Entrevues

«Je voyais la vague bleue arriver!»

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éric Martel

2018-10-24 14:55:00

Bien qu’elle remporte une course serrée à Vaudreuil, cette avocate libérale est partagée entre victoire et défaite.

Me Marie-Claude Nichols, avocate libérale
Me Marie-Claude Nichols, avocate libérale
Le premier octobre dernier, c’est une guerre de tranchées que Me Marie-Claude Nichols a remportée à Vaudreuil, où elle a obtenu 2765 votes de plus que son plus proche opposant, Claude Bourdonnais de la Coalition Avenir Québec (CAQ).

Plusieurs croyaient que celle qui a tenu sa pratique solo en droit familial pendant 12 ans l’emporterait facilement dans cette circonscription auparavant considérée comme un château-fort des libéraux.

L’avocate qui en sera à son deuxième mandat en politique provinciale a accepté de livrer ses états d’âme à Droit-Inc.

Droit-inc: Comment vous êtes-vous sentie à la suite de votre victoire dans ce tsunami caquiste?

Me Marie-Claude Nichols : Tellement partagée! Je n’avais jamais simultanément ressenti un sentiment de victoire et de défaite.

C’est tout même choquant après avoir été au pouvoir pendant quatre ans. Même si j’étais en bonne position, je voyais la vague bleue arriver. Elle emportait plusieurs de mes collègues qui n’ont pas pu remonter la pente et qui ont perdu leurs sièges. C’était choquant.

À votre avis, qu’est-ce que ce tsunami caquiste dit des électeurs québécois?

Ce tsunami, on l’a vraiment senti. Les gens voulaient du changement. Pourquoi? Je ne le comprends pas encore…On a placé le Québec dans une bonne posture. Le taux de chômage est bas. On a remis quatre budgets équilibrés. Tout semble bien aller… Nous avons un gros post mortem à faire. Il faut mieux comprendre nos faiblesses.

Pourtant, les sondages prévoyaient une course plus serrée. Vous avez tout de même vu venir la vague caquiste?

Je n’ai jamais fait confiance aux sondages. Je préfère prendre le pouls des électeurs sur le terrain. De toute manière, gagner les sondages, ce n’est pas gagner les élections.

On me disait que ma campagne serait facile parce que j’étais dans un château fort libéral. Heureusement, je ne l’ai pas cru. On a senti la chaleur tout au long de la campagne…

Disons qu’on ne regrette pas d’avoir travaillé fort pour gagner!

Avez-vous cru à un certain moment que vous alliez perdre?

Les gens qui n’envisagent pas cette possibilité ne devraient pas aller en politique. Je suis en politique pour faire face à de l’opposition, sinon, je resterais chez moi.

Le redécoupage de la carte électorale ne m’a pas facilité la tâche. Auparavant, nous misions beaucoup sur les électeurs de Hudson, qui sont désormais dans la circonscription de Soulanges.

Comment percevez-vous votre rôle dans un parti de l’opposition?

C’est difficile à dire, car je ne l’ai jamais vécu. On va travailler très fort. On sera en constant contact avec les ministres choisis par François Legault. Il faut savoir qu’historiquement, nous sommes reconnus comme un parti respectueux. Lorsqu’on était au pouvoir, on écoutait l’opposition. On s’attend à ce que la CAQ fasse la même chose. Je ne suis pas inquiète en vue des quatre prochaines années.

Pourquoi avez-vous choisi de joindre les libéraux à la base?

Je viens d’une famille libérale. J’ai toujours eu un sentiment d’appartenance pour le parti. Nous avons des valeurs ancrées auxquelles je crois profondément.

C’est un parti qui propose une stabilité : ses valeurs ne changeront jamais. Ceci dit, même si nos valeurs ne changeront pas, notre manière de livrer notre message doit changer. Nous devons sérieusement nous regarder dans le miroir pour être prêts pour les prochaines élections.

Il y a eu un gros débat entourant le port des signes religieux dernièrement. Quelle est votre position là-dessus?

Ça fait longtemps que la question roule! Bien entendu, je ne suis pas d’accord avec la position de la CAQ. Ce n’est pas le seul point sur lequel je ne comprends pas la CAQ...la maternelle à 4 ans, l’expulsion des immigrants...

À travers ces positions controversées, est-ce qu’on doit tourner nos yeux vers la question du port de signes religieux par les juges? Il me semble que c’est un peu un débat en l’air. Veut-on faire peur aux gens? Les alarmer? C’est une position difficile à comprendre…

Pourquoi demeurez-vous membre du barreau même si vous ne pratiquez plus?

Vous savez, j’aurais le droit de pratiquer. Je ne pourrais pas plaider devant les juges, mais je pourrais me concentrer sur des causes qui n’impliquent pas de conflits d’intérêts. Amir Kadir pratiquait comme médecin en conservant son rôle en politique.

