La Presse

Une année faste pour les avocats québécois

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Rene Lewandowski

2008-01-03 08:55:00

Fusions et acquisitions, recours collectifs, disparition d'un grand cabinet, l'année qui s'achève passera à l'histoire comme l'une des plus mouvementées de l'industrie des services juridiques. Tour d'horizon des grands thèmes qui ont marqué les 12 derniers mois.

D'habitude, la grande majorité des mandats juridiques en fusions et acquisitions passe par Toronto. Mais cette année, on peut dire que les avocats de Montréal ont damé le pion à leurs collègues de la Ville reine.

"L'année la plus faste de notre histoire en termes d'honoraires", admet le président du conseil de Stikeman Elliott, Pierre Raymond.

Il faut dire que les juristes ont été choyés. Car les plus importantes transactions de 2007 ont impliqué des entreprises québécoises. La privatisation de BCE, l'acquisition d'Alcan par Rio
Tinto, la vente de Van Houtte à un fonds privé américain, la fusion d'Abitibi-Consolidated avec Bowater, la fusion des Bourses de Montréal et de Toronto

"C'est du jamais vu!" dit le coprésident d'Ogilvy Renault, Norman Steinberg, qui concède lui aussi que son cabinet a connu la meilleure année de son histoire.

Fait étonnant, malgré la crise du crédit survenue en août, l'activité en fusions et acquisitions n'a pas diminué, ou si peu. Vrai, souligne Pierre Raymond, les transactions sont moins grosses, mais le nombre de mandats qui aboutissent sur les bureaux des grands cabinets reste élevé. Explication? Les acheteurs ont changé, soutient Norman Steinberg. Alors que les fonds de capital privé ont dominé les emplettes des six premiers mois, les acheteurs plus stratégiques ont pris le relais à la suite de l'essoufflement du marché du crédit.

Cette crise du papier commercial adossé à des actifs a d'ailleurs passablement occupé les cabinets montréalais. Tous ou presque ont reçu des mandats, à la fois des émetteurs et des investisseurs. C'est la beauté de la profession d'avocat: quand l'économie va bien, ils en profitent. Et lorsqu'elle ralentit, ils en profitent aussi!

L'année des PPP
Tous les grands cabinets s'y préparaient depuis quelques années. C'est arrivé en 2007, avec l'octroi, en septembre, d'un premier partenariat public-privé pour le parachèvement de l'autoroute 25. Sept cabinets y ont participé de près ou de loin. Et la plupart des grands bureaux sont impliqués dans les dossiers en cours, qu'il s'agisse de la construction des hôpitaux universitaires, du parachèvement de l'autoroute 30 ou de la nouvelle salle de l'OSM. "On s'attend à beaucoup de boulot!" dit l'associé directeur du bureau montréalais de BLG, John Murphy.

La fin de Desjardins Ducharme
Les rumeurs couraient depuis quelques années, mais c'est en juin 2007 que la bombe a explosé: Desjardins Ducharme, cabinet mythique du Québec Inc., créé en 1949, annonce publiquement vouloir se restructurer ou se trouver un cabinet partenaire. Cette décision est prise à la suite de nombreux départs d'associés chez la concurrence. En septembre, 34 avocats du bureau de Montréal passent ainsi chez Lavery, de Billy, qui compte désormais 175 professionnels. Ceux du bureau de Québec, en revanche, décident de faire cavalier seul en ressuscitant Stein Monast, qui avait fusionné avec Desjardins Ducharme au début des années 90. À Toronto, au printemps, Goodman & Carr, un autre cabinet de taille moyenne fondé en 1965, a lui aussi disparu pour les mêmes raisons. Quel sera le prochain?

Épidémie de recours collectifs
Vidéotron, Visa Desjardins, Future Shop, les grandes banques canadiennes le nombre de recours collectifs contre les grandes entreprises est en hausse. Normal, le Québec est le paradis des recours collectifs. Pour les avocats, c'est une bonne nouvelle, autant pour les petits cabinets spécialistes qui entament les recours, que pour les plus gros qui défendent les entreprises poursuivies. Et l'enjeu pour les sociétés n'est pas que juridique, soutient Julie-Martine Loranger, associée chez Gowlings, à Montréal. Cette avocate explique qu'un recours collectif peut affecter non seulement les finances, mais également l'image d'une entreprise. "D'où l'importance pour l'avocat de bien comprendre les dimensions d'affaires avant de concocter une stratégie de défense", dit-elle.

Bye-bye boss!
Si vous lisez régulièrement cette chronique, vous l'avez sans doute remarqué: pas une semaine ne passe sans que l'on annonce le départ d'untel pour un autre cabinet. Cela fait plusieurs années que ça dure, mais 2007 aura été l'une des plus mouvementées à ce chapitre. Dans cette chasse au talent, les cabinets ne se font pas de cadeaux. Deux faits marquants cette année. En premier lieu, le départ vers BCF, en deux vagues, d'une dizaine d'avocats de Desjardins Ducharme, ce qui a causé la perte de ce cabinet. Et puis, en septembre, coup de théâtre, avec la démission surprise de l'associé-directeur de Fraser Milner Casgrain, Vitale Santoro, parti chez Osler. Autre tendance lourde: la désertion de plusieurs avocats en cabinet pour les contentieux d'entreprises.

La gestion des conflits
Avec la consolidation de l'industrie, les grands cabinets ont depuis longtemps appris à gérer les conflits d'intérêts. Mais cette année, le formidable niveau d'activité en fusions et acquisitions a donné des maux de tête aux gestionnaires. "On refuse des mandats d'importance tous les jours", dit Pierre Raymond. Il y a conflit d'intérêts lorsqu'un avocat ne peut représenter un client parce qu'un de ses collègues s'occupe déjà d'un autre client concurrent. Pierre Raymond admet que cette situation cause des tensions entre associés, chacun défendant le fait que son client est plus important que celui de son collègue. Pour régler la question, en fusions et acquisitions, les grands cabinets se transmettent mutuellement des mandats; en litige, ils transmettent bien souvent les dossiers aux cabinets boutiques.
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