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Une nouvelle approche pour la surveillance et l’administration des régimes de retraite multijuridictionnels

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Osler

2008-11-18 08:30:00

L’Association canadienne des organismes de contrôle des régimes de retraite a récemment publié un projet d’accord en vue d’établir un cadre pour déterminer la façon dont les lois provinciales et fédérale s’appliqueront aux régimes de retraite multijuridictionnels.

Depuis 1968, le gouvernement fédéral et la plupart des provinces ont conclu des accords bilatéraux et multilatéraux de réciprocité (« accords de réciprocité ») visant à simplifier l’administration des régimes de retraite multijuridictionnels (« RRMJ ») au moyen d’une délégation des pouvoirs et fonctions des autres autorités réglementaires (autorités secondaires) à l’autorité réglementaire ayant compétence sur le plus grand nombre de participants actifs (autorité principale) du RRJM. Ceci a amené l’autorité principale à appliquer ses propres règles quant à l’administration du RRMJ et à déterminer les droits des participants conformément à la loi applicable dans la province où ceux ci étaient employés.

Dans le jugement rendu dans l’affaire Leco, la Cour divisionnaire de l’Ontario a remis en question l’application de cette pratique lorsqu’il est question, entre autres, des droits à l’excédent d’actif et sa répartition. Cette décision de la cour a rendu les autorités réglementaires beaucoup plus prudentes dans la réglementation des RRMJ et, en conséquence, il est devenu plus difficile pour les employeurs d’administrer les RRMJ. Par exemple, les administrateurs de RRMJ se trouvent souvent dans l’incertitude lorsqu’ils ont à déterminer si une question en particulier est régie par la loi de l’autorité principale ou celle de chacune des autorités secondaires, surtout lorsqu’il s’agit d’une question qui pourrait avoir une incidence sur l’ensemble d’un régime (p. ex., le financement, les placements ou les transferts d’actif). Il n’est pas clair non plus si les accords de réciprocité permettent aux administrateurs de RRMJ d’ignorer tout simplement les exigences des autres juridictions en ce qui a trait à l’administration du régime, comme l’exigence prévue à la Loi sur les régimes complémentaires de retraite du Québec selon laquelle les régimes doivent être administrés par un comité de retraite.

Le projet d’accord de l’ACOR

Le 21 octobre 2008, l’Association canadienne des organismes de contrôle des régimes de retraite (« ACOR ») a publié le Projet d’accord sur les régimes de retraite relevant de plus d’une autorité gouvernementale (« projet d’accord »). Le projet d’accord vise à établir un cadre pour la surveillance et l’administration des RRMJ. En voici les dispositions clés :
• les règles de l’autorité principale s’appliqueront aux matières ayant une incidence sur l’ensemble du RRMJ (p. ex., le financement, les placements et l’enregistrement du régime). Ces matières sont spécifiquement énumérées dans une annexe au projet d’accord;

• de façon générale, l’autorité principale appliquera la loi de chacune des autorités secondaires aux participants assujettis à celles ci pour les matières qui ne sont pas énumérées dans l’annexe mentionnée ci dessus (p. ex., les règles d’acquisition et d’immobilisation et la répartition de l’excédent d’actif);

• tout recours à l’encontre d’une décision affectant le régime dans son ensemble devra être intenté conformément aux exigences de la loi de l’autorité principale. Un recours à l’encontre d’une décision affectant les droits des participants devra être intenté conformément aux exigences de la loi de l’autorité secondaire concernée, comme si la décision initiale avait été rendue par l’autorité secondaire en question;

• la méthode de la « dernière loi applicable » sera utilisée pour déterminer les droits d’un participant. Cela signifie que l’ensemble des droits accumulés par un participant seront déterminés conformément à la loi sur les régimes de retraite à laquelle il est assujetti au moment de sa retraite, de sa cessation d’emploi ou de son décès.

Questions à considérer

Bien qu’il semble que le projet d’accord vise à simplifier l’administration des RRMJ, certaines règles pourraient s’avérer onéreuses pour les promoteurs de RRMJ. Par exemple, advenant le cas où l’autorité principale dont la loi permet le financement à l’aide de lettres de crédit est remplacée par une autorité dont la loi ne permet pas l’utilisation de lettres de crédit, une somme égale à la valeur de toute lettre de crédit en vigueur devra être versée à la caisse de retraite du RRJM au plus tard 30 jours avant la date du changement d’autorité principale. Toutefois, cette exigence pourrait être atténuée par le fait que l’administrateur du RRJM devrait être avisé du changement d’autorité principale au moins un an à l’avance.

Dans le projet d’accord, certaines questions demeurent non résolues, dont par exemple les suivantes :

• bien qu’il ressort clairement du projet d’accord que certaines questions, dont celle de la répartition de l’excédent d’actif, ne sont pas de nature « administrative », il demeurera difficile, en pratique, de traiter ces questions puisque les règles divergentes qui existent dans les différentes juridictions continueront à s’appliquer;

• le fait d’« importer » la loi d’une autorité secondaire dans le cadre réglementaire d’une autorité principale pourrait s’avérer difficile pour certaines autorités réglementaires qui ne sont pas familières avec la loi de l’autre autorité. Il est également possible que certaines autorités réglementaires ne soient tout simplement pas investies du pouvoir nécessaire pour conclure une telle entente en vertu de leur législation en matière de régimes de retraite;

• bien qu’il préconise la coopération entre les autorités réglementaires et l’adoption de « solutions à l’amiable » pour régler les litiges découlant de son interprétation, le projet d’accord ne fournit aucun mécanisme précis pour la résolution de litiges. Ainsi, une autorité réglementaire pourrait décider de se retirer du projet d’accord en raison de litiges non résolus, ce qui obligerait alors les administrateurs de RRMJ à se conformer à nouveau aux différentes lois des autorités concernées.

En novembre et décembre 2008, l’ACOR organisera des séances de consultation sur le projet d’accord à divers endroits au Canada. Tous commentaires sur ce projet d’accord doivent être soumis d’ici le 30 janvier 2009.

Par Paul Litner, Michel Benoit, Evan Howard, Lesha Van Der Bij, d’Osler, Hoskin & Harcourt
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