La magistrature et la relève

Le courage d’établir ses limites

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Marie-pierre Gravel

2018-05-30 14:15:00

Cette semaine, Me Marie-Pierre Gravel, du Groupe Montpetit, rencontre l’Honorable Chantal Corriveau, juge à la Cour supérieure...

L’Honorable Chantal Corriveau, juge à la Cour supérieure
L’Honorable Chantal Corriveau, juge à la Cour supérieure
Depuis ses débuts, la firme Montpetit s’est donné la mission de soutenir la relève. Au cours des prochains mois, dans le cadre de chroniques d’experts, Me Marie-Pierre Gravel aura donc le privilège de s’entretenir avec des juges de différentes instances judiciaires et d’échanger avec eux sur le thème de la relève dans la profession.

C’est dans son bureau du palais de justice de Montréal que la juge Chantal Corriveau a eu la gentillesse de me recevoir pour discuter d’un sujet qui lui est cher : la relève dans la profession. Le premier coup d’œil de son espace de travail orné de plusieurs photos familiales me permet rapidement de comprendre que la famille occupe une place toute particulière dans sa vie.

La conversation s’ouvre donc tout naturellement sur cet enjeu central pour plusieurs jeunes professionnels.

Est-ce que la conciliation travail-famille/travail-vie privée est réellement possible dans le milieu juridique ?

À cette première question, la juge Corriveau répond spontanément que « s’il y a quelque chose que l’on veut léguer à la génération montante c’est que oui c’est possible, yes we can ! »
S’attardant à sa propre expérience de pratique en litige et reconnaissant qu’elle a eu l’immense chance de donner naissance à trois enfants en santé, la juge admet qu’il n’y a pas de recette magique ou de solution miracle pour y arriver.

Au-delà de l’organisation extraordinaire requise, pour elle, c’est aussi et surtout une question « d’accepter l’imperfection dans tout ce que l’on fait. Accepter de déléguer. Faire confiance à la vie et aux gens qui nous entourent. Comprendre que nos enfants peuvent être bien sans que l’on soit là à temps plein ». Bien que cette question soit très personnelle à chacun, la juge demeure convaincue, témoignage de ses enfants à l’appui, qu’elle a été une meilleure mère justement parce qu’elle avait la chance de s’accomplir au travail.

Elle a eu le courage d’établir ses limites, mais reconnaît que ça prend beaucoup de confiance en soi pour arriver à le faire.

« Lorsque les critiques fusent, il faut s’assumer et ne pas se laisser démolir. Il y aura toujours des impressions et des sous-entendus, il faut avoir une bonne confiance en soi et en la vie pour poursuivre son cheminement professionnel à travers tout ça », ajoute-t-elle.

Elle termine en spécifiant qu’évidemment, avoir un conjoint impliqué est un agent facilitateur pour mener plusieurs projets de front tout en maintenant un certain équilibre.

En bref, la juge Corriveau demeure convaincue « qu’il y a toutes sortes de façons de moduler sa pratique. La pratique privée et la conciliation travail-famille c’est possible. Il faut y croire et persister ».

Partant de cette prémisse, la conversation se poursuit sur un aspect touchant à sa réalité quotidienne en tant que juge.

Qu’elles sont les attentes des juges face aux jeunes plaideurs ?

Deux mots viennent immédiatement à l’esprit de la juge : rigueur et honnêteté intellectuelle.

« La qualité de la langue écrite et orale est également tellement appréciée. »
Établissant un parallèle avec l’esprit du nouveau Code de procédure civile, elle insiste ensuite sur l’importance de la communication : « il ne faut pas craindre l’adversaire, mais plutôt ouvrir la discussion afin de canaliser ses énergies sur les enjeux réels qui seront soulevés. La communication entre procureurs est essentielle et aide à mettre les efforts aux bons endroits. C’est aussi une question de respecter le temps de la Cour et les ressources judiciaires qui ont inévitablement un coût. »

Maintenant que certaines de ces attentes sont établies. Comment arriver à répondre à celles-ci ?

Est-il nécessaire de se spécialiser pour progresser professionnellement ?
La juge reconnaît que les dossiers se complexifient et que les clients sont de plus en plus renseignés et donc, à tort ou à raison, très exigeants à l’égard des avocats qui les représentent.

Au-delà de la spécialisation, la juge Corriveau croit fortement que la progression professionnelle repose sur l’accès à des mentors pouvant appuyer et guider les jeunes avocats dans leur développement, et ce, bien au-delà du stage.

« S’il y avait assez de mentors et si les jeunes étaient ouverts à ça, et je pense qu’ils le sont, ce serait précieux pour la profession. »

Le mentorat demeure sans aucun doute une avenue qu’il faut continuer à explorer et qui permettrait à la relève de profiter de l’expérience d’avocats qui vivent des réalités semblables, tant au niveau de la vie personnelle que professionnelle.
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