Karim Renno

Controverse en matière de prescription réglée

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Karim Renno

2012-05-22 14:15:00

La période de prescription applicable à l'homologation d'une transaction peut poser problème. Karim Renno apporte quelques éclaircissements, jurisprudence à l'appui.

Même si le Code civil du Québec est entré en vigueur en 1994, il reste encore plusieurs questions importantes sans réponse jurisprudentielle. Or, dans l’affaire ''Matol Botanical International Ltd.'' c. ''Sarah Jurak'' (2012 QCCA 898), la Cour d’appel est venue répondre à une de ces questions en tranchant la controverse doctrinale entourant la période de prescription applicable à l’homologation d’une transaction.

Karim Renno revient sur le délai applicable à l'homologation d'une transaction
Karim Renno revient sur le délai applicable à l'homologation d'une transaction
En effet, la question de la période de prescription applicable à l'homologation d'une transaction est une question qui hante les jeunes avocats, stagiaires et étudiants à qui l'on demande une note de service de recherche sur le sujet depuis 1994. Avant l’affaire Matrox, il n'existait pas de jurisprudence sur la question et les auteurs étaient divisés à ce sujet.

D'une part, certains faisaient valoir que la transaction a la force de la chose jugée en vertu de l'article 2633 C.c.Q. et donc que le délai de prescription de 10 ans applicable aux jugements se devait d'être utilisé. De l'autre côté, on plaidait que ce n'est qu'après l'homologation de la transaction qu'elle acquérait l'autorité de la chose jugée et qu'il n'y avait donc pas de raison de mettre de côté le délai de prescription général de 3 ans.

La Cour d'appel vient finalement de trancher le débat et elle opte pour la seconde option.

En effet, dans cette affaire, la Cour se rend aux arguments sur la question présentés par Me Rachid Benmokrane au nom des appelantes et elle conclut à l'application de la prescription triennale.

Les juges Rochon, Dutil et Jacques (ad hoc) raisonnent que la transaction n’acquiert l’autorité de la chose jugée qu’une fois qu’elle est homologuée. C’est donc dire qu’avant cette étape, elle n’a pas les caractéristiques d’un jugement. Il ne saurait donc être question d’appliquer la période de prescription de 10 ans prévue à l’article 2924 C.c.Q. C’est plutôt la période de prescription générale de 3 ans (art. 2925 C.c.Q.) qui trouve application :

[30] En l’espèce, il s’agit plutôt d’une transaction contractuelle intervenue entre deux parties. Certes, le jugement faisant droit à l’homologation bénéficiera du délai de prescription de dix ans. Mais le délai de prescription applicable à l'homologation de la transaction, qui constitue un droit personnel visé par l’article 2925 C.c.Q., est régi par celui de trois ans. Reste à déterminer le point de départ d'un tel délai.

La prescription ne commence cependant pas à courir dès la conclusion de la transaction. En effet, tant que les stipulations de cette entente sont respectées par les parties, il n’existe pas de raison d’en demander l’homologation. C’est donc à partir de la date du non-respect allégué de la transaction que la prescription coure.

Une autre question importante réglée par les tribunaux. Il ne devrait en rester que quelques milliers maintenant…

Sur l'auteur:
Karim Renno est associé du cabinet Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l. Il est le fondateur et rédacteur en chef du blogue juridique À bon droit où il publie quotidiennement des billets de jurisprudence.

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