Portrait

Le dur combat d’une avocate crie

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Karine Limoges

2016-03-21 15:00:00

Toute jeune, elle était déjà sensible aux injustices subies par les autochtones. Aujourd’hui seule avocate crie au Québec, elle défend avec ardeur ces opprimés…

Me Marie-Ève Bordeleau est la seule avocate crie au Québec
Me Marie-Ève Bordeleau est la seule avocate crie au Québec
Faciliter l’accès à la justice pour les femmes autochtones. Voilà à quoi aspire Me Marie-Ève Bordeleau. C’est ce qui l’a poussée à fonder, il y a quelques mois, la Clinique de médiation mobile pour les communautés autochtones avec sa collègue mohawk, Martha Montour.

Il faut dire que la Barreau 2007 originaire de Senneterre, née d’un père membre de la nation crie de Waswanipi et d’une mère québécoise, a toujours cru dans les vertus de la justice alternative, une pratique traditionnellement autochtone.

Avec cette Clinique, son objectif est d’offrir des services de médiation familiale et en droit du travail pour répondre à des conflits au sein d’organisations autochtones ou entre conseils de bande. « La médiation nous permet d’intervenir avant le litige », dit l’avocate qui a choisi la réserve de Kahnawake pour y installer son bureau.

Ces jours-ci, Me Bordeleau parcourt les régions dans le cadre d’une consultation nationale auprès des maisons d’hébergement pour femmes autochtones vivant de la violence familiale. « Je rencontre les directrices et intervenantes de ces centres pour connaître la réalité des femmes victimes de violence sur le terrain en vue de développer un outil légal d’ici 2017 pour les défendre. » Sa prochaine destination : le Yukon.

Le feu sacré

Depuis la fin de l’adolescence, à l’époque du cégep, Me Marie-Ève Bordeleau avait la ferme conviction d’être destinée à travailler pour la défense des droits des Autochtones. Elle a vu ses parents s’impliquer pour l’avancement de leur communauté autochtone. « J’ai été élevée dans un milieu multiculturel, j’ai été témoin de la discrimination et des injustices face aux autochtones – cette cause m’a toujours interpellée », confie-t-elle à Droit-inc.

Après son baccalauréat en droit, coup du destin : elle est sélectionnée par The Pacific Center for Public Integrity, un organisme non gouvernemental (ONG) pour travailler avec les communautés autochtones … aux îles Fidji. Elle y rencontre la directrice, une femme très forte qui dédiait sa vie, sa carrière, aux communautés autochtones.

« Ça a été le point tournant pour que je devienne avocate », estime celle a ensuite pratiqué le droit au sein du cabinet Morin et Murdoch Avocats de 2006 à 2011. C’est notamment dans ce cabinet qu’elle a piloté des dossiers en matière de droit autochtone; des dossiers qui l’ont amenée à voyager partout dans les réserves du nord de la Baie James.

«Je vais leur dédier ma carrière»

La discrimination à laquelle font face les femmes autochtones répugne la juriste qui confie avoir été bouleversée par un reportage sur les allégations d’abus sexuels commis à Val-d’Or par des policiers de la Sûreté du Québec à l’endroit de femmes autochtones. « Et je crois que ça se passe dans d’autres villes au Canada », ajoute-t-elle.

Sous le nouveau règne libéral du gouvernement Trudeau, Me Bordeleau croit que le Canada fait un pas dans la bonne direction en optant pour la réconciliation avec ses peuples autochtones. Bien qu’elle se réjouisse que le pays se tourne vers une commission d’enquête sur les femmes autochtones disparues ou assassinées, elle reste prudente. « Je veux bien croire que le gouvernement est bien intentionné, mais il a encore ses preuves à faire ».

Selon la médiatrice, les premières nations ont besoin de plus de ressources, d’une parité de financement de la part des institutions et organisations dans les communautés, et d’une plus grande part de subventions. « Et surtout la reconnaissance que tous les problèmes proviennent d’un impact de la colonisation », ajoute-t-elle.

« Presque toutes les nations ont leurs pratiques, leurs coutumes, leurs politiques internes – et même au niveau juridique, la pratique varie en fonction des traités autochtones », dit celle qui se plaît à sillonner le Québec pour faire une différence chaque jour sur le terrain. « Il n’est pas question pour moi de faire autre chose. Je vais leur dédier ma carrière ».
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