seront rémunérées par l’employeur.

Chez nos cousins français, le salarié touche des indemnités de remplacement du revenu tout au long de sa période d’absence en maladie, à l’exception de quelques jours de carence au début de celle-ci. Pour en ajouter, la durée de ces indemnités oscillera entre six mois et trois ans, selon notamment le nombre d’heures travaillées antérieurement à l’arrêt de travail.

Conciliation famille-travail

Contrairement à la croyance populaire voulant que le salarié soit libre d’accepter ou non d’effectuer des heures supplémentaires, la Loi sur les normes du travail permet à l’employeur d’exiger quotidiennement que ses employés travaillent jusqu’à quatre heures au-delà de leurs heures habituelles. En principe, le salarié pourra toutefois refuser de travailler plus de 50 heures sur une base hebdomadaire ou pour certains motifs reliés à ses obligations familiales.

Pour sa part, le projet de loi 176 entend réduire la durée quotidienne d’heures supplémentaires obligatoires, en permettant au salarié de refuser de travailler plus de deux heures au-delà de ses heures habituelles. Autre nouveauté, il pourra aussi exercer son droit de refus lorsqu’il n’aura pas été informé du temps supplémentaire requis au moins cinq jours à l’avance, sous réserve de certaines exceptions.

En France, le nombre d’heures supplémentaires maximales par jour est établi à 10. En revanche, la durée normale de la semaine de travail est de 35 heures et un salarié ne peut être tenu de travailler plus de 48 heures par semaine. De plus, la durée hebdomadaire moyenne ne pourra pas dépasser 44 heures sur une période de 12 semaines consécutives. Meilleure conciliation famille-travail qu’au Québec, mais rien qui puisse se rapprocher de la société des loisirs qu’avaient prédite certains futurologues…

Le Québec, encore une colonie ?

Au final, l’on reproche souvent au Québec d’accuser un retard de plusieurs années, parfois même des décennies, relativement aux innovations de la France en matière de normes minimales d’emploi. Force est de constater que, avec cette réforme proposée par le gouvernement libéral du Québec, les choses ne s’amélioreront pas de sitôt.

Quand on se compare, on se désole parfois.

Me Sébastien Parent est doctorant en droit du travail et libertés publiques à la Faculté de droit de l’Université de Montréal. Il est aussi chargé de cours à Polytechnique Montréal où il enseigne le droit du travail. Auparavant, il a complété le baccalauréat ainsi que la maîtrise en droit à la Faculté de droit de l’Université de Montréal. Il est également titulaire d’un baccalauréat en relations industrielles de la même institution. Écrivain dans l’âme et procureur devant la Cour suprême du Canada dès le début de sa carrière, Me Parent est l’auteur de divers articles en matière d’emploi et agit aussi à titre de conférencier.
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6 commentaires

  1. Me Redoute
    Me Redoute
    il y a 5 ans
    Comparer une petitre province avec un pays de 67 millions de personnes
    Pourquoi se comparer à la France? Un pays d'Europe occidentale de 67 millions de personnes?? Pourquoi ne pas comparer nos conditions avec les autres provinces canadiennes? Nous n'avons rien en commun avec la France, si ce n'est d'avoir été abandonné par la mère-patrie.

    Il faut se méfier des comparaisons qui ne peuvent se faire. Tiens, un coup partie, pourquoi ne pas comparer le Québec avec la Louisiane?

    • Syndicaliste
      Syndicaliste
      il y a 5 ans
      Encore du nivellement vers le bas!!!
      C'est justement une attitude de "colon" que de se comparer aux pires... Le québécois est né pour un ptit pain, qui disait!

    • Anonyme
      Anonyme
      il y a 5 ans
      Explications
      En quoi est-ce du nivellement par le bas ? Explique-vous. Personnellement, je suis d'accord que de comparer la situation du Québec à celle de la France est évidemment possible, mais douteux.

  2. Anonyme
    Anonyme
    il y a 5 ans
    Le titre rappel l'époque des "maudits français"
    Celle où le français fraichement débarqué s'esclaffait devant le Cheez Whiz, vitupérait contre les tranches Singles, fulminait à la vue d'un pain Weston, et tempêtait devant un gros gallon de Cuvée des Patriotes.

  3. ben coundonc
    ben coundonc
    il y a 5 ans
    Le Québec, encore une colonie ?
    Pourquoi se compare-t-on a la France en matiere de normes du travail? Ca n'a aucun sens etant donne le contexte Nord-Americain, la situation geographique du Quebec et ses partenaires comerciaux qui sont bien differents de ceux de la France. On "peut-tu" arreter de vivre dans le passe et s'adapter a son environnement et a son temps?

  4. Maurice Marcotte CRHA
    Maurice Marcotte CRHA
    il y a 5 ans
    Consultant
    Comparer le Québec à un pays souverain et de la taille de la France est injuste. Et le régime des normes du travail en France influence le taux de chômage anormalement élevé la-bas (et cela ne se corrige pas...même en période de prospérité internationale. Je préfère le plein emploi que des périodes de vacances injustifiées de 5 semaines après un an de travail. Le Québec n'a ni la taille, ni la masse critique de revenus pour se comparer à la France. Alors, rêvez donc...

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