Pierre-Marc Johnson réplique à Khuong!

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Pierre-marc Johnson

2015-09-30 15:15:00

Dans une lettre rendue publique, l’ex-premier ministre Pierre-Marc Johnson réplique à la bâtonnière démissionnaire, qui l’avait écorché lui et sa conjointe lors de son passage à TLMEP…

Madame la bâtonnière démissionnaire,

Me Pierre-Marc Johnson
Me Pierre-Marc Johnson
Lors de l’émission « Tout le monde en parle » dimanche dernier, vous avez abondamment aspergé de mépris Monsieur Peter Simons, le ministère de la Justice, d’anciens bâtonniers du Québec, mes trois collègues anciens Premiers ministres et moi-même qui ai aussi été ministre de la Justice et Procureur-général. Je passe rapidement sur l’ensemble de vos propos et comportements, surprenants pour quelqu’un qui aspirait à diriger le Barreau du Québec : je me contente de vous rappeler que la fonction première du Barreau est de protéger le public et non d’être un faire-valoir de celle ou celui qui le dirige. Je ne peux cependant ignorer votre attaque ad hominem, déplacée et inappropriée à mon égard et à l’égard d’Hélène de Kovachich qui est juge en exercice du Tribunal administratif du Québec (TAQ) et dont je suis le mari.

Un juge en exercice est contraint au silence sur la place publique; il ne peut tomber dans l’arène du populisme, et des débats médiatiques ou politiques. La dignité de la fonction l’oblige à ce silence exigeant : c’est ce qu’on appelle le devoir de réserve des juges. Pour se défendre contre les faussetés et mensonges, un juge n’a comme seule protection que les tribunaux judicaires et le ministre de la justice; c’est une réalité fondamentale que vous ne pouvez ignorer. En m’attaquant comme vous l’avez fait, vous avez aussi atteint brutalement -au mépris des faits-la dignité de quelqu’un qui est condamnée au silence par respect de son devoir. Puisque vous vous êtes servie de moi dans cette attaque, je viens ici répondre à votre propos odieux.

En lisant quelques documents publics, vous auriez pu constater qu’en 2012 Hélène de Kovachich a fait l’objet de harcèlement continu et d’une attaque à ses fonctions de Présidente et Juge du TAQ. L’agresseur qu’on ne peut identifier à cause d’un ordre de la Cour supérieure, diffusait à son sujet un document diffamatoire relié à sa vie privée et la menaçait de le rendre public si elle ne se pliait pas à ses demandes inacceptables. Il la menaçait aussi par écrit de lui faire perdre ses fonctions si elle n’obtempérait pas à ses volontés. Au nom de l’indépendance judiciaire -un principe constitutionnel fondamental que vous ne sauriez ignorer- il était impératif de saisir les tribunaux pour que cesse ce comportement inacceptable et abusif : il aurait aussi fallu que l’État prenne fait et cause pour soutenir un juge ainsi attaqué dans ses fonctions : c’est ce que reconnaissent la doctrine et une abondante jurisprudence sur l’indépendance judiciaire que vous auriez eu avantage à consulter avant de vous prononcer publiquement sur cette question.

Compte tenu des lois et des politiques publiques du ministère applicables, seule la Présidente du TAQ pouvait prendre la décision de venir en soutien à un juge du TAQ attaqué dans ses fonctions; c’est l’interprétation que lui donna le sous-ministre de la justice au moment des faits, renvoyant la Présidente à elle-même pour décider de cette question. Le bien fondé de sa décision fut d’ailleurs confirmé par deux opinions juridiques subséquentes: l’une de l’honorable Jean Louis Baudoin et l’autre de la directrice des services juridiques du TAQ. Sa procureure obtint sur le banc en Cour supérieure une injonction contre le tiers. Ce n’est que parce que le tiers prolongea le débat jusqu’en Cour d’appel que le montant devint substantiel. La Cour à chaque étape a maintenu les ordonnances et l’injonction.

Mais, puisque ce litige faisait l’objet d’interdictions de publication en raison du caractère diffamatoire du propos, les spéculations et ragots les plus ahurissants circulèrent au sujet des circonstances de ces décisions que d’aucuns qualifièrent d’affaire purement personnelle, comme vous-même l’avez fait sans vous soucier ni des faits et ni du droit.

Le Conseil de la justice administrative fut saisi de la question et recommanda la suspension temporaire d’Hélène de Kovachich non pas pour avoir pris la mauvaise décision ou avoir refilé la facture aux contribuables comme vous l’affirmez, mais bien pour ne pas avoir trouvé une façon d’impliquer d’autres personnes dans cette décision.

Hélène de Kovachich a accepté de verser au TAQ la moitié des sommes engagées dans cette longue contestation judiciaire. Elle répondait ainsi aux préoccupations de son nouveau Président; la décision de verser des sommes au TAQ fut prise dans un contexte hautement médiatisé sans pour autant que la juge ne reconnaisse qu’elle devait des sommes à l’État. Le nouveau Président du TAQ émit alors un communiqué -que vous auriez dû consulter- affirmant clairement qu’elle avait agi de bonne foi, n’avait ni posé de gestes illégaux, ni commis de fraude dans cette situation difficile.

Considérant le rôle premier de protection du public du Barreau et après vous avoir vu et entendu à l’émission « Tout le monde en parle » dimanche dernier, je suis convaincu que vous avez pris une excellente décision en démissionnant de votre poste de bâtonnière.

Pierre Marc Johnson
Barreau 1971


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