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Agressions sexuelles : vers la création d'un tribunal spécialisé

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Radio -canada

2020-10-21 12:00:00

Tout indique que les victimes d’agressions sexuelles ou de violence conjugale qui réclament la création d’un tribunal spécialisé auront gain de cause...

Sonia LeBel. Photo : Site web de Coalition Avenir Québec
Sonia LeBel. Photo : Site web de Coalition Avenir Québec
Il faut donc s’attendre à voir l’implantation d’un tel tribunal, destiné spécifiquement et uniquement aux causes d’agressions sexuelles et de violence conjugale, figurer parmi les principales recommandations du comité d’experts chargé de proposer un meilleur accompagnement aux victimes de ce type de crimes.

C’est ce qu’a appris La Presse Canadienne, lundi, de sources proches du dossier.

Le comité, créé en mars 2019 par l’ex-ministre de la Justice Sonia LeBel, en est rendu aux dernières étapes de ses travaux, soit la validation des recommandations par l’ensemble des membres du groupe et la rédaction du rapport, qui devrait être présenté au gouvernement en décembre, plutôt qu’en octobre comme prévu initialement.

D’après les informations obtenues, le rapport sera unanime et « ratissera large », en proposant plusieurs dizaines de mesures « audacieuses » destinées à faire en sorte que les victimes de crimes sexuels et de violence conjugale regagnent la confiance envers les institutions, au premier chef le système judiciaire, et se sentent plus à l’aise de porter plainte.

Véronique Hivon. Photo : Archives
Véronique Hivon. Photo : Archives
Le but consiste à fournir une aide accrue aux victimes à toutes les étapes du processus, soit avant, pendant et après les procédures judiciaires. On veut que le système judiciaire s’adapte mieux aux besoins particuliers des victimes de crimes sexuels et de violence conjugale, des femmes dans la grande majorité des cas, souvent désemparées devant le dédale administratif et la froideur du système.

Certaines mesures porteront sur le court terme, d’autres seront à implanter à long terme.

Une autre recommandation-phare dont les contours demeurent à préciser mais qui devrait figurer dans le rapport serait la création d’un guichet unique, permettant à la personne agressée de connaître toutes les ressources à sa disposition, avec un seul numéro de téléphone, une seule adresse web.

La création d’un tribunal spécialisé pour ce type de causes au sein de la Cour du Québec avait été proposée à l’origine par la députée péquiste et avocate de formation Véronique Hivon, en mars 2018, dans la foulée du mouvement planétaire #Moiaussi.

L'honorable Elizabeth Corte. Photo : Archives
L'honorable Elizabeth Corte. Photo : Archives
Dans le passé, Mme Hivon a cité en exemple l’Afrique du Sud, où une telle chambre existe, évitant ainsi aux victimes de croiser leur agresseur en cour. L’initiative a mené à une hausse du nombre de condamnations prononcées pour infractions sexuelles dans ce pays.

En décembre 2018, le premier ministre François Legault s’était montré ouvert à cette idée d’un tribunal distinct, tout en rappelant que le droit criminel relevait de la compétence du gouvernement fédéral.

Le comité visera notamment à faire en sorte que les femmes puissent apprivoiser tout le processus qui les attend. Comment? En visant à accélérer le traitement des plaintes, à assurer aux victimes une meilleure compréhension du système judiciaire, à mieux former les divers intervenants impliqués dans le traitement des plaintes et à accompagner les victimes, même après la fin des procédures.

On voudra aussi s’attaquer aux préjugés envers les femmes agressées.

De même, on insistera sur l’importance d’offrir la même qualité de services partout au Québec.

La police sera interpellée et invitée à créer des unités spécialisées en matière de violences sexuelles, dans toutes les régions et tous les corps policiers.

