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Image de marque : comment devrait réagir Trivium?

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Gabriel Poirier

2020-08-12 15:00:00

L’associé fondateur de Trivium est dans la tourmente depuis vendredi dernier. Comment le cabinet devrait-il réagir? Droit-inc a parlé à des experts en image de marque...

François Vaqué. Photo : Site Web de la firme Citoyen
François Vaqué. Photo : Site Web de la firme Citoyen
Me Marc-Antoine Cloutier, président fondateur de la Clinique Juripop, a démissionné vendredi dernier, à la suite d’allégations d’une inconduite sexuelle.

Comment Trivium doit-il réagir face à ces allégations? Comment le cabinet doit-il s’y prendre pour protéger sa marque et sa réputation?

Droit-inc s’est entretenu avec François Vaqué et Daniel Lépine, spécialistes dans le domaine du marketing et dans le domaine de la communication et des relations publiques.

Rappelons que Trivium a été co-fondé par Me Cloutier en 2018. Le Barreau 2014 y occupe le poste de président.

Le cabinet a bénéficié d’une importante couverture médiatique lors de sa fondation. Me Cloutier vantait alors l’approche de son cabinet, premier au Québec, selon lui, à offrir un système de financement Desjardins.

« Dans le domaine du droit, le Québec est toujours un peu en retard sur d’autres endroits dans le monde. C’était à nous de faire preuve d’innovation et d’amener l’idée ici », nous avait-il confié.

L’avis d’experts

Au bout du fil, François Vaqué tempère les atteintes potentielles à la réputation de Trivium… à condition que le cabinet pose les bons gestes.

Dans des cas comme celui-ci, il y a toujours un impact à court terme sur la réputation des cabinets, précise-t-il. « Rapidement, la réputation des cabinets, s’ils font les bonnes choses, peut se remettre de ce genre de situation. »

Mais que signifie les « bonnes choses »? Et que faire quand les allégations concernent un avocat, qui, comme Me Cloutier, occupe un poste de direction?
« En terme général, c’est sûr que cela est plus compliqué (...) dans le cas de Juripop, s’il n’avait pas été président du CA, cela aurait pu être plus simple ; un autre président lui aurait demandé de remettre sa démission (NDLR plus tôt). »

Pour revenir aux « bonnes choses », elles impliquent notamment, selon le vice-président de la firme ''Citoyen'', de se distancer des gestes allégués.

Daniel Lépine. Photo : LinkedIn
Daniel Lépine. Photo : LinkedIn
« Il devrait se retirer de la présidence de ce cabinet-là, ne serait-ce que temporairement pour montrer qu’ils font les bonnes choses. Même si les gestes sont allégués, il est important de le faire très rapidement », précise M. Vaqué.

« C’est plus compliqué quand il est président, mais, justement, cela marquerait qu’ils sont prêts à faire des gestes importants. »

« Par exemple, pour Juripop, il aurait dû remettre sa démission le jour où il y a eu des allégations. Cela aurait réglé beaucoup de problèmes », illustre-t-il.

De l’importance d’un plan

De son côté, Daniel Lépine, président de Lépine Marketing, est clair.

La deuxième meilleure réponse à une crise est d'avoir un plan solide en place », indique-t-il. La première consiste à… « éviter » les crises. C’est tout dire.

Un cabinet comme Trivium, selon lui, devrait retenir les services d’un professionnel pour « éviter le pire » en matière de réputation, sans compter l’enjeu des répercussions financières.

« Introduire une personne neutre avec aucun attachement émotionnel à l’égard de l’entreprise, la ou les victimes et encore le ou la coupable permettra de bien aligner les messages. »

Marc-Antoine Cloutier n’a pas l’intention de quitter le cabinet qu’il a cofondé.
Marc-Antoine Cloutier n’a pas l’intention de quitter le cabinet qu’il a cofondé.
Le recours à un professionnel aiderait le cabinet à « déterminer la meilleure réponse » et à préparer les « messages clés », c’est-à-dire ceux qui seront communiqués à la presse.

