La Presse

La pêche miraculeuse de Richard Dolan

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Rene Lewandowski

2007-10-19 10:59:00

Tout avait commencé comme prévu en juin dernier pour Richard Dolan: assis dans une chaloupe en compagnie de sa fille de 16 ans, au milieu d'un lac de la région de Saint-Zénon, le grand patron du cabinet Lavery, de Billy avait lancé sa ligne à l'eau et s'apprêtait à taquiner la truite, un plaisir qu'il comptait bien s'accorder pendant quelques jours, le temps de décompresser avant de reprendre le boulot.

Jusqu'à ce qu'il voie au loin le gardien de la pourvoirie débarquer en vitesse de son 4X4. "Votre bureau vous réclame de toute urgence!" lui criait l'homme, en lui faisant des signes des mains.

Ce jour-là, Richard Dolan a dû annuler ses vacances. Et est revenu bredouille de sa partie de pêche. Triste moment pour un pêcheur, même en herbe, qui ne se doutait pas que le destin venait pourtant de lui donner l'occasion de réaliser la plus grosse prise de sa vie.

Car le lendemain, Richard Dolan avait rendez-vous avec les dirigeants de Desjardins Ducharme qui, après le départ d'une dizaine d'associés en quelques mois, cherchaient à se regrouper avec un autre cabinet.

On connaît la suite. Après trois mois de négociations, 34 avocats du bureau montréalais de Desjardins Ducharme se sont joints le 1er octobre à Lavery, de Billy, hissant ainsi la firme au premier rang des cabinets québécois indépendants pour le nombre d'avocats, avec 175, et au quatrième derrière les cabinets nationaux Ogilvy Renault, Fasken Martineau et McCarthy Tétrault.

"C'est une décision stratégique", dit l'associé-directeur de 55 ans, pour expliquer cette transaction, alors qu'il reçoit La Presse dans une salle de conférence du siège social de la Place Ville-Marie.

Premier au Québec en droit des affaires

Dans le milieu, c'était un secret de Polichinelle que Richard Dolan caressait le rêve de repositionner le cabinet comme un acteur majeur en droit des affaires. Il y a quelques années, un comité avait même été institué pour concocter des stratégies.

Avec cette transaction, Richard Dolan concrétise son objectif, car Lavery compte aujourd'hui le plus grand nombre d'avocats en droit des affaires au Québec : 80. Mieux, Lavery devient instantanément le cabinet d'importants clients, jadis avec Desjardins Ducharme, particulièrement dans le domaine institutionnel (Banque Nationale, la Caisse de dépôt, la SGF...).

Mais Richard Dolan insiste pour souligner que le cabinet mise aussi sur 95 autres avocats dans les domaines du litige, des recours collectifs, du droit de l'environnement et du travail, de l'arbitrage internationalé... Et selon lui, cette mixité de secteurs devrait permettre d'offrir plus et de meilleurs services à la clientèle.

La clé: l'intégration

Cela dit, Richard Dolan en est bien conscient, le plus gros du travail reste à faire. Car les avocats sont connus pour avoir de gros ego et intégrer tout ce beau monde dans une nouvelle organisation n'est jamais facile.

"Il faut agir rapidement pour que les gens se sentent chez eux le plus tôt possible", dit Christopher Sweeney, président de ZSA, plus importante firme de recrutement et de consultation juridique au Canada.

Depuis qu'il gravite dans l'industrie, Christopher Sweeney a pu observer à la fois l'échec et le succès de plusieurs regroupements de cabinets. La plus grande erreur, dit-il, que font encore trop souvent les dirigeants de cabinets fusionnés, est de se concentrer uniquement sur les aspects affaires et rentabilité de la transaction, sans se soucier de l'intégration sociale des nouveaux arrivants.

Richard Dolan, lui, estime avoir fait ses devoirs. D'abord, ce n'est pas 34 individus qu'il accueille, mais des équipes d'avocats spécialisées, incluant le personnel de soutien, habituées à travailler ensemble depuis de nombreuses années. "Ce qui facilite la transition", dit-il.

De plus, dès le début des pourparlers, un comité d'intégration a été mis sur pied. On a organisé des rencontres d'information et de formation pour les nouveaux venus, rencontres qui se poursuivent toujours; on a investi dans la logistique et dans la mise à jour des systèmes comptable et d'information; on a effectué une vérification diligente des conflits d'intérêts potentiels entre les nouveaux avocats et ceux qui étaient déjà chez Lavery.

Si bien que le 1er octobre, tout était en place pour accueillir le nouveau groupe. Les cartes professionnelles arboraient le nouveau nom de Lavery, de Billy, de même que les en-têtes de lettre et les panneaux de signalisation dans l'immeuble de Desjardins Ducharme (pour l'instant, le cabinet conserve les deux locaux). En fait, même les écrans de veille des ordinateurs ont été remplacés!

Il faut dire que Richard Dolan est un habitué des regroupements d'entreprises. Au début des années 90, alors simple avocat, il a vécu la fusion de Lavery O'Brien avec la cinquantaine d'avocats de Gagnon, de Billy, de Québec. Et lorsqu'il dirigeait le département juridique de SNC-Lavalin, de 1996 à 2000, il a participé à l'intégration d'une vingtaine d'entreprises acquises par le groupe montréalais.

Pas étonnant, donc, qu'il n'exclue pas un autre regroupement pour son cabinet si l'occasion se présentait.

"Mais je vais d'abord prendre des vacances", dit-il.
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