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Un avocat montréalais affirme avoir été victime de profilage racial

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Camille Laurin-desjardins

2021-02-01 15:00:00

« Si je m’appelais Jean Tremblay, tout ça ne serait jamais arrivé! » s’exclame l’avocat, à propos de son arrestation par le SPVM.

Me Kwadwo D. Yeboah ne décolère pas.
Me Kwadwo D. Yeboah ne décolère pas.
Quatre jours après avoir été arrêté et menotté à l’arrière d’une voiture de police, « comme un criminel », Me Kwadwo D. Yeboah ne décolère pas.

L’avocat oeuvrant à son compte en droit criminel et pénal roulait tout bonnement sur le boulevard René-Lévesque, à Montréal, jeudi soir dernier vers 18h40, avec sa fille de 15 ans, pour aller chercher à souper.

Quand son téléphone a sonné, il a demandé à sa fille de répondre et de mettre l’appareil en mode haut-parleurs – c’est son fils qui l’appelait, raconte-t-il.

C’est à ce moment qu’il a vu un policier dans sa voiture, à sa gauche, qui lui a fait signe de s’arrêter, avant de démarrer ses gyrophares.

« La première chose qu’il me demande, c’est : “Tu vas où?”. Je lui réponds que je vais chercher de la nourriture. Il me dit : “C’est à qui la voiture?”. Je lui dis que c’est la voiture de ma femme. Là, il me demande mon permis, l’immatriculation et les papiers d’assurance. Je lui donne mon permis, mais je ne trouve pas les autres papiers, parce que c’est la voiture de ma femme… »

Le policier lui suggère ensuite de fouiller dans ses courriels pour retrouver sa preuve d’assurance, avant de retourner vers son véhicule avec le permis de Me Yeboah, raconte ce dernier.

Puis, deux autres voitures de police sont arrivées – il y avait donc maintenant six policiers sur les lieux. Me Yeboah a fini par retrouver sa preuve d'assurance sur son téléphone, alors il est sorti de sa voiture pour aller la montrer au policier, « avant qu’il me donne un ticket », explique-t-il.

« Je n’ai pas eu le temps de faire un pas, il m’a mis les mains dans le dos, mon cellulaire est tombé par terre. Et il me dit que je suis en état d’arrestation pour avoir fourni un faux permis de conduire! »

À ce moment-là, la fille de Me Yeboah est sortie de la voiture, et son père lui a dit de filmer la scène. Une policière lui aurait dit de ne pas filmer et de retourner dans la voiture, si elle ne voulait pas avoir d’ennuis.

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Comme un criminel

Me Yeboah affirme avoir été menotté et avoir passé 20 minutes sur le siège arrière d’une voiture de police, « comme un criminel », alors qu’il n’avait rien à se reprocher. Il insiste que son permis est bel et bien valide.

L’avocat explique qu’il a encore « l’ancienne version » du permis de conduire. Son permis arrive bientôt à échéance, mais en attendant, il a encore la carte bleue (les nouveaux permis de conduire émis par la SAAQ sont maintenant blancs).

Me Yeboah raconte qu’il a vu les agents fouiller dans son cellulaire.

« Je leur ai dit qu’ils n’avaient pas le droit de faire ça, que ça viole le secret professionnel. J’ai des informations de mes clients là-dedans… Ils sont partis à rire. »

L’avocat de 38 ans, tout récemment admis au Barreau, raconte qu’ils ont ensuite trouvé sa carte de membre du Barreau en fouillant dans son portefeuille.

« Ensuite, ils m’ont enlevé les menottes et ils m’ont donné une contravention pour cellulaire au volant! » détaille-t-il, encore incrédule.

Aucune des interventions des policiers n’a de sens, selon lui.

« La procédure, s’il pensait vraiment que j’avais un faux permis de conduire, ç’aurait été de le saisir et de faire une investigation auprès de la SAAQ. Et ensuite, de m’envoyer une promesse de comparaître… Pas de m’arrêter et de me menotter devant ma fille! »

Me Yeboah se dit « choqué ». Pour lui, il n’y a aucun doute que ce qu’il a vécu est du profilage racial. Selon lui, le policier n’a pas fait les vérifications nécessaires (« c’est impossible, en cinq minutes! »), alors il a décidé de « partir à la pêche » en fouillant ses affaires.

« Si je m’appelais Jean Tremblay, tout ça ne serait jamais arrivé! » s’exclame-t-il.

« Je ne sais même pas quoi dire à ma fille, continue-t-il. Je sais bien que 90% des policiers ne sont pas mauvais… Mais je ne sais pas quoi lui dire! Elle me demande si c’est toujours comme ça quand je sors...»

Me Yeboah affirme qu’il va probablement déposer une plainte en déontologie policière, ainsi qu’à la Commission des droits de la personne. Il fait affaire avec un collègue spécialiste de ces questions, Me Fernando Belton, de Belton Avocats, pour le représenter.

Au moment d’écrire ces lignes, le Service de police de la Ville de Montréal n’avait pas répondu à la demande d’entrevue de Droit-inc.

Mise à jour
Le Service de police de la Ville de Montréal a finalement - en fin de journée - affirmé par courriel qu'il ne pouvait pas commenter « toutes interventions policières diffusées dans les médias sociaux ». Le porte-parole a aussi invité toute personne qui se serait sentie lésée lors d'une intervention policière à porter plainte auprès du SPVM, du Commissaire à la déontologie policière ou de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse.
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