La Presse

Les super pros de la Cour suprême

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Rene Lewandowski

2012-01-27 14:20:00

À Ottawa, un trio d'avocats vient de lancer un cabinet spécialisé dans les affaires qui se rendent jusqu'en Cour suprême du Canada. Et ça marche, ils ont plein de clients!

Idéalement, sauf pour une visite, il vaut mieux ne jamais y mettre les pieds, tellement ça peut coûter cher en temps, énergie et frais d'avocat. Mais si jamais, un jour, vous deviez vous retrouver mêlé à une affaire juridique devant se rendre jusqu'en Cour suprême du Canada, peut-être devriez-vous consulter des avocats spécialistes.

Il y en a dans presque tous les grands cabinets, mais il est maintenant possible d'en rencontrer trois d'un coup à un seul endroit. Grâce à Supreme Advocacy (Plaidoirie suprême en français), un petit cabinet-boutique qui vient d'ouvrir à Ottawa et qui ne fait que ça: traiter des dossiers de Cour suprême.

Thomas Slade, Eugene Meehan et Marie-France Major.
Thomas Slade, Eugene Meehan et Marie-France Major.
«À nous trois, nous comptons plus de 30 ans d'expérience en Cour suprême!», dit Eugene Meehan, 59 ans, qui a lancé le projet début janvier avec ses collègues Marie-France Major et Thomas Slade.

L'idée leur est venue il y a quelques mois, alors que les trois juristes pratiquaient encore au bureau d'Ottawa de Lang Michener, qui a fusionné l'an dernier avec le cabinet national McMillan. Depuis plusieurs années, ils formaient le groupe «Cour suprême» et, tout comme maintenant, se consacraient exclusivement aux affaires du plus tribunal au pays. Tout allait bien, jusqu'à ce que la fusion des deux cabinets provoque des conflits d'intérêts entre les dossiers de plusieurs clients.

«On avait moins de travail, car on devait refuser plusieurs mandats», explique Eugene Meehan, qui se consacre aux dossiers de la Cour suprême depuis plus de 20 ans.

Avant Noël, ils ont donc dit bye-bye à McMillan pour se lancer à leur compte. Leur bureau est situé à 10 minutes de marche de la Cour. Un grand risque, certes, mais qui semble déjà rapporter des dividendes puisque la plupart de leurs clients les ont suivis et qu'ils en accueillent de nouveaux régulièrement.

«Nous recevons plus d'un nouveau dossier par jour», dit Marie-France Major, 50 ans, spécialiste dans ce genre de mandats depuis dix ans.

Il faut dire que ce n'est pas donné à tous les avocats de plaider en Cour suprême. Pour la plupart, ils auront la chance d'y aller une ou deux fois durant leur carrière. C'est tout. «Alors que nous sommes là quotidiennement», dit Marie-France Major.

Des règles spécifiques

Elle explique qu'il y a des règles à suivre bien spécifiques à la Cour suprême et qu'il faut les maîtriser pour obtenir du succès. Me Major, tout comme son collègue Meehan, ont du vécu à la Cour suprême, elle comme stagiaire à l'ex-juge Laforest, lui comme adjoint exécutif de l'ex-juge en chef Antonio Lamer.

Un dossier en Cour suprême comprend deux étapes, soit la demande d'autorisation d'appel et l'appel. Chacune de ces étapes comporte ses défis. Pour l'autorisation, il faut démontrer que la cause est d'importance nationale. C'est le premier test, en quelque sorte. Si l'appel est accepté, il faut alors préparer un mémoire et plaider devant les juges.

Pour chacune des étapes, Supreme Advocacy offre une gamme de services, qui vont de la formulation des arguments à la préparation des documents à la stratégie à adopter. Parfois, ils accompagnent comme conseillers les clients en Cour, d'autres fois ils les représentent directement.

Souvent, leurs clients sont d'autres avocats, qui souhaitent se faire assister par des spécialistes. C'est ce qui est arrivé en 2008 dans la cause opposant BCE à ses détenteurs de débentures. L'affaire s'est rendue jusqu'en Cour suprême. BCE et Bell étaient en alors représentés par le cabinet Davies Ward, mais ce dernier était assisté par plusieurs autres avocats, dont Me Meehan et Me Major. BCE a gagné.

Personnalité juridique des juges

Bien sûr, pour réussir en Cour suprême, il faut connaître les règles et les rouages. Mais il faut surtout maîtriser à la fois les aspects juridiques et pratiques, dit Eugene Meehan.

«Il y a un côté très académique», dit l'avocat. Il souligne que la qualité de la rédaction est primordiale, car le mémoire que l'on présente est très important. Ce n'est donc pas un hasard si lui et sa collègue Marie-France Major sont tous les deux docteurs en droit.

Par ailleurs, le côté stratégique est tout aussi fondamental. Quels arguments présenter, comment le faire, comment prévoir les questions des juges et y répondre, voilà autant d'éléments à considérer avant de se présenter en appel.

À cet égard, explique M. Meehan, son cabinet se fait un devoir de suivre et d'analyser les décisions antérieures des juges, autant individuelles que collectives, afin d'en dégager des tendances et de pouvoir mieux conseiller leurs clients par la suite. Pour lui, il est extrêmement important de connaître ce qu'il appelle la «personnalité juridique» des juges afin de prévenir les questions possibles.

Ainsi, le matin d'un appel, il y a toujours une rencontre avec les clients pour discuter des juges qui siègeront ce jour-là sur leur affaire. Ils peuvent être cinq, sept ou neuf, selon les cas.

«Il y a des juges qui préfèrent certains domaines à d'autres, explique l'avocat. Il faut le savoir et adapter notre stratégie en conséquence.»
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