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Ville de Laval : un avocat contre la corruption

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Emeline Magnier

2014-09-10 15:00:00

Qui est l’avocat chargé de lancer les poursuites pour récupérer les sommes détournées à Laval ? Qui sera poursuivi et sur quels fondements ? Quelques éléments de réponse...

Me Daniel Chénard a reçu le mandat de coordonner l'ensemble des procédures
Me Daniel Chénard a reçu le mandat de coordonner l'ensemble des procédures
Lors d'une conférence de presse qui s'est déroulée ce matin à l'Hôtel de Ville de Laval, le maire Marc Demers a annoncé que la municipalité entamait les procédures dans ce qui deviendra une série de poursuites civiles visant à récupérer l’argent qui a été détourné au fil des ans lors de nombreuses allégations de corruption.

C'est Me Daniel Chénard qui a reçu le mandat exclusif de coordonner l'ensemble des procédures et de déposer des poursuites au civil pour récupérer une somme qui, selon M. Demers, se chiffrerait à plusieurs millions de dollars.

« Nous avons choisi de recourir à un avocat indépendant, sans lien avec la Ville. C'est important pour ses décisions et ses actions », a souligné le maire de Laval.

À l'interne, le contentieux civil et administratif de la ville est composé de 14 avocats. Au mois de mai dernier, Me Patrice F. Guay a pris la direction du contentieux.

En entrevue avec Droit-inc il y a quelques semaines, il avait indiqué que la grande majorité des dossiers de la ville étaient actuellement traités à l'interne mais que toute organisation publique devait pouvoir compter sur des ressources extérieures pour l'assister dans l'exécution de sa tâche. « Nous choisissons nos avocats par rapport à leurs compétences dans différents domaines de droit », avait souligné Me Guay.

Qui est Me Daniel Chénard ?

Me Patrice F. Guay
Me Patrice F. Guay
« Je suis très honoré que Me Guay m’ait choisi pour assister la ville. Depuis le début de ma carrière, j’ai toujours été très intéressé par les différentes fonctions des villes. C’est un mandat exigeant et technique qui demandera beaucoup de temps et de travail de cueillette », a déclaré Me Chénard, qui précise ne connaître ni le maire, ni le conseil municipal.

« C’est une première en droit municipal québécois et canadien qu’un programme de poursuites est instruit par une municipalité », ajoute-t-il.

Spécialisé en droit administratif, constitutionnel, municipal et disciplinaire, Me Chénard a représenté le Barreau du Québec et le Bureau du syndic en tant que syndic ad hoc. Depuis 1995, il siège au Comité de liaison Barreau du Québec - Tribunal administratif du Québec et a été président national de la section de droit municipal de l'Association du Barreau canadien.

L'avocat a également enseigné à l'Université de Montréal et à l'Université McGill et a dispensé plusieurs formations à l'École du Barreau. En 1985, il a été co-lauréat du prix littéraire de la Fondation du Barreau du Québec pour un ouvrage intitulé : Droit québécois de l’aménagement du territoire. Le Barreau du Québec lui a décerné la distinction honorifique Avocat émérite en 2011.

« C'est un excellent avocat avec une très bonne réputation », souligne Me Charles Caza, spécialisé en droit municipal et associé du cabinet Caza Marceau Soucy Boudreau. Rappelons-le, Me Caza représente Jacques Foucher, le candidat défait à la mairie de Laval, dans le cadre de la requête en inéligibilité déposée contre Marc Demers.

Me Chénard devra rédiger des poursuites civiles pour dommages et intérêts, contre « toute personne légale, toute firme, toute compagnie, tout individu contre qui il y aura suffisamment de preuve », a déclaré M. Demers.

Responsabilité civile

Me Charles Caza, spécialisé en droit municipal et associé du cabinet Caza Marceau Soucy Boudreau
Me Charles Caza, spécialisé en droit municipal et associé du cabinet Caza Marceau Soucy Boudreau
S'il n'a pas directement nommé Gilles Vaillancourt, qui fait aussi face à des accusations criminelles de gangstérisme et de fraude, il est plus que probable que celui qui a été à la tête de la ville pendant 23 ans soit visé.

Si c'est le cas, ce sont les principes généraux de la responsabilité civile qui s'appliqueront, indique Me Caza. « Il faudra prouver une faute, un préjudice et un lien de causalité entre les deux, mais il y a aussi une question d'ordre moral de par son statut: ce n'était pas n'importe qui : il était maire.»

Les trois avocats arrêtés le même jour que Gilles Vaillancourt, Pierre L. Lambert - alors avocat chez Dunton Rainville -, Jean Bertrand et Robert Talbot - pourraient eux aussi figurer sur la liste des défendeurs.

Éléments de preuve multiples

L'administration de la ville de Laval n'a pas souhaité attendre que les procès criminels de M. Vaillancourt et ses co-accusés soient terminés considérant qu'il était préférable de les mener en parallèle puisque les règles de preuve et la fardeau de preuve ne sont pas les mêmes au civil et au criminel.

Quant à savoir si les témoignages incriminants entendus à la commission Charbonneau seront utilisés, le maire Demers a rappelé que ceux qui témoignent bénéficient de l'immunité mais que les personnes incriminées par ces témoins, elles, n'ont pas cette protection et que les témoignages peuvent donc être utilisés en preuve.

« Nous sommes en train de récolter l’eau d’érable qui coule de la commission Charbonneau et nous ferons bouillir tout ça bientôt », indique Me Chénard qui ne s’avance pas toutefois à donner une date pour le lancement des procédures.

La preuve de la ville ne reposerait pas uniquement sur les témoignages entendus à la commission d'enquête sur l'industrie de la construction. 208 boîtes de documents datant de l'administration de Gilles Vaillancourt ont été retrouvées dans la chambre des fournaises de l'hôtel de ville.

Des employés municipaux ont sonné l'alarme lorsque le maire déchu Gilles Vaillancourt s'est présenté à quelques reprises à l'hôtel de ville avant les élections et traînait pendant une heure trente dans le hall d'entrée. Après l'élection, M. Vaillancourt aurait souhaité récupérer des documents.

« Nous utiliserons tous les moyens prévus par la loi pour récupérer l'argent dérobé et voulons envoyer un message clair : la récréation est terminé », a conclu M. Demers.

- Avec Presse canadienne et QMI
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