La Presse

P P Payant pour Stikeman Elliott

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Rene Lewandowski

2007-11-16 06:30:00

Champagne! C'est en portant un toast que l'associé Erik Richer La Flèche et son équipe d'avocats de Stikeman Elliott ont célébré la victoire du consortium Concession A25, S.E.C., leur client qui venait de remporter en septembre l'appel d'offres pour l'achèvement de l'autoroute 25.

Il y avait de quoi fêter, puisqu'il s'agissait du premier partenariat public-privé (PPP) conclu au Québec pour un projet d'infrastructure routière.

Pour Stikeman Elliott, c'était aussi l'aboutissement de neuf mois de dur labeur à préparer et fignoler les documents pour le dépôt de l'offre. Les avocats de ce grand cabinet ont ainsi révisé et commenté plus de 1500 pages!

"Un travail colossal", dit, ravi, Erik Richer La Flèche, qui dirigeait une équipe d'une quinzaine d'avocats de Stikeman.

Il n'est pas le seul à être de bonne humeur. Depuis que le gouvernement du Québec a annoncé vouloir tâter le mode PPP pour la rénovation et la construction d'infrastructures, tous les grands cabinets d'avocats sont aux aguets et tentent de se positionner.

Un enthousiasme renforcé par le récent dépôt du projet de loi 32, qui prévoit des investissements de 30 milliards de dollars, sur cinq ans, pour la construction et l'entretien des infrastructures, qu'il s'agisse de ponts, de viaducs, d'écoles ou d'hôpitaux.

"Pour notre bureau, les PPP sont une priorité", dit Vitale Santoro, associé chez Osler, Hoskin & Harcourt, à Montréal. Ce cabinet pancanadien a agi comme conseiller juridique auprès d'un des soumissionnaires dans le projet de la A25.

Des avocats spécialistes en PPP
Pour les avocats, les PPP représentent à la fois un défi juridique et logistique. Juridique, parce que ces projets requièrent la maîtrise de plusieurs domaines de droit. Logistique, parce qu'ils nécessitent la mise en place et la coordination d'équipes multidisciplinaires. Chez Stikeman, pour l'A25, on a ainsi fait appel à des avocats en droit de la construction, en financement de projets, en fiscalité, en environnement, en litige...

Dans certains cabinets, on a créé des équipes spécialement dédiées aux PPP. Chez Blakes, par exemple, on compte une vingtaine d'avocats au pays, dont cinq au bureau de Montréal qui s'y consacrent à temps plein.

McCarthy Tétrault, une dizaine ne fait que des PPP. "Sans compter les 20 ou 30 autres qui viennent nous soutenir au besoin pour un dossier particulier", précise le cochef national du groupe Infrastructures et Énergie, Marc Dorion.

Chez Ogilvy Renault, on estime que l'expertise du cabinet en financement de projets et d'infrastructures est suffisamment reconnue. "Pas besoin de créer une équipe PPP juste à des fins de marketing", dit l'associé Robert Borduas. Même chose chez Fasken Martineau, où l'on parle plutôt d'une équipe informelle.

Cette expertise "pépépienne", les grands cabinets l'ont acquise ailleurs au Canada, en travaillant sur des PPP en Colombie-Britannique, au Nouveau-Brunswick, et en Ontario. Certains avocats, comme l'associé Alain Massicotte, de Blakes, ont même travaillé sur des PPP internationaux en Afrique, en Europe et en Asie.

Amélia Salehabadi, présidente du cabinet qui porte son nom, estime néanmoins que la plupart des avocats du Québec n'ont pas ce qu'il faut pour se prétendre experts. En 20 ans de carrière, cette avocate a eu l'occasion de participer à plusieurs PPP internationaux, notamment pour le compte de Bombardier et de Bell Canada International. Ce qu'elle reproche aux avocats du Québec? Ils passent trop de temps sur les détails, "ce qui fait grimper les coûts", dit celle qui publiera Causons PPP en 2008.

Des dossiers payants
Évidemment, si les cabinets raffolent tant des PPP c'est parce qu'ils sont lucratifs. Des dossiers lourds et complexes qui génèrent des milliers d'heures facturables. Stikeman Elliott a ainsi facturé environ 5000 heures pour le PPP de l'autoroute 25.

De plus, parce qu'il s'agit de contrats à long terme (entre 25 et 35 ans, généralement), les PPP deviennent pour les cabinets une source de revenus réguliers et quasi récurrents pour de longues années. Car une fois le contrat signé, "il y a toujours de l'activité juridique qui revient chaque année", explique Marc Dorion.

Contrepartie logique, il vaut mieux être le cabinet du consortium gagnant, précise Robert Borduas, d'Ogilvy Renault, car le gros du travail juridique s'effectue après l'appel d'offres.

Dans le dossier de l'autoroute 25, il y avait ainsi sept cabinets en lice: trois qui représentaient chacun des soumissionnaires, trois autres pour les consortiums financiers, et un qui représentait l'Agence des partenariats public-privé du Québec. Seuls Stikeman (pour le consortium gagnant), Blakes (pour le financier) et Fasken Martineau (pour l'Agence des PPP du Québec) poursuivront l'aventure.

Chose certaine, si l'on se fie à l'expérience du Royaume-Uni, fer de lance des PFI (Private Financing initiative), la variante locale des PPP depuis 1992, les cabinets d'avocats seront en première ligne. Là-bas, le secteur est tellement rentable que certaines firmes ont même recentré leurs activités uniquement sur les PPP! Mais les places au soleil sont chères. Seuls cinq ou six grands cabinets se partagent le gros des revenus.

Sauf que l'on est au Québec, dit Erik Richer La Flèche, qui estime ne pas savoir si le créneau deviendra intéressant à long terme. "Il y a quelques projets dans le pipeline, c'est vrai, mais après? On ne le sait pas, dit-il. Ça dépendra des décisions politiques."
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