Je ne suis pas à l’abri d’une défaite! J’ai travaillé fort pour l’avoir ce titre et je ne veux pas le perdre.

Et puis, le droit vous manque?

Quand je vais dîner avec des collègues avocats, je réalise que oui. Lire des jurisprudences en droit familial, ça vient toujours me chercher. Par contre, c’est un très beau travail j’ai l’opportunité d’exercer pendant 20 ans. Ce n’est pas le plus facile, mais pour l’instant, je ne l’échangerais pour rien.

Pourquoi les avocats se présentent-ils fréquemment en politique?

Désormais, c’est plus les gens du milieu des communications ou les anciens journalistes qui se dirigent davantage en politique que ceux issus du droit à mon avis.

Par contre, la politique demeure intéressante pour tout les gens du milieu du droit. On a un rôle de législateur. Dans les deux domaines, il faut faire l’étude détaillée des projets de loi.

Est-ce que vous croyez que les avocats font particulièrement de bons politiciens?

Je ne crois pas qu’ils sont meilleurs que les autres en politique. Peu importe sa profession d’origine, la qualité principale d’un politicien est l’écoute et la capacité d’aider les autres.

Les gens pensent parfois que les députés se tournent les pouces. Être député, c’est avoir sa PME. Il faut gérer sa masse salariale. Rencontrer des citoyens. On fait de tout! En plus, il faut se rendre à Québec trois jours par semaine, gérer ses partisans et faire de la législation.

Quelle question juridique sera importante à vos yeux au cours des trois prochaines année?

Je pense que le droit familial est réellement dû pour une mise à jour. Il y a des ajustements à faire au niveau des pensions alimentaires,du partage du patrimoine familial et de l’adoption. Ça fait beaucoup à garder en tête!
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4 commentaires

  1. DSG
    Je ne le comprends pas encore…
    She doesn't understand why the Liberals were shellacked? Maybe it's because people are sick and tired with the systemic corruption in the Liberal party. Lucky for them the anglos in Montreal kept them from being completely wiped off of the political map, which they so truly deserve.

  2. Anonyme
    Anonyme
    il y a 5 ans
    Pourquoi? Je ne le comprends pas encore…
    Regardez une carte, colorez en rouge et en bleu, respectivement, les comptés libéraux et CAQistes, et examinez le pourcentage de la population anglophone et allophone dans chacun. Voilà le résultat d'une immigration effreinée et biberonnée au mépris du peuple québécois.

    La question de l'urne, mais qui a été timidement abordée par les médias, c'était celle du niveau d'imigration et de leur intégration.

    Regardez aussi dans votre cour: Arcand qui vire Taillefer le lendemain des élections, après que ce dernier ait sugérer d'être un peu plus attentif à ce genre de préoccupation. Par ce geste, le PLQ faisait sont lit: s'asseoir sur son chateau-fort de votes ethniques immuable d'une trentaine de comptés, et chercher à acheter des votes dans une vingtaine d'autres (comme il a tenté de le faire avec son projet d'éolienne dans une communauté autochtone).

    Le vote pour la CAQ démontre un ralliement d'union nationale, par de nombreux péquistes qui ont décider de voter ainsi en se bouchant le nez, par sens de l'urgence nationale, face à un PLQ toujours prêt à vendre la ferme.

    • Me X
      Survie du Québec français
      Exactement.

      C'est pourquoi aussi le système uninominal à un tour reste le meilleur rampart contre l'ethnicisme du PLQ.

      Les gens ont aussi compris, au moins partiellement, qu'on parle ici de la survie du Québec français, ni plus ni moins.

  3. Urbain
    Urbain
    il y a 5 ans
    Diviser pour mieux régner
    Au-contraire, le système uninominal à un tour favorisera presque toujours le parti libéral. Pour quelle raison croyez-vous que ce parti est vivant depuis 150 ans ?

    Avec ce système, très difficile d'élire un tiers parti puisque tous les anglophones votent pour lui. Ça prend toutes les forces vives francophones. Ça a pris presque 30 ans au Québec si on considère que l'ADQ = CAQ. Avec 30% de votes, le parti libéral restera toujours la solution de rechange facile dans ce système alors que ça prend un ras le bol général et une union difficile à obtenir des francophones pour élire un tiers parti.

    Avec la proportionnelle ou quelque chose du genre, les libéraux pourraient rester dans le coin avec leurs 30% et deux autres parties diriger ensemble, si nécessaire.

    Pas pour rien que Philippe Couillard paniquait quand les parties d'oppositions ont dit qu'ils allaient modifier le système de scrutin. Ça pourrait être la mort du parti libéral si les autres parties peuvent surmonter leurs divisions.

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