Du leadership positif

''Depuis ses débuts, la firme Montpetit s’est donné la mission de soutenir la relève. Au cours des prochains mois, dans le cadre de chroniques d’experts, Me Marie-Pierre Gravel aura donc le privilège de s’entretenir avec des juges de différentes instances judiciaires et d’échanger avec eux sur le thème de la relève dans la profession.''

Quelques éléments sont rapidement ressortis des premiers instants de ma rencontre avec l’Honorable Louis J. Gouin, juge coordonnateur de la Chambre commerciale de la Cour supérieure du Québec, division de Montréal. Sa passion sans équivoque pour la profession et son profond désir de partager avec moi quelques trucs pouvant aider la relève à cheminer dans une profession qui, disons-le, comporte son lot de défis.

La grande ouverture du juge Gouin m’a permis de découvrir un homme avec une philosophie de vie extrêmement inspirante et c’est d’ailleurs sur les bases de celle-ci que l’entretien s’est ouvert.


Quels éléments vous semblent essentiels pour cheminer dans la profession ?

« Respect, authenticité et communication ». Bien que l’application de ces trois valeurs ne soit pas à elle seule garante de succès, elle constitue, selon le juge Gouin, une assise importante pouvant permettre aux avocats de cheminer dignement dans leur carrière.

La perfection n’existe pas et nos erreurs doivent nous permettre de gagner en expérience. Pour ce faire, encore faut-il se donner le droit à l’erreur et ne pas tenter d’être parfait en toutes circonstances. « Il faut être ambitieux, certes, mais sans que nos attentes soient démesurées ».

Au-delà de ces éléments, le juge Gouin est également profondément convaincu que le leadership positif est, en tout temps, une formule gagnante à l’égard de soi-même et des autres. Faisant référence à sa façon bien personnelle d’aborder certains problèmes, il ajoute : « Je me dis toujours, mes enfants me regardent. Comment dois-je me comporter pour qu’ils soient fiers ? »

Saisissant l’opportunité, je poursuis sur le thème plus personnel de la conciliation travail-vie personnelle.


Pensez-vous que la conciliation travail-vie personnelle est réellement possible au sein de la profession ?

Comme plusieurs, le juge Gouin nomme le défi de trouver un équilibre comme l’un des principaux défis de sa carrière.

À cet égard, il propose comme piste de solution la flexibilité et la discipline, « l’un n’allant pas sans l’autre ». Il faut, selon lui, trouver une façon de faire changer les choses.

À titre d’exemple, il soulève la question de la présence physique requise au bureau. « J’aime parfois mieux rédiger de la maison aux heures qui me conviennent puisque cela me donne l’opportunité de faire certaines pauses pour faire du sport par exemple ». Cela requiert toutefois une grande discipline pour s’atteler à la tâche et ne pas se laisser distraire.

Bref, pour le juge Gouin, c’est une question d’apprendre à se connaître et de ne pas avoir peur de faire les choses en fonction de ce qui nous convient réellement plutôt qu’en fonction de modèles qui ne nous correspondent pas nécessairement.

« Il faut prendre confiance en soi et ajuster nos façons de faire en fonction de qui nous sommes sans avoir peur ».

Cette réflexion amène inévitablement un changement profond dans la façon de pratiquer et m’amène donc sur le terrain de l’évolution du rôle traditionnel de l’avocat.


Comment l’évolution de ce rôle influencera-t-elle la pratique des avocats de la relève ?

En tant que juge coordonnateur de la Chambre commerciale, le juge Gouin dit souvent : « This is a business Court and we only deal with the real business issues ».

Il émet une réserve en spécifiant que ce n’est évidemment pas applicable à tous les types de pratique, mais son expérience personnelle le pousse à croire que « plus que jamais, les avocates/avocats sont des femmes/hommes d’affaires ».

Comme toujours, les avocats devront être bien préparés, mais « ils devront également faire preuve d’une grande souplesse puisque les juges seront amenés à intervenir de plus en plus activement. Ils auront un rôle proactif dans les dossiers afin de réduire le temps de Cour aux réelles questions de droit et ainsi gagner en efficacité ».

Il termine en lançant, avec un petit sourire en coin : « Cela semble évident, mais dans les faits, il n’y a rien de plus difficile pour un avocat que de faire court ! »