Opinions

IQT dans la légalité ?

Main image

Gabriel Granatstein

2011-08-10 10:15:00

Le 15 juillet dernier, les 1 200 employés d'IQT ont été renvoyés du jour au lendemain, sans aucun préavis et livrés à eux-mêmes. Gabriel Granatstein, avocat chez Norton Rose, s'interroge sur la légalité de la procédure et sur les recours laissés aux salariés.

Tel que reporté par The Gazette, IQT, une entreprise qui assurait le soutien technique et le service à la clientèle pour de nombreuses sociétés nord-américaines et européennes, notamment dans le secteur des technologies de communication par Internet, a fermé ses portes, sans aucun préavis, le 15 juillet dernier. Les employés ont alors été priés de rassembler leurs effets personnels et de quitter les lieux de façon immédiate.

Il semble que les employés mis à pied n’ont pas été avisés du licenciement imminent. Plusieurs d’entre eux prétendent même qu’ils n’ont pas eu droit à leur dernier chèque de paie ou à un relevé d’emploi (requis pour déposer une demande d’assurance emploi).

La question inévitable qui vient à l’esprit de plusieurs : est-ce même légal?

La Loi sur les normes du travail (LNT) prévoit qu’un employeur doit donner un avis écrit (ou, à défaut, verser une indemnité compensatoire) à l’employé lorsqu’il met fin à son contrat d’emploi.

La LNT prévoit un préavis de licenciement d’un minimum de une à huit semaines, le critère variant en fonction de l’ancienneté (évidemment, le fait de ne donner aucun avis comme en l’espèce est incontestablement insuffisant). De plus, le Code civil du Québec (Code) prescrit également un préavis raisonnable ou une indemnité compensatoire, calculé sur une base individuelle, variant en fonction de plusieurs autres facteurs, mais incluant également l’ancienneté. Dans ces circonstances, pour un licenciement collectif de 300 employés ou plus (comme en l’espèce), la Loi exige à l’employeur de donner au moins 16 semaines de préavis au ministère de l’Emploi et de la Solidarité sociale. Les employés mis à
pied peuvent alors déposer une plainte auprès de la Commission des normes du travail, qui se chargera généralement de les représenter sans frais devant les tribunaux afin d’obtenir de l’employeur le respect des minimums requis en matière de normes de travail édictés par la LNT. Quant à l’avis raisonnable prévu au Code, l’employé qui veut contester le respect des normes par son employeur doit se faire représenter, à ses frais, par son propre avocat.

Et qu’arrive-t-il si la compagnie n’a pas les fonds nécessaires? En vertu de la Loi sur les sociétés par actions du Québec, au même titre que plusieurs autres lois similaires au pays quant à la création et la réglementation des sociétés, les administrateurs peuvent être tenus personnellement responsables pour un maximum de six mois de salaires impayés et parfois même pour les paies de vacances impayées. Toutefois, la jurisprudence retient que ceci ne comprend généralement pas les indemnités payables à titre de préavis.

Que signifie tout ceci pour les 1 200 employés mis à pied chez IQT? Seul le temps nous le dira. Pour avoir omis de déclarer la faillite alors que cela était requis par la Loi, les directeurs de IQT semblent avoir privé leurs anciens employés du droit d’obtenir une quelconque compensation ou indemnisation prévue au Programme de protection des salariés. Ce programme, de juridiction fédérale, rembourse aux employés licenciés à la suite d’une déclaration de faillite de leur employeur, en partie, les salaires impayés, les paies de vacances, l’indemnité de départ, et l’indemnité de préavis qui leur sont dus.

Les protestations du public contre les administrateurs de IQT sont considérables, c’est le moins que l’on puisse dire. Plusieurs politiciens et organisations syndicales ont apporté leur soutien aux employés ici mis à pied. Le gouvernement du Québec est également impliqué, conseillant les 471 travailleurs licenciés de Laval à déposer une plainte auprès de la Commission des normes du travail et organisant des réunions entre ces derniers et Emploi Québec. Enfin, toutefois, si ni la compagnie ni ses administrateurs ne sont en mesure de verser les sommes dues aux employés licenciés, il semble que ces derniers seront malheureusement laissés à eux-mêmes.
8573

Publier un nouveau commentaire

Annuler
Remarque

Votre commentaire doit être approuvé par un modérateur avant d’être affiché.

NETiquette sur les commentaires

Les commentaires sont les bienvenus sur le site. Ils sont validés par la Rédaction avant d’être publiés et exclus s’ils présentent un caractère injurieux, raciste ou diffamatoire. Si malgré cette politique de modération, un commentaire publié sur le site vous dérange, prenez immédiatement contact par courriel (info@droit-inc.com) avec la Rédaction. Si votre demande apparait légitime, le commentaire sera retiré sur le champ. Vous pouvez également utiliser l’espace dédié aux commentaires pour publier, dans les mêmes conditions de validation, un droit de réponse.

Bien à vous,

La Rédaction de Droit-inc.com

PLUS

Articles similaires