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Âgisme: Panique dans les cabinets!
Amélia Salehabadi
2011-04-28 15:00:00
Hier nous vous parlions de la rébellion d'un avocat de Fasken qui refuse de partir en retraite. Un sujet qui suscite bien des émois au sein des grands cabinets montréalais...
Un sujet brûlant chez les Anglo-saxons
Car le sujet est brûlant d'actualité pour de nombreux cabinets anglo-saxons.
En effet, les cabinets de types civilistes européens, comme ceux en Espagne, en Italie ou en France, n'ont pas pour la plupart une politique de retraite obligatoire pour les associés. C'est d'ailleurs plutôt le contraire. Les pontes aux cheveux gris sont la marque de commerce de ces vénérables firmes d'avocats et il n'est pas rare de voir des associés travailler littéralement jusqu'à leur mort !
Mais de toute façon, la structure de base des cabinets civilistes est complètement différente de celle des cabinets à structure anglo-saxonne.
Chez ces derniers, que ce soit au Québec, à Vancouver, à Toronto, à Washington ou à New York, la politique de retraite vers le milieu ou la fin de la soixantaine, est plutôt la norme que l'exception.
Conséquences de la retraite obligatoire
Il est ainsi de notoriété publique que le cabinet Torys de Toronto ait perdu plusieurs associés-clés, ces dernières années, qui frisaient la soixantaine.
Ces derniers ont préféré quitter le navire vers des cieux plus cléments, encore tout fringants, plutôt que de subir l'humiliation d'une retraite imposée à 65 ans.
Ils ont rejoint, pour la plupart, des cabinets qui n'avaient pas une politique obligatoire de retraite.
Ainsi, a contrario, alors que l'espérance de vie n'est plus la même qu'il y a 50 ans et qu'à 65 ans les avocats sont encore, pour la plupart, en pleine possession de leurs moyens, on peut se demander aujourd'hui si l’absence de ce genre de politique ne serait pas, après tout, un atout considérable pour un grand cabinet. Ce dernier tirerait des avantages à recruter les stars de demain de même qu'à attirer les ténors du Barreau ?
C'est en tout cas, l'avis de Me Pierre-André Thémens, l’associé directeur de Davies à Montréal. En effet, Davies, un des cabinets majeurs du pays et membre des fameuses "seven sisters" de Toronto, n'a pas de politique nationale en matière de retraite.
La grogne est là
Suites à nos entretiens sous le sceau de la confidentialité (le sujet est délicat) avec quelques avocats vedettes de grands cabinets approchant la fatidique soixantaine, nous avons observé une certaine grogne pour ne pas dire une très grande inquiétude.
Pour plusieurs d'entre eux, les temps ont changé. Il est grand temps de revoir cette politique que plusieurs considèrent, aujourd'hui, comme totalement dépassée.
Comme les comités exécutifs des grands cabinets, ces ténors suivent le cas de l'avocat de la Colombie-Britannique devant les tribunaux de façon très assidue.
En revanche, aucun associé de Montréal à qui nous avons parlé, ne pense à porter le cas de la retraite obligatoire devant les tribunaux. Pour le moment, les seules solutions envisagées sont les cabinets boutiques ou le départ en solo.
Le droit au Québec
Au Québec, à la différence de la Colombie-Britannique, nous avons une Charte qui interdit expressément la discrimination basée sur l'âge (article 10).
Cet article n'est pas juste limité à l'emploi, mais concerne toutes activités. Donc la question de savoir si un associé est un salarié ou pas, ne devrait pas se poser.
Cependant, cette discrimination peut-être détournée " dans la mesure prévue par la loi ".
La porte reste donc ouverte au débat juridique.
Évidemment, les avis sont partagés. Pour les grands cabinets, cette politique est une décision d'affaires permettant la performance à long terme du cabinet.
Les avocats de 65 ans qui arriveraient à 10 heures pour repartir à 16h tout en jouant au golf tout l'été, restent leur hantise.
Et puis il y la question de la relève...
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