Pratiquer en solo

Le Super avocat techno

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Céline Gobert

2012-06-18 15:00:00

Argent, salaire, placements en bourse, médias sociaux et informatique, cet avocat solo spécialiste des technologies de l’information dit tout à Droit-Inc…

S’il évolue dans la sphère du virtuel, les bureaux dans lesquels travaille Me Michel Solis, eux, sont bien réels.

Oui, il ne faut pas confondre droit de l’informatique et informatique du droit.

« Le droit de l’informatique c’est le droit qui s’applique aux relations juridiques entre les différents acteurs du monde informatique. L’informatique du droit, c’est les outils disponibles pour les avocats », explique l’avocat.

Aucun regret

Au départ, ce spécialiste des technologies de l’information, reçu au Barreau en 1986, voulait faire carrière en informatique. Aujourd’hui, il mixe droit et TIC, et ne regrette rien.

« Je suis très content d’avoir fait ce que j’ai fait. La qualité de mon avenir dépend de ce que j’ai fait dans le passé. J’ai une liberté, maintenant et pour le futur, qui me plaît beaucoup. »

En début de carrière, il est d’ailleurs passé par la case Gowlings. Il sait donc ce qu’est la pratique au sein d’un grand cabinet.

« Je n’ai rien à redire, j’en garde un excellent souvenir. Ils ont été charmants, impeccables. Mais ce n’était pas ma place ! J’aime beaucoup mettre la main à la patte au niveau de la gestion, et comme dans n’importe quel grand cabinet, lorsque l’on est jeune avocat, la gestion du cabinet ne nous regarde pas. »

Le déclic pour Me Solis s'est fait dans un salon de PME
Le déclic pour Me Solis s'est fait dans un salon de PME
En 1987, après trois mois en sac à dos en Europe, il décide alors de démarrer sa propre pratique, dans un contexte de droit du CRTC.

« Avoir 26 ans et être seul pour servir des entreprises de médias radio et télé, ce n’est pas forcément très crédible alors il a fallu trouver autre chose. »

Le déclic

Le déclic se fait dans un salon de PME, où il rencontre des gens de l’incubateur d’entreprises du YMCA de Montréal.

« J’y ai passé deux ans, avec un bureau, et des diplômés en finances et marketing qui, presque quotidiennement me posaient des questions pratico-pratiques. »

Il se souvient qu’il pouvait croiser un conseiller dans l’escalier qui lui demandait : « Michel, aujourd’hui, t’as à peu près combien dans ton compte de bureau là ? », ou, « ton nombre de jours entre la facturation et le paiement, c’est quoi ? »

C’est grâce à cela qu’il y apprend la gestion de la clientèle, les états financiers, et surtout où il se pose LA question qui a tout changé : quelle est sa clientèle cible ?

Vingt ans en arrière, le droit et l’informatique étaient deux milieux séparés, on lui a même refusé un cours universitaire d’informatique parce que personne ne voyait le rapport avec le droit!

Aujourd’hui, à l’heure où le secteur de l’informatique a connu une croissance très grande au fil des ans, il sait qu’il a fait le bon choix.

Une pratique ciblée

« Si quelqu’un m’expliquait la logique de son produit, je pouvais la comprendre un peu, sinon beaucoup, et tout est parti de là. Aujourd’hui, je fais un travail de conseil dans les relations juridiques qui peuvent exister dans le domaine de l’informatique », dit-il.

Relations juridiques dit aussi contrats, négociations. Essentiellement, ses clients sont des PME de 1 à 50 employés.

Ils viennent le voir pour un travail de conseil dans un contexte où ils ont à dialoguer avec d’autres intervenants, soient des entreprises, des employés, des consultants, des sous-traitants.

« Il y a des clients avec lesquels j’ai commencé et qui avaient cinq employés ; puis j’ai perdu le client une fois qu'il en comptait 80 et avait été racheté par Bell, qui avait son propre contentieux et qui ne ferait pas affaire avec moi.»

Un dessin

Pour mieux expliquer la gamme de services qu’il propose, il fait un dessin au client, avec au fond : un soleil, et au centre : le produit.

« Pour des avocats de droit corporatif, ce qu’il y aurait dans le milieu c’est la corporation ; moi, c’est le produit. Je m’occupe des relations juridiques qui mènent au produit, à savoir les licences entrantes, le transfert de technologies entrant, ainsi que les contrats des employés et des sous-traitants qui travaillent sur le produit. »

En bref, tout ce qui sert à créer le produit.

Par la suite, son travail consiste à protéger la propriété intellectuelle du produit, et à participer à l’exploitation commerciale de ce dernier.

