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Si je me touche le nez, suis-je en train de mentir ?

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Céline Gobert

2013-05-31 14:15:00

C’est la question posée à cet avocat, lancé en solo à 29 ans, et qui a fait de sa passion pour le non verbal une véritable composante de sa pratique. Rencontre.

Vincent Denault offre une formation destinée aux avocats intitulée « La recherche de la vérité».
Vincent Denault offre une formation destinée aux avocats intitulée « La recherche de la vérité».
Qui d’entre vous n’a pas déjà rêvé de comprendre le sens caché des mots de son client ? De savoir immédiatement si un collègue lui ment ? Si son témoin est mal à l’aise ?

C’est la promesse qu’offre Me Vincent Denault, du haut de sa trentaine. Dévoiler l’enfoui. Déchiffrer le peu clair. De prime abord, on peut craindre l’ésotérisme de bas étage. Au final, c’est un avocat fin psychologue que l’on rencontre.

D’ailleurs, son bureau, situé dans l’est de la ville de Montréal, possède ce minimalisme propice à la réflexion. Quelque part entre le bureau d’un psy et une salle zen de yoga. Un décor « non traditionnel » à l’image d’une pratique alternative.

Car parallèlement à sa pratique en litige civil, commercial et administratif, Me Denault offre une formation destinée aux avocats intitulée «La recherche de la vérité». En outre, le sujet de son futur mémoire de recherche est «l'importance de la communication non verbale lors de procès.»

« Il y a beaucoup de croyances populaires non fondées», explique le jeune avocat en guise d’introduction. Un menteur touche son nez ou détourne le regard, par exemple. Des inexactitudes.

D’après lui, il faut aller plus loin.

Puis, il me regarde.

« Admettons que tu es contente, je vois une expression faciale de joie. Mais pourquoi tu es contente ? Est-ce que je le sais ? Je ne le sais pas. Cependant, je sais que tu es contente mais je dois le mettre en contexte. Est-ce que tu es celle qui parle ou celle qui écoute ? C’est quoi le sujet de la discussion ? Quels gestes accompagnent ton expression faciale ? Quels mots accompagnent ton expression faciale ? »

Des drapeaux rouges

Me Denault nous prévient ainsi d’emblée : il n’y pas de recette magique. En revanche, le non-verbal, selon lui, est un outil supplémentaire, très révélateur si l’on sait quoi observer et comment l'observer.

Il y a ce que le spécialiste appelle des «drapeaux rouges», qui peuvent alerter et orienter les avocats vers des zones où il serait judicieux de creuser davantage :

  • le changement dans la conduite usuelle de l'individu observé,

  • le non-verbal qui vient en contradiction ou qui exprime une idée différente de la partie du discours ou du geste qu'il accompagne,

  • le non-verbal qui est localisé incorrectement dans le discours ou qui n'est pas synchronisé avec la partie du discours ou le geste qu'il devrait accompagner,


Selon lui, porter attention à ces éléments permet à l’avocat : de développer un regard critique, d’attirer son attention sur l’importance du choix des mots et de la structure des déclarations, d’acquérir des outils pour développer de nouveaux réflexes.

Le 20 décembre 2012, la Cour Suprême du Canada s’est d’ailleurs exprimée sur l’importance de la communication non verbale à l’occasion d’un contre-interrogatoire, lorsqu'elle a établi les règles pour refuser à un témoin le port du niqab.

La preuve selon lui de l’importance grandissante accordée à la question dans la sphère juridique.

Repérer un menteur

Pour repérer un menteur, il y a cependant quelques petits indices qui mettent sur la voie…

Lorsque qu’un individu essaie de dissimuler volontairement une émotion, une expression faciale très brève, entre 1/15e et 1/25ème de seconde, peut apparaître, explique Me Denault sur son blogue.

Une microexpression qui peut se révéler bien utile pour les avocats. A l’instar d’une tension observée dans les mains, d’un poing qui demeure serré. Cela doit vous mettre la puce à l’oreille. Vous pousser à mener plus loin votre enquête.

Autre élément intéressant : un mensonge qui exige un effort cognitif.

Des études ont ainsi démontré une augmentation du nombre de clignements des paupières immédiatement après le mensonge, c’est-à-dire après que l’effort cognitif ait cessé.

« Lorsqu’il observe l’expression d’émotions et les signes d’effort cognitif, l’avocat qui procède à l’interrogatoire avant ou après la production de la défense doit, entre autres, les apprécier dans le contexte de leur apparition.»

Finalement, pour s’approcher de la vérité, il suffit simplement de bien savoir regarder.
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