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Faut-il être honnête et loyal envers les actionnaires?

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Thomas Bernier-villeneuve Et Janique Gibeau

2022-06-16 11:15:00

Il ne faut pas confondre le devoir d’honnêteté et de loyauté propre au droit civil avec le devoir fiduciaire issu de la common law, rappellent les auteurs.

Thomas Bernier-Villeneuve et Janique Gibeau, les auteurs de cet article. Sources:Site web de TCJ et LinkedIn
Thomas Bernier-Villeneuve et Janique Gibeau, les auteurs de cet article. Sources:Site web de TCJ et LinkedIn
Le devoir de loyauté et d’honnêteté des administrateurs et dirigeants d’une société par actions s’étend-il aux actionnaires de la société ?

Non.

En vertu des articles 322 du Code civil du Québec(ci-après «?C.c.Q.?»), 119(2) de la Loi sur les sociétés par actions et 122(1)a) de la Loi canadienne sur les sociétés par actions, les administrateurs et dirigeants d’une société sont tenus d’agir avec honnêteté et loyauté dans l’intérêt de la personne morale, sans tenir compte des intérêts d’aucune autre personne, groupe ou entité. À titre de mandataires de la personne morale, les administrateurs et dirigeants sont uniquement redevables à la société et non aux actionnaires.

Comme l’explique la Cour d’appel du Québec dans un arrêt récent, il ne faut pas confondre le devoir d’honnêteté et de loyauté propre au droit civil avec le devoir fiduciaire issu de la common law. Alors que la common law impose parfois un « devoir fiduciaire » entre l’administrateur et l’actionnaire, lequel oblige le fiduciaire qui occupe une fonction où il bénéficie de la confiance et de la foi d’une autre personne à agir avec une extrême bonne foi envers le bénéficiaire, le droit civil ne reconnaît pas de devoir de loyauté entre l’administrateur et l’actionnaire en dehors des rapports contractuels auxquels le C.c.Q. attache un tel devoir, comme le mandat, l’administration du bien d’autrui et la prestation de service.

Ainsi, les administrateurs et dirigeants peuvent avoir des obligations envers les actionnaires lorsqu’un contrat existe entre eux. Dans ce cas, les administrateurs et dirigeants seront notamment soumis à l’obligation de bonne foi énoncée à l’article 1375 C.c.Q. ainsi qu’à l’obligation de renseignement qui en découle. Contrairement au devoir de loyauté et d’honnêteté, l’obligation de bonne foi et de renseignement existe tant envers la société qu’envers les actionnaires. Les administrateurs et dirigeants ne peuvent donc pas volontairement omettre d’aviser ou cacher impunément de l’information importante aux actionnaires de la société.

L’obligation de renseigner l’autre partie s’applique lorsque, dans le cadre d’une relation contractuelle avec les actionnaires, les administrateurs ou dirigeants de la société ont la connaissance, réelle ou présumée, d’une information qui est déterminante et dont il est impossible pour les actionnaires d’en prendre connaissance ou que ces derniers accordent une confiance légitime envers les administrateurs ou dirigeants qui justifie de ne pas chercher à s’informer.

Les administrateurs et dirigeants qui ne respectent pas l’obligation de bonne foi et de renseignement peuvent être tenus solidairement à des dommages envers les actionnaires lésés. La Cour suprême du Canada reconnaît d’ailleurs le droit d’action distinct des actionnaires lorsqu’ils subissent un préjudice direct et indépendant de celui subi par la société.

À propos des auteurs

Thomas Bernier-Villeneuve est avocat au sein de l’équipe de droit des affaires, commercial et corporatif à Brossard, chez Therrien Couture Joli-Coeur. Janique Gibeau complète présentement un stage en droit chez TCJ.

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1 commentaire

  1. Anonyme
    Anonyme
    il y a un an
    Auteur
    J'aurais voulu participer à la rédaction de l'article avec ces deux avocats, mais ils ont décliné parce que je n'étais pas roux.

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