La Presse

Une dame de fer chez les avocats

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Rene Lewandowski

2009-09-18 10:15:00

Après six ans en politique, Monique Jérôme-Forget devient conseillère spéciale dans un grand bureau d’avocats. Et elle n’est même pas avocate!

Monique Jérôme-Forget ne sera pas restée bien longtemps au repos. Cinq mois après avoir pris sa retraite de la politique, l'ancienne ministre des Finances du Québec est de retour dans la vie active. Il y a deux semaines, le cabinet pancanadien Osler Hoskin&Harcourt l'a embauchée à son bureau de Montréal.

«J'avais besoin de prendre un temps d'arrêt, mais j'avais prévu de réapparaître quelque part en septembre», dit la femme de 69 ans, alors qu'elle reçoit La Presse dans une grande salle de conférence du cabinet.

L'ex-dame de fer du gouvernement Charest a l'air en pleine forme. Tout sourire, moins stressée que lorsqu'elle avait à défendre les pertes de la Caisse de dépôt, elle est arrivée pour l'entrevue toute de noir vêtue, parée de bijoux dorés qui vont bien avec son teint basané, gracieuseté de quelques mois au soleil.

Ce répit, elle en avait bien besoin, après six ans au pouvoir à des postes-clés, et surtout après des derniers mois houleux, marqués par des élections, une récession et le dépôt de son dernier budget provincial, le premier déficitaire en plus de dix ans.

En avril, elle s'est donc envolée avec son mari au Mexique, où le couple possède une villa, et s'est inscrite à des cours intensifs d'espagnol. Puis, la paire a pris la direction de l'Europe - Berlin, Florence, Londres, Paris -, un voyage de plaisir certes, mais aussi une escapade, en quelque sorte, pour s'éclipser un moment du Québec.

«Si j'étais revenue tout de suite, les journalistes m'auraient constamment sollicitée pour commenter la situation politique. Et je n'avais vraiment pas envie de jouer le rôle de la belle-mère qui donne son avis par en arrière!» dit celle qui n'a rien perdu de son franc-parler.

Une conseillère particulière

Chez Osler, Monique Jérôme-Forget devient conseillère spéciale, un titre habituellement réservé à des avocats seniors en fin de carrière, qui, pendant quelques années, jouent le rôle de vieux sages auprès des plus jeunes, ou à qui l'on s'adresse ponctuellement pour demander conseil dans certains dossiers précis. Dans ce cas-ci, c'est bien différent, car Mme Jérôme-Forget n'est pas avocate. Que vient-elle faire alors chez Osler?

Shahir Guindi, associé-directeur du bureau de Montréal, explique que la nouvelle recrue fournira des conseils stratégiques aux clients du cabinet, notamment en financement corporatif, en stratégie de négociation, de même qu'en stratégie de croissance nationale et internationale.

Elle conseillera aussi les avocats d'Osler dans des dossiers particuliers et les avisera pour identifier de nouveaux débouchés. On compte sur elle pour apporter un regard différent sur les entreprises. Déjà, elle a tenu des rencontres individuelles avec tous les associés. «Tous sont convaincus que je vais pouvoir les aider!» dit-elle.

Chez Osler, on se félicite de l'avoir persuadée de joindre les rangs. «C'est une personne intègre, d'une grande intelligence et avec beaucoup d'expérience», dit Me Guindi. Car avocate ou non, Monique Jérôme-Forget était une candidate recherchée: plusieurs autres cabinets et quelques entreprises la voulaient dans leur équipe. Certains bureaux, en apprenant son embauche chez Osler, l'ont même contactée par la suite pour lui dire qu'ils lui auraient fait une offre s'ils avaient su qu'elle était disponible.

Si tel avait été le cas, il leur aurait fallu sortir le chéquier, car Osler a l'habitude de le faire pour attirer les meilleurs. En 2001, pour lancer son bureau de Montréal, le cabinet avait fait une razzia chez la concurrence, débauchant à gros prix plusieurs associés de haut calibre. A-t-on offert un pont d'or à l'ex-conseillère au Trésor? «Ils paient bien, sur ce plan c'est une très belle offre», dit l'intéressée.

Pas de lobby!