Là, explique-t-il, il s’agit d’un transfert de technologie dans l’autre sens, vers quelqu’un d’autre, ce qui inclut la distribution du produit, la collaboration de l’entreprise avec ses clients, ainsi que les éventuelles alliances stratégiques.

« Honnêtement je ne m’attendais pas à un boom informatique aussi grand mais j’en ai bénéficié oui ! Et, à ma connaissance, je suis le seul avocat senior indépendant dans ce domaine-là. »

C’est d’ailleurs son conseil à celui qui débuterait en solo.

« Avoir un champ d’expertise, ne serait-ce qu’un hobby, que l’on connaît bien, dont on peut parler, afin d’établir une confiance avec quelqu’un et pouvoir dire : je comprends ton domaine. »

L’argent

À bientôt 50 ans, Me Solis a développé une bonne gestion financière.

« Je ne crois pas gagner moins qu’au sein d’un grand cabinet. Si l’on regarde le chiffre à la fin de l’année, c’est certain que le revenu total est plus bas. Mais les dépenses sont aussi plus basses. Je pense que le revenu net, une fois tout calculé, est à peu près le même, sans prétention aucune. »

L’avocat fonctionne avec des estimés. 150 $ pour une consultation initiale.

Le matin même, un client est venu lui porter deux contrats de licences pour la propriété intellectuelle d’une entreprise américaine avec laquelle il souhaite faire affaire. Pour une dizaine de pages chacun, il faudra compter entre 2000 et 3000 $.

L’avocat croit surtout à une gestion serrée, pas en dépensant le moins possible, mais à la gestion de l’argent sur le long terme.

« Je fais vraiment attention à tout le cheminement de l‘argent qui entre. L’organisation fiscale de mon bureau incorporé, est faite pour légalement et correctement payer le moins d’impôts possible, et ensuite j’investis ce qui reste : placements, coupons détachés, bourses, fonds indiciels. »

« Je passe un certain temps à voir comment investir le profit qui reste après dépenses et salaire. Le profit qui reste, au fil des ans, fructifie. »

Donc à la longue, dit-il, cela revient à la même chose qu’un salaire d’avocat de grand cabinet.

Du point de vue du pouvoir d’achat, et sur le long terme.

Pas de site web!

Ce succès, il l’explique par un bouche à oreille efficace, et appliqué au web. Et ce même si, paradoxalement, il ne possède pas de site web !

« C’est vrai que c’est très étrange mais c’est un choix. Depuis un an ou deux, je me dis que je vais en construire un, mais avant je disais aux clients : pourquoi croyez-vous ce que j’ai à vous dire ? Avec un site web, c’est moi qui vais dire que je suis fiable, etc. Tapez Michel Solis dans Google et lisez ce que l’on dit de moi ! »

Une façon de tourner à son avantage le fait qu’il ait un budget minuscule comparé à celui des avocats des grands cabinets.

Ces derniers ont d’ailleurs beaucoup à gagner dans ce mariage entre droit et informatique. Écoutez-le en vidéo :


L’avenir

Les deux secteurs qui vont connaître un plein essor à l’avenir sont, selon lui, la vente en ligne et les médias sociaux.

« La vente en ligne dans deux cas : soit la vente en ligne est une fin en soi, soit il s’agit d’une entreprise qui vendait par d’autres moyens et qui va ouvrir un site web pour supporter ses ventes ordinaires, ou pour ouvrir un nouveau canal pour vendre »

Condition d’utilisation, de ventes, politiques de confidentialité : autant de questions auxquelles il devra répondre.

Quant à la question des médias sociaux, il s’esclaffe et demande : « avez-vous cinq heures devant vous ? Il y a tellement de choses à dire là-dessus. »

Selon lui, les médias sociaux vont prendre encore plus de place dans un futur proche.

« Les gens vont réaliser que ce qu’ont dit sur les médias sociaux, on le dit vraiment. Au fond, ils permettent aux gens de s’installer sur scène, virtuellement et de prendre le micro. Or si quelqu’un, dans les faits et le monde non virtuel, monte sur scène, prend le micro et parle à l’auditoire, il va faire attention à ce qu’il va dire ! »

Ce qui n’est pas le cas aujourd’hui, selon lui, où l’impulsivité règne.

« À un moment il va y avoir des gens, qui sont des cibles, qui vont se fatiguer, réagir et les poursuivre. Il va y avoir des cas d’exemples. »

D’ailleurs, à l’heure de l’affaire Oasis/Lassonde, il répète la même blague durant les conférences.

« Ce n’est pas la première fois qu’un jugement est affecté par un mouvement de foule, Jésus et Barabbas en sont un bon exemple ! »
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