La médiation n’est pas une solution miracle!

Main image

Jean H. Gagnon

2016-01-12 11:15:00

Si les modes de règlements alternatifs des conflits sont mis en avant par le nouveau Code de procédure civile, il n’existe pas de solution universelle. À chaque conflit, son type de résolution...

Me Jean H. Gagnon a plus de 40 années d’expérience à titre d’avocat de négociateur, de médiateur et d’arbitre
Me Jean H. Gagnon a plus de 40 années d’expérience à titre d’avocat de négociateur, de médiateur et d’arbitre
En lisant certaines publicités et certains articles faisant la promotion de la médiation, l’on peut être facilement laissé sous l’impression que la médiation est une solution miracle qui permet de régler tous les différends et qui est toujours préférable à tous les autres moyens d’en arriver à une solution, que ce soit la négociation, l’arbitrage, le procès ou un autre outil de règlement de différends.

Il s’agit là d’une légende urbaine qui, malheureusement, est largement véhiculée dans l’univers juridique.

En premier lieu, la médiation ne convient pas à tous les différends et les litiges. Ainsi, lorsqu’une décision urgente (telle une injonction provisoire) est requise ou, encore, lorsqu’il s’agit de trancher sur l’interprétation d’une loi d’ordre public ou d’établir une jurisprudence, le recours aux tribunaux sera souvent la meilleure avenue pour y parvenir.

En second lieu, il y a le mythe véhiculé par certains à l’effet que la médiation augmente la probabilité d’en arriver à un règlement. Or, les études menées depuis au moins les vingt dernières années en arrivent toutes à la conclusion que 78 à 90% des litiges se règlent de toute manière, avec ou sans médiation.

L’avantage réel de la médiation en terme de règlement ne consiste donc pas dans une augmentation des chances de règlement mais plutôt, comme je l’ai déjà écrit, dans le moment du règlement (qui peut intervenir plus tôt dans le processus) et, encore plus, dans la qualité du règlement en termes de satisfaction des besoins et des intérêts véritables des parties (puisqu’une médiatrice, ou un médiateur, expérimenté ne se contentera pas de mettre fin à la médiation dès qu’une entente apparaît possible, mais continuera plutôt à travailler avec les parties et leurs avocat(e)s pour en arriver à la meilleure entente possible dans les circonstances).

En troisième lieu, il ne faut pas sous-estimer l’importance des habiletés de l’avocat(e) qui participe à une médiation ainsi que la préparation de cet(te) avocat(e) et de son client qui sont des facteurs jouant un rôle prépondérant au succès de toute médiation.

Comme outil de règlement de différend, la médiation est sans l’ombre d’un doute le plus flexible sur bien des plans et, dans plusieurs cas, peut vous permettre d’offrir à vos client(e)s une voie des plus intéressantes pour régler, même avant l’institution de quelque procédure, leurs difficultés et leurs différends, vous permettant ainsi de vous démarquer auprès d’eux comme un véritable conseiller et expert en règlement de différends.

Par contre, la médiation n’est pas une solution miracle et n’est pas toujours non plus l’outil le plus approprié. Ça demeure à l’avocat(e) d’apprendre à bien le maîtriser et à savoir quand, et comment, bien l’utiliser pour lui permettre d’atteindre les objectifs de son client.

Je vous invite à me contacter (par courrier électronique à jhgagnon@jeanhgagnon.com ou par téléphone au 514.931.2602) pour toute question ou tout commentaire.

Bio

Avec 40 années d’expérience à titre d’avocat de négociateur, de médiateur et d’arbitre, Jean H. Gagnon est aussi l’un des pionniers du droit de la franchise au Canada. Il est également l’auteur de nombreux articles sur les moyens non judiciaires de prévention et de règlement des différends. Il est accrédité par l’Institut de médiation et d’arbitrage du Québec, par l’Institut de médiation et d’arbitrage du Canada, et par le Barreau du Québec.

Site internet: http://jeanhgagnon.com
7871

6 commentaires

  1. Anonyme
    Anonyme
    il y a 8 ans
    S.v.p., nommez les choses, et les personnes!
    "Il s’agit là d’une légende urbaine qui, malheureusement, est largement véhiculée dans l’univers juridique."


    La "légende urbaine", comme vous dites, est surtout colportée par les policiens, qui voient dans les MARC une solution miracle pour remédier à l'inaccessibilité de la justice.

    Avec le nouveau C.p.c., les juges vont s'y mettre à leur tour.

    ça promet...

    • Jean H. Gagnon
      Jean H. Gagnon
      il y a 8 ans
      Intéressant commentaire, mais…
      Présentement, les avocats sont en voie de s’exclure eux-mêmes du marché en n’offrant qu’une seule solution (le recours judiciaire suivi d’une négociation pour le régler).

      Face à cela, le marché est en voie de trouver, en dehors du recours à l’avocat, d’autres avenues pour régler les différends.

      Pour renverser cette tendance lourde et profonde, il est fondamental que les avocats connaissent, et offrent, plusieurs solutions adaptées aux besoins, aux intérêts et aux moyens, de leurs clients.

      N’est-ce pas cela être un « Maître en solutions »?

      Comme je l’écris dans mon billet, la médiation n’est pas la meilleure voie pour tous les différends.

      Il en va cependant de même pour le recours judiciaire, la conférence de règlement à l’amiable, l’arbitrage, l’expertise, l’évaluation neutre… bref pour tous les moyens permettant de mettre fin à une mésentente ou un litige.

      Les lois fondamentales du marché tueront notre profession si nous n’en arrivons pas prochainement à proposer un éventail d’avenues, de moyens et d’outils répondant vraiment aux attentes de nos clients et de nos clients potentiels.

      Au-delà du n.C.p.c. (ainsi que des politiciens et des juges), c’est à nous tous de décider dès maintenant si nous sommes prêts à procéder aux changements nécessaires à notre pratique pour assurer un avenir à notre profession.

      Je vous souhaite, à toutes et à tous, une excellente année 2016 au cours de laquelle nous poserons les gestes requis pour faire progresser notre profession.

      Jean

  2. Anonyme
    Anonyme
    il y a 8 ans
    Merci!
    Merci de nous dire les choses comme elles le sont.

    La médiation n'est effectivement pas miraculeuse, malgré le fait qu'il n'est pas mauvais de demander aux parties de considérer un mode alternatif de règlement.

    Les modifications faites au Code de procédure civile sont très loin de rendre accessible la justice aux personne qui se représentent seules. Les nouvelles procédures sont éparpillées dans les nombreuses pages du site Web du ministère de la Justice et ceux des différentes Cours, en plus de devoir se conformer aux règlements et aux directives des Cours, des districts et des greffes. Attention! Les modèles sont fournis, oui, mais peuvent changer à tout moment! Il sera nécessaire de se procurer un avocat pour s'y retrouver.