Chose certaine, si son rôle chez Osler risque d'évoluer au cours des prochains mois, on sait déjà ce qu'elle ne fera pas: du lobbying. Monique Jérôme-Forget a été très claire, en juin dernier, lorsque Brian Levitt, le président d'Osler, l'a approchée. D'abord, ça ne l'intéresse pas, mais elle souligne que l'intégrité a toujours été sa marque de commerce.

«J'ai mis tellement de temps à me bâtir une crédibilité, je ne prendrais pas un dixième de 1% de risque pour tout détruire.» Pour la même raison, elle a d'ailleurs refusé plusieurs offres pour siéger à des conseils d'administration de grandes sociétés québécoises.

Chez Osler, Monique Jérôme-Forget a déjà son bureau, sa ligne téléphonique, son adresse courriel et même une adjointe, qu'elle partage avec le président Brian Levitt. Mais elle ne sera pas au boulot à temps plein, c'était une de ses conditions.

Ce n'est pas qu'elle veuille travailler moins, au contraire, mais elle a d'autres projets en vue, à Montréal, dans le domaine de la recherche, projet qui devrait être annoncé sous peu, mais aussi au Mexique, où elle compte, dès que sa maîtrise de l'espagnol sera à point, amorcer une... recherche sociologique et anthropologique sur la société maya.

Si la politique ne lui manque guère - elle n'a parlé que deux fois à Jean Charest depuis son départ -, Monique Jérôme-Forget suit toujours l'actualité avec intérêt. Elle se dit déçue que l'ère des partenariats public-privé (PPP), son cheval de bataille, semble révolue, avec l'abandon de plusieurs projets sous cette formule et le démantèlement ou presque de l'Agence des PPP. Elle n'en demeure pas moins convaincue que les PPP sont une formule gagnante.

«Je me réjouis à l'idée que juste dans deux projets - les autoroutes 25 et 30 - on a économisé 900 millions de dollars», dit-elle. Elle souligne que si les PPP sont abandonnés, ils auront au moins permis de développer davantage de rigueur au sein de l'appareil gouvernemental.

De toute façon, son expertise en PPP ne sera pas perdue, car Monique Jérôme-Forget a bien l'intention d'en faire profiter son nouvel employeur. Il s'agit d'un créneau porteur pour les cabinets d'avocats et si le Québec en fait plus ou moins, d'autres États ou province bâtissent encore des infrastructures sous ce mode. «L'État de New York, l'Ontario, l'Alberta et la Colombie-Britannique font plein de PPP, dit Monique Jérôme-Forget. Il y a de la place pour Osler et je compte bien aider mon cabinet dans ce secteur.»
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6 commentaires

  1. Anonyme
    Anonyme
    il y a 14 ans
    Je me demande son salaire ?!?
    Ok Ok, tout le monde va me dire que ce n'est pas pertinent.. mais quand même.. je me demande bien combien sa rapporte à l'ancienne ministre ? Probablement aux alentours de 300 000 $ pour du temps partiel...

  2. Me
    Me
    >>> Je me demande son salaire ?!?

    Si tu te demandes son salaire, tu affirmes que tu demandes cela. Donc, c'est un point à la fin et non trypique d'excla/interrogation. Par ailleurs, "Je me demande quel sera son salaire." est un exemple de formulation acceptable.

  3. Anonyme
    Anonyme
    il y a 14 ans
    Re: Me
    Me, si tu veux jouer les profs de français, apprends que l'on écrit "triptyque" et non "trypique". Quand tu ouvriras ton beau dictionnaire tout neuf, profite de l'occasion pour jeter un coup d'oeil à la définition de "cuistre".

  4. Anonyme
    Anonyme
    il y a 14 ans
    Anonyme
    >>> Me, si tu veux jouer les profs de français, apprends que l'on écrit "triptyque" et non "trypique". Quand tu ouvriras ton beau dictionnaire tout neuf, profite de l'occasion pour jeter un coup d'oeil à la définition de "cuistre".

    C'est un classique:
    Lorsqu'on manque du contenu on attaque strictement le français. Les gens modernes n'ouvrent pas de dictionnaire. Ils utilisent Antidote™.

  5. Me
    Me
    Cuistre, lorsque utilisé au Québec, fait fif.

    • Anonyme
      Anonyme
      il y a 14 ans
      Re : Me
      De son côté, fif fait, pour reprendre votre expression, basse classe sociale.

      > Cuistre, lorsque utilisé au Québec, fait fif.

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