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Le retard chronique est une faute déontologique

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Jean-francois Parent

2019-06-25 10:15:00

Mettant souvent plus d’une année à motiver ses décisions, une juge du TAQ est trouvée coupable d’infraction déontologique par le Conseil de justice administrative.

La juge administrative Me Kathya Gagnon est pointée du doigt pour ses retards systématiques.
La juge administrative Me Kathya Gagnon est pointée du doigt pour ses retards systématiques.
La juge administrative Me Kathya Gagnon, qui siège au Tribunal administratif du Québec depuis 2008, attend une décision sur sanction. Un rapport d’enquête du Conseil de justice administrative (CJA) conclut que ses retards systématiques dans le traitement de ses dossiers constituent des infractions à la Loi sur la justice administrative.

« Multiplier les retards sans demander de prolongation c'est agir avec mépris à l’égard des justiciables qui attendent leur décision », tranche le CJA.

C’est Me Mathieu Proulx, président du TAQ, qui a déposé une plainte au Conseil en 2016. On reproche à Kathya Gagnon « de ne pas se conformer aux prescriptions de la ''Loi sur la justice administrative'' en matière de délibéré et de passer outre aux directives de sa vice-présidente relativement à son obligation de demander des prolongations de délai ».

Après de multiples rappels à l’ordre au fil des ans, « Me Gagnon refuse ou néglige de s’amender », peut-on lire dans la décision du conseil.

Des retards épiques

Nommée à temps plein à la Commission d’examen des troubles mentaux (CETM) en 2010, Kathya Gagnon accumule rapidement les délais. Héritant de 3 ou 4 dossiers par jour, souvent moins, parfois plus, elle prend facilement 4 fois plus de temps que ses collègues à se préparer aux audiences.

Le temps de préparation des dossiers varie en fonction de leur complexité et de l’expérience du juge administratif. Ainsi, le temps de préparation moyen d’un dossier pour un juge de la CETM varie entre 30 et 90 minutes. Kathya Gagnon dit y consacrer jusqu’à 5 heures.

À la CETM, la décision est rendue sur le banc, et les motifs dans les 2 ou 3 mois suivants. Kathya Gagnon, elle, franchit la barre des six mois de retard pour rendre ses motifs, alors que ses collègues les plus lents mettent jusqu’à 3 mois, souvent moins.

Me Gagnon n’a pas répondu aux demandes de commentaires de Droit-Inc.

427 dossiers de retard

Les retards s’accumulent au point où on lui demande de quitter la CETM en avril 2011. Elle retourne alors siéger à la Section des affaires sociales (SAS).

Pour Me Gagnon, cependant, le problème perdure : on la retire d’ailleurs des rôles en mars 2012, car elle n’a pas rédigé de motifs pour 427 des 447 dossiers entendus. Elle s’est donc acquittée de 5 % seulement de sa tâche en deux ans.

On la libère donc de siéger pendant deux ans pour qu’elle puisse rédiger ses décisions. Alors qu’on s’attend à ce qu’une vingtaine de décisions soient motivées par semaine, Kathya Gagnon peine à en livrer 4.

Cette période de rédaction « a hypothéqué les opérations de la CETM », constate le conseil de justice administrative.

Et puisque le Code criminel prévoit que la CETM doit fait parvenir à toutes les parties un exemplaire de sa décision accompagnée des motifs, cette rédaction est une obligation légale. Que Me Gagnon ne respecte pas.

« Dans ce contexte, ne pas réussir à mieux optimiser son temps de rédaction pour éviter d’accumuler des retards (…) s’avère problématique », poursuit le conseil.

Enfin, Me Gagnon « ne semble pas sensible aux difficultés que ses retards peuvent causer aux justiciables (ni) par la manière dont ces délais peuvent porter atteinte à la confiance du public dans les institutions judiciaires ».

D’où la faute déontologique.
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