Jean-Thierry Popieul fait partie du comité d'experts. Photo : Radio-Canada
Jean-Thierry Popieul fait partie du comité d'experts. Photo : Radio-Canada
On estime qu’une infime partie de cas de violence conjugale ou d’agressions sexuelles – soit environ 5 % – sont signalés à la police.

Le comité d’experts, coprésidé par Elizabeth Corte, qui a été juge en chef à la Cour du Québec de 2009 à 2016, et Julie Desrosiers, professeure à la Faculté de droit de l’Université Laval, compte 13 membres issus de divers milieux.

Il remettra son rapport à un comité d’élues qui se qualifie de transpartisan et qui aura le mandat de donner suite aux recommandations: la ministre de la Condition féminine, Isabelle Charest, et les députés de l’opposition Isabelle Melançon, Christine Labrie et Véronique Hivon.

Il reviendra au ministre de la Justice, Simon Jolin-Barrette, de choisir le sort qui sera réservé au rapport.

Les autres membres du comité d’experts sont : Maggie Fredette, coordonnatrice, CALACS Estrie; Jean-Thierry Popieul, intervenant et coordonnateur clinique; Sylvain Guertin, enquêteur spécialisé en matière d’agressions sexuelles à la Sûreté du Québec; Deborah Trent, directrice du Centre pour les victimes d’agression sexuelle de Montréal (CVASM); Me Éliane Beaulieu, procureure aux poursuites criminelles et pénales au DPCP de Rimouski; Michel Dorais, professeur à l’Université Laval; Patricia Tulasne, membre des Courageuses; Anick Sioui, psychologue clinique au Odanak Health Center; Arlène Gaudreault, présidente retraitée de l’Association québécoise Plaidoyer-Victimes; Jean-Marc Bouchard, fondateur du groupe Emphase de Trois-Rivières et Hélène Cadrin, spécialiste en matière de violences conjugales.
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6 commentaires

  1. Anonyme
    Anonyme
    il y a 3 ans
    Bienvewnu au futur tribunal de la présomption de culpabilité !
    ça va être bon pour les affaires !

  2. Marco
    Marco
    il y a 3 ans
    Superb news!
    Great! Here is a good read for the fine-tuning of this future Court.

    https://en.wikipedia.org/wiki/Struggle_session

  3. Pigeon dissident
    Pigeon dissident
    il y a 3 ans
    Mon grain de sel
    la présomption d'innocence et le droit à une défense pleine et entière, vont en prendre pour leur rhume.

  4. Anonyme
    Anonyme
    il y a 3 ans
    Suspect...
    Donc, si je comprends bien, seulement 3 membres sur 13 sont juristes et les autres membres viennent essentiellement de divers mouvements et organismes, disons, « engagés ». Ce n'est pas un tort d'être engagé pour une bonne cause, mais cela vient tout de même avec un bagage quelque peu idéologique, alors que la mise en place d'un tribunal doit être un exercice empreint de neutralité et dépourvu de passion.

    Et comme le rappelle à juste titre le premier ministre, l'agression sexuelle est une infraction *criminelle*, non seulement de compétence fédérale, mais, vu la gravité de l'infraction et l'opprobre social qui y est rattaché (avec raison), également nécessitant le plus haut respect des garanties constitutionnelles et procédurales de l'accusé.

    On ne saurait donc établir un tribunal engagé envers les supposées victimes sans amoindrir la gravité des sanctions imposées et donc la gravité de l'infraction elle-même. L'expression même de « tribunal engagé » relève de l'oxymore.

    Tant et aussi longtemps que l'infraction prévue à l'art. 217, C. cr. sera passible de 14 ans d'emprisonnement (pour ne même pas parler des autres infractions d'agression sexuelle plus graves qui peuvent valoir la réclusion à perpétuité), ces infractions doivent être jugées dans les chambres criminelles et pénales de nos tribunaux de droit commun.

  5. YB
    Why ?
    Pourquoi Patricia Tulasne est-elle membre de ce comité ?

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