La face cachée de la Loi spéciale 78
L'équipe Droit-inc
2012-05-28 10:15:00
Sept avocats d'un même cabinet ont décidé d'intervenir pour dénoncer, dans une lettre, une disposition de la loi, qui est selon eux passée quelque peu inaperçue.
Cet article permet à une personne qui désire intenter un recours collectif contre un professeur qui refuserait de donner ses cours ou contre quiconque qui entraverait l’accès à des cours, de franchir l’étape de l’autorisation du recours collectif en n’ayant qu’à démontrer que « la personne à laquelle il entend attribuer le statut de représentant est en mesure d’assurer une représentation adéquate des membres du groupe ». On élimine ainsi les trois autres critères d’autorisation d’un recours collectif, qui sont pourtant plus exigeants à rencontrer, dont l’existence de questions communes à l’ensemble des membres du groupe et l’apparence sérieuse de droit.
C’est donc dire que l’article 25 de la Loi abolit à toutes fins pratiques l’étape de l’autorisation d’un recours collectif qu’une personne pourrait vouloir entreprendre contre un professeur, un syndicat de professeurs, un étudiant, une association étudiante ou toute personne qui contribue directement ou indirectement à ralentir ou retarder la reprise ou le maintien des cours dans les institutions d’enseignement post-secondaires. Il enlève cette étape de « filtrage » qui, pour les plus hauts tribunaux du pays, permet d’écarter les recours « frivoles et manifestement mal fondés », donc les recours qui sont abusifs.
Ainsi, en application de la Loi 78, il sera dorénavant plus facile d’obtenir une autorisation d’intenter un recours collectif contre un professeur, un syndicat de professeurs, un étudiant ou une association étudiante que contre un industriel qui transgresse les lois protégeant l’environnement, une institution financière qui charge des frais illégaux ou les responsables d’une importante fraude financière.
En fait, cet article crée deux classes de citoyens : ceux que l’on peut poursuivre facilement en recours collectif et les autres. Il s’agit ici d’une atteinte au principe constitutionnel de l’égalité des citoyens devant la loi qui n’est pas justifiable dans les circonstances.
Aussi, l’article 25 ouvre la porte à l’utilisation de la procédure civile comme un moyen d’intimidation ce qui est, à notre avis, inacceptable et condamnable.
On reproche à la législation actuelle et aux tribunaux d’être trop permissifs quant à l’autorisation des recours collectifs. Avec cette nouvelle disposition, on propose pourtant de faciliter, voire de garantir l’autorisation de recours collectifs. C’est ce type d’interventions législatives, à la pièce, pour favoriser une catégorie de citoyens par rapport à une autre, qui dévalorise non seulement la règle de droit, mais aussi l’un des moyens les plus fondamentaux dont disposent les citoyens pour protéger leurs droits.
Les signataires de la lettre sont issus du cabinet Sylvestre Fafard Painchaud spécialisé dans les demandes de recours collectifs :
Me Pierre Sylvestre, Ad. E.
Me Normand Painchaud
Me Catherine Sylvestre
Me Marie-Anaïs Sauvé
Me Benoît Marion
Me Gilles G. Krief
Me Alexandre Desjardins
1 commentaire
Anonyme
il y a 11 ansEst-ce un coup de pub ou une opinion désintéressée ?