Sur ce point, François Vaqué est plus nuancé. Il estime qu’un cabinet comme Trivium devrait éviter de réagir publiquement.

« Ce sont des choses qui sont alléguées ; cela peut aller devant les tribunaux… il faut qu’il marche sur une ligne qui est assez complexe », d’autant qu’il est difficile de « sortir gagnant » de tels exercices de communications.

Il faut s'adresser aux médias « uniquement s’il est important de le faire », reconnaît M. Lépine.

La communication client

Les deux professionnels sont unanimes, au moins, sur un point : la communication client. Dans un cas comme celui de Me Cloutier, elle doit être au centre de la réponse du cabinet Trivium.

Selon Daniel Lépine, le plan du cabinet devrait aussi comprendre « un volet communications interne ».

« On ne communique jamais assez dans ce genre de situation là, explique pour sa part M. Vaqué. Il faut qu’il y ait une communication client, en général personnalisée. »

Selon lui, dans ce genre de situation, tous les avocats d’un cabinet devraient contacter leurs clients afin « d’expliquer la situation ». Il faut aussi expliquer les gestes posés par le cabinet « pour régler cette situation. »

Après avoir rassuré les clients, « le cabinet doit montrer qu’il fait toutes les choses nécessaires pour s’assurer qu’il s’agit d’un cas isolé – si c’est le cas – et qu’il fait tout pour régler le problème. Il faut rassurer le client et mettre une distance entre cet avocat-là et le reste des clients. »

Outre la communication client, enfin, François Vaqué insiste sur l’importance des gestes à poser auprès des employés eux-mêmes

« C’est la première chose à faire. » En plus de répondre à leurs questions et inquiétudes, un cabinet comme Trivium devrait poser des gestes pour démontrer que « ce genre de situation n’est pas toléré. »

« Il faut que le cabinet montre, immédiatement, qu’ils font ce qu’il faut pour que ce genre de situation ne soit pas acceptable dans le cabinet. Il faut rassurer les employés sur la continuité du cabinet. Sinon, ce qu’il arriverait, c’est un exode des employés », conclut-il.


6 conseils de gestion des crises par Daniel Lépine


  • Adressez-vous aux médias uniquement s’il est important de le faire et conformez-vous au plan et messages clés;


  • Soyez aussi transparent que possible si les médias reprennent les allégations ou des recours juridiques sont entrepris;


  • Articulez les mesures que votre entreprise prendra pour résoudre le problème et éviter qu'il ne se reproduise à l'avenir;


  • Si vous n'avez pas de politique de harcèlement sexuel à l'échelle de l'entreprise, créez-en une;


  • Rédigez soigneusement toutes les correspondances faisant référence aux allégations puisque chaque mot compte;


  • Ne négligez pas la crédibilité de l’accusateur.


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3 commentaires

  1. Alphonse
    Alphonse
    il y a 3 ans
    La meilleure défense c'est l'attaque
    Lol, ayoye ce sont dont bien des mauvais conseils.

    Donald Trump s'est rendu où il est aujourd'hui car il a compris que la meilleure défense c'est l'attaque et la réplique. Ah oui, il est tellement impopulaire qu'il risque bien de gagner encore une élection surprise avec 130M de votants.

    Continuez à vous aplavantrire et la meute va continuez à vous passez dessus et en plus, ceux qui ont une colonne vont vous trouver poltron aussi.

    6 jours plus tard et Me Cloutier garde pour lui le nom de la personne qui l'a traîné dans la boue et qui lui a planté 3 couteux dans le dos. Continue comme ça et tu vas voir ce genre d'articles continuer à te dévorer tout rond. Quel genre d'avocat se laisse donner autant de taloches sans répliquer?

    Malheuresement, comme la dame de La Presse l'a dit, en jouant les justiciers de service et en créant une méga mangeoire pour les féministes radicales, il s'est mis dans une situation...impossible. Il n'a pas vu que ses alliées aiguisaient des couteaux dans son dos. Il a été naïf.

    • Anonyme
      Anonyme
      il y a 3 ans
      Exception
      Utiliser l'exception pour justifier son comportement.

      Pour tous les Donald Trump qui réussissent avec ce genre d'attaques (en fait il est possiblement le seul), il y a des dizaines de milliers de wannabe qui se plantent solidement, sauf évidemment à l'intérieur de leurs petits cercles de colons.

      Si t'as une fille (amie, soeur, cousine alouette), j'espère que tu comprends que ce n'est pas être une féministe radicale que de penser qu'elle devrait avoir le droit de vivre sa vie sans se faire traiter comme si elle était dans l'obligation de servir d'exutoire sexuel pour tous les petits frustrés qui n'ont pas la capacité de donner envie à une femme de coucher avec.

      Juste de même, as-tu penser que peut-être l'hésitation du mec à attaquer est liée au fait qu'il ait effectivement quelque chose à se reprocher?

  2. Anonyme
    Anonyme
    il y a 3 ans
    Ce ne sont pas les victimes qui bafouent la présomption d'innocence, c'est nous
    Avec respect, je ne partage pas du tout l'opinion de M. Vaqué.

    La tâche de protéger la primauté du droit et la présomption d'innocence est une responsabilité collective. Voyant la réaction parfois disproportionnée d'acteurs privés, certains voudraient que les victimes se taisent par déférence pour la présomption d'innocence. C'est se tromper de cible. Il a toujours été normal qu'une personne ayant vécu une situation difficile s'exprime, de manière privée, semi-privée ou carrément publique. Avec l'émergence des réseaux sociaux, les victimes ont un nouvel outil pour s'exprimer. Et - surprise, surprise! - elles l'utilisent. On peut souhaiter qu'une meilleure éthique de la dénonciation se développe, mais demander aux gens de se taire est en soi illusoire.

    Quoi faire alors et pourquoi insister sur ce point? Parce que ces experts en relations publiques devraient prendre notre qu'une part très importante de la population a vivement exprimé son attachement aux valeurs du libéralisme politique, du progrès des Lumières, qui nous protègent contre l'arbitraire et garantissent le droit à la dignité auquel tout être humain peut aspirer. Les radicaux font beaucoup de bruit, mais leurs positions sont de moins en moins humanistes. Je serai curieux de voir les résultats de sondages d'opinion rigoureux sur ces questions.

    Je m'attends donc à ce que Trivium ait le courage de démontrer son attachement aux valeurs qui sont au cœur de notre démocratie libérale et de notre système de droit. C'est bien le minimum syndical pour un cabinet d'avocats! Si les avocats ne défendent pas ces valeurs, qui le fera?

    Où est le Barreau, d'ailleurs?

    Cela ne signifie aucunement que l'entreprise est insensible à la problématique de la culture du viol ou des violences sexuelles. Elle peut poser d'autres gestes pour faire état de son engagement que de demander à Me Cloutier de quitter alors qu'il nie ces allégations.

    Je pense que leurs clients vont comprendre.

    Si certains éléments plus radicalisés du mouvement pensent qu'une personne dans la situation de Me Cloutier devrait perdre l'oeuvre d'une vie sans compensation sur la base d'une allégation et être "cancellée" à vie par le biais des procédures non contradictoires et ex parte, eh bien qu'ils se fassent élire et on en débattra en commission parlementaire.

    Pour ma part, je n'apprécie pas ces tentatives de réécrire la Charte des droits et libertés, le Code criminel, la Loi sur normes du travail et le droit corporatif au nom d'une vision de la "respectabilité publique" qui ne s'attarde qu'à une facette importante mais pas unique du problème.

    À vouloir trop épouser une cause, on en oublie une autre. Le post-mortem à venir dans les prochaines années pourrait en surprendre plus d'un.

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