Nouvelles

Des millions destinés aux survivants des pensionnats dépensés en frais d’avocats

Main image

Radio -canada

2021-08-03 12:00:00

L’Église catholique romaine aurait dépensé des millions de dollars en frais d’avocats et des frais d’administration. Comment se fait-il ?

Mary Ellen Turpel-Lafond. Source  : Radio-Canada/MIKE MCARTHUR/CBC
Mary Ellen Turpel-Lafond. Source : Radio-Canada/MIKE MCARTHUR/CBC
Selon des documents obtenus par CBC, l’Église catholique romaine aurait dépensé des millions de dollars destinés aux survivants des pensionnats pour Autochtones. Ces sommes auraient servi à payer notamment des frais d’avocats et des frais d’administration.

Ces documents contiennent une foule d’autres révélations qui semblent contredire les affirmations publiques de l’Église catholique au sujet de l’argent versé aux survivants des pensionnats.

Un mémoire de 53 pages du gouvernement fédéral résume la preuve d'une affaire juridique de 2015, qui concerne le gouvernement fédéral et l'Église catholique. Ce document fait état d’un grand nombre d’écarts comptables.

Où est allé l’argent?

Dans son premier paragraphe, le mémoire stipule que l’Église catholique « a manqué à ses obligations en vertu de la Convention de règlement relative aux pensionnats pour Autochtones ».

En plus de devoir mener une campagne de financement de 25 millions de dollars, qui a échoué, l’Église devait verser 29 millions de dollars en argent comptant, selon des critères précis. L’Église était aussi autorisée à remplir son engagement de 25 millions de dollars en offrant des services en nature.

Le mémoire, rédigé par les avocats fédéraux Alexander Gay et Anne McConville, énumère les dépenses et les déductions déclarées par l’Église. Plusieurs d'entre elles figurent aussi dans la transcription du contre-interrogatoire du comptable de l'Église, également obtenue par CBC.

Pour le paiement comptant des 29 millions de dollars :
  • 2,7 M$ ont été versés à des avocats pour du travail juridique.

  • 2,3 M$ ont été dépensés en frais d’administration. L’accord permettait au gouvernement fédéral de rembourser les réclamations jugées « raisonnables ». Le gouvernement a accepté de payer 1 million de dollars de ce montant.

  • L’Église a déduit plus de 8 M$ pour des montants versés aux survivants avant la mise en place de la Convention de règlement.


  • Pour les services en nature de 25 millions de dollars :

    Le comptable de l’Église catholique a déclaré que des services d’une valeur de 25 millions de dollars ont été donnés, « même s’il n’a pas vérifié ces registres et ces comptes, qu’il n’a aucune base sur laquelle fonder la valeur de ces services et qu’il se fie uniquement aux procès-verbaux de réunions » fournis par des représentants catholiques.

    Ces services en nature sont encore une source de confusion auprès de certains membres des Premières Nations.

    Pour la campagne de financement de 25 millions de dollars, qui a rapporté 3,9 millions de dollars :
  • 1,8 M$ ont été prêtés à partir du compte en espèces de 29 millions de dollars à la fondation de l’Église catholique et à la société privée engagée. De cette somme, environ 1,3 M$ n’ont jamais été remboursés.


Des révélations coups-de-poing

L’ancienne juge de la Cour provinciale de la Saskatchewan et directrice du Centre d’histoire et de dialogue des pensionnats pour Autochtones de l’Université de la Colombie-Britannique, Mary Ellen Turpel-Lafond, a examiné les documents à la demande de la CBC.

« C’est incroyable, absolument grossier », déclare-t-elle.

« C’était censé être une réconciliation sincère, pas une autre occasion d’accumuler des demandes de remboursement de dépenses et des heures facturables », se désole-t-elle.

« Comment peut-on faire une chose pareille? », ajoute-t-elle.

Selon elle, bien qu’il soit important que la vérité éclate enfin, ces révélations ont l’effet d’un coup de poing. Elles démontrent le manque de sérieux de l’Église catholique au sujet de ses responsabilités envers les survivants.

Des représentants qui se font discrets

Aucun des avocats impliqués dans l’affaire n’ont pu être joints pour des commentaires mercredi.

La Conférence des évêques catholiques du Canada (CECC) a refusé une demande d’entrevue, affirmant qu’elle ne fait pas partie du litige.

La porte-parole a cependant ajouté que les évêques du Canada « sont déterminés à continuer d’échanger et d’écouter » et a souligné la « délégation historique » qui doit se rendre au Vatican en décembre.

Cette délégation prévoit demander au pape François de visiter le Canada et de présenter des excuses pour les pensionnats, un appel lancé il y a plusieurs années par des leaders autochtones, des évêques et la Commission de vérité et réconciliation.

Par voie de communiqué, jeudi, la Fédération des nations autochtones souveraines (FSIN) a demandé une enquête officielle sur la conduite de l’Église catholique et de son conseiller juridique pour veiller à ce que la nature et l’étendue de tout acte répréhensible soient pleinement révélées et que les personnes fautives en soient tenues responsables.

Ligne bilingue d'appui pour les survivants des pensionnats pour Autochtones : 1 866 925-4419.
2344

Publier un nouveau commentaire

Annuler
Remarque

Votre commentaire doit être approuvé par un modérateur avant d’être affiché.

NETiquette sur les commentaires

Les commentaires sont les bienvenus sur le site. Ils sont validés par la Rédaction avant d’être publiés et exclus s’ils présentent un caractère injurieux, raciste ou diffamatoire. Si malgré cette politique de modération, un commentaire publié sur le site vous dérange, prenez immédiatement contact par courriel (info@droit-inc.com) avec la Rédaction. Si votre demande apparait légitime, le commentaire sera retiré sur le champ. Vous pouvez également utiliser l’espace dédié aux commentaires pour publier, dans les mêmes conditions de validation, un droit de réponse.

Bien à vous,

La Rédaction de Droit-inc.com

PLUS

Articles similaires