Julie Couture

Alcool au volant: C-2 et la suspension du droit de se défendre

Main image

Julie Couture

2012-07-24 14:15:00

Dans l'attente du jugement de la Cour suprême relatif à la contestation du projet de Loi C-2, l'avocate criminaliste Julie Couture revient sur la cause qui a amené la plus haute juridiction du pays à se pencher sur cette affaire.

Le jugement de la Cour suprême concernant la contestation de la Loi modifiant le Code criminel (projet de loi C-2 sanction royale le 28 février 2008) devrait sortir sous peu. Par l’adoption de ces modifications, le législateur voulait imposer un double fardeau à l’accusé si les résultats des alcootests révélaient un taux supérieur à 80 mg par 100 ml de sang.

L’accusé devrait maintenant prouver son innocence en démontrant l’utilisation incorrecte ou le mauvais fonctionnement de l’alcootest. Il aurait également le fardeau d’établir que son taux d’alcoolémie ne dépassait pas la limite permise au moment de l'infraction.

Impact sur la pratique

Tous plaident qu’il s’agit d’une atteinte flagrante à la présomption d’innocence et au droit à une défense pleine et entière étant donné le fardeau supplémentaire de démontrer le mauvais fonctionnement de l’appareil et ce, sans que l’appareil soit disponible pour une expertise.

La décision de la Cour suprême aura une incidence majeure sur plusieurs causes pendantes, selon Julie Couture
La décision de la Cour suprême aura une incidence majeure sur plusieurs causes pendantes, selon Julie Couture
Le jugement de la Cour du Québec est passé directement à la Cour suprême. Le Ministère public a voulu que la Cour suprême se penche rapidement sur la question de la constitutionnalité. Dans ce contexte, plusieurs personnes accusées d’alcool au volant se questionnent sur leurs moyens de défense possibles.

Une cause parmi d’autres

La cause d’Anic St-Onge Lamoureux a été choisie pour demander à la Cour suprême de se pencher sur la constitutionnalité du projet de Loi C-2. Mme St-Onge Lamoureux avait été interpellée lors d’un barrage routier par les policiers de Sherbrooke. Après avoir acquis suffisamment de motifs d’arrestation, elle est amenée pour subir un alcootest devant un technicien qualifié. Les analyses révèlent une alcoolémie de 164 mg à 0h30, de 124 mg à 1h02 et de 130 mg à 1h28.

Lors du procès, le juge Conrad Chapdelaine a estimé que les explications données par le technicien étaient suffisantes pour juger valables les deux derniers échantillons. Selon lui, ces échantillons étaient convenables malgré qu’ils puissent sous-estimer le taux d’alcoolémie de l’accusée. Une motion de non-lieu a été présentée par l’accusée jugeant les prélèvements imprécis et les écarts trop importants. Cette motion fût rejetée.

L’accusée a également fait valoir un scénario de sa consommation qui rendait improbable le taux d’alcoolémie révélé par les tests. Dans son jugement, le juge Chapdelaine a déclaré une partie de l’article 258(1)c) constitutionnel. L’article 258(1) d.01 a été jugé constitutionnel dans son intégralité et l’article 258(1) d.1 amputé de l’alinéa (ii) du Code criminel. Cela revenait à rendre inconstitutionnelle une partie non négligeable du projet de Loi C-2.

Décision

La décision que rendra la Cour suprême aura une incidence majeure sur plusieurs causes pendantes au Québec et au Canada. Conséquemment, des requêtes en demande de divulgation supplémentaire de la preuve sont présentées, car nous estimons que l’entretien des appareils n’est pas conforme aux recommandations de la Société Canadienne des sciences judiciaires.

Nul besoin de dire que nous attendons le jugement avec beaucoup d’impatience. D’ici là, les dossiers sont reportés à l’automne. Nous saurons également si cette Loi aura une portée rétrospective.


Note sur l'auteure :
Julie Couture se spécialise en droit criminel au sein du cabinet Couture & Boulet Avocats.
10794

Publier un nouveau commentaire

Annuler
Remarque

Votre commentaire doit être approuvé par un modérateur avant d’être affiché.

NETiquette sur les commentaires

Les commentaires sont les bienvenus sur le site. Ils sont validés par la Rédaction avant d’être publiés et exclus s’ils présentent un caractère injurieux, raciste ou diffamatoire. Si malgré cette politique de modération, un commentaire publié sur le site vous dérange, prenez immédiatement contact par courriel (info@droit-inc.com) avec la Rédaction. Si votre demande apparait légitime, le commentaire sera retiré sur le champ. Vous pouvez également utiliser l’espace dédié aux commentaires pour publier, dans les mêmes conditions de validation, un droit de réponse.

Bien à vous,

La Rédaction de Droit-inc.com

PLUS

Articles similaires