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Le rejet d’un projet d’acquisition pourrait signaler une application plus stricte de la loi

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Osler

2008-04-30 10:46:00

Le 10 avril 2008, le ministre fédéral de l’Industrie, Jim Prentice, a publiquement confirmé qu’il avait rejeté le projet de vente de la division des systèmes d’information et des activités de services géospatiaux de MacDonald, Dettwiler and Associates Ltd.’s (MDA), d’une valeur de 1,325 milliard de dollars CA, à Alliant Techsystems Inc. (ATK) des États-Unis.

Le rejet du ministre pourrait signaler une application plus stricte de la loi à l’égard des projets d’acquisition.

Comme motif du rejet de la vente, le Ministre indique qu’il n’est pas convaincu que l’investissement « sera vraisemblablement à l’avantage net du Canada », comme l’exige la Loi sur investissement Canada (« LIC »).

Selon les rapports des médias, bien qu’il puisse y avoir eu d’autres facteurs en jeu, des inquiétudes en ce qui a trait à la sécurité
nationale se rapportant à la souveraineté dans l’Arctique et la crainte de perdre le contrôle sur le satellite Radarsat-2 exploité par MDA ont joué un rôle important dans la décision du Ministre.

Il est encore possible que l’opération soit approuvée aux termes de la LIC. ATK a 30 jours pour en appeler de la décision et présenter une nouvelle argumentation au Ministre. Si M. Prentice confirme son rejet de l’opération, il s’agira de la première fois depuis l’adoption de la LIC il y a 23 ans qu’une opération à l’extérieur du domaine culturel aura été bloquée par suite de l’incapacité de satisfaire au critère de « l’avantage net » aux termes de la LIC.

Inquiétudes à l’égard de la sécurité nationale

Le Ministre n’a pas publié les raisons de sa décision, et le processus d’examen est confidentiel. L’importance globale de la décision du ministre Prentice pour les investisseurs qui envisagent de prendre des participations majoritaires dans des entreprises canadiennes reste à évaluer.

Toutefois, en se fondant sur des sources publiques, plusieurs observations peuvent être faites à l’heure actuelle :

• La décision de M. Prentice établit que même si la sécurité nationale n’est pas un facteur explicite dans la décision à l’égard de l’avantage net, des inquiétudes à l’égard de la sécurité nationale du Canada joueront effectivement un rôle important dans l’examen que fera le gouvernement des projets d’investissement.

• Des inquiétudes en matière de sécurité nationale peuvent être suffisantes pour bloquer une opération, quels que soient les engagements qu’un investisseur éventuel peut être prêt à prendre.

• Cette affaire prouve que des inquiétudes graves à l’égard de la sécurité nationale peuvent survenir même si l’investisseur n’est pas une société contrôlée par un État et/ou n’est pas établi dans un pays dont on pourrait habituellement s’attendre à ce qu’il soulève des inquiétudes à l’égard de la sécurité nationale.
Bien que des clarifications sur la portée du critère de sécurité nationale seront, on l’espère, fournies dans les lignes directrices à cet égard qui devraient être publiées par Industrie Canada au cours des prochains mois, cette affaire confirme que le gouvernement estime avoir le pouvoir de s’opposer à des opérations pour des motifs de sécurité nationale aux termes des lois et des politiques existantes.

• Relativement à la question de la sécurité nationale, l’empressement de M. Prentice à adopter une position ferme dans cette affaire (et le soutien apparent du public pour sa décision) a également fait hausser la probabilité qu’il sera prêt à faire de même de façon plus générale dans les affaires mettant en jeu des projets d’investissement au Canada par des investisseurs considérés comme des sociétés d’État étrangères (notamment les fonds d’investissement souverains). On trouvera une copie des lignes directrices publiées en décembre 2007 sur ce sujet sur le site Web d’Investissement Canada à http://www.ic.gc.ca/epic/site/ica-lic.nsf/en/lk00064e.html#state-owned. Pour un examen de ces lignes directrices, se reporter au numéro de notre publication Actualités Osler du 7 décembre 2007 intitulé « Le Canada envisage d’adopter de nouvelles règles concernant les investissements par des entreprises d’État étrangères ».

• Il est trop tôt pour savoir si la décision de M. Prentice dénote un changement de cap vers une démarche plus stricte de l’examen des projets d’investissements étrangers au Canada pour les investissements qui ne donnent pas lieu à des inquiétudes en matière de sécurité nationale ou d’influence d’État étranger.

Conservation des actifs essentiels pour les industries canadiennes

En dépit du tollé général à l’égard de la raréfaction des industries canadiennes, Industrie Canada a permis à des investisseurs étrangers d’acquérir le contrôle de certaines des sociétés canadiennes les plus connues, par exemple Dofasco, Inco, Falconbridge et Alcan. Toutefois, dans un discours prononcé à l’Agence spatiale canadienne à Saint Hubert, au Québec, le 11 avril 2008, M. Prentice a fait diverses déclarations pour défendre sa décision de bloquer la vente de MDA, qui laissent entendre que le motif de sa décision n’était pas seulement lié à des considérations de sécurité nationale.

M. Prentice a notamment déclaré que lorsqu’il s’agit de déterminer si des acquisitions étrangères apportent un avantage net au Canada, son critère ultime est le suivant : « le Canada doit conserver son autorité et son contrôle à l’égard des technologies qui sont vitales à l’avenir de notre industrie et à la réalisation de nos objectifs en matière de politiques publiques ».

Cet énoncé laisse entendre que le ministre Prentice est d’avis que le maintien de fleurons nationaux dans les mains des Canadiens et de la propriété canadienne d’actifs vitaux pour les industries canadiennes est en soi un but valable, en plus de l’exigence existante voulant que les investissements étrangers visant l’acquisition du contrôle d’une entreprise canadienne doivent faire l’objet d’un examen attentif et n’être permis que lorsqu’il peut être prouvé qu’ils sont « à l’avantage net du Canada ».

Groupe d’étude sur les politiques en matière de concurrence

Le groupe d’étude sur les politiques en matière de concurrence entreprend entre autres un examen global de la LIC et des investissements étrangers au Canada (à l’exception des questions touchant la sécurité nationale et les sociétés d’État étrangères). En particulier à la lumière de la récente évolution faisant l’objet du présent numéro, les recommandations du groupe d’étude seront d’un intérêt considérable. Ces recommandations sont attendues pour juin 2008.

Par Peter Franklyn, Shuli Rodal et Nicole Brown, d'Osler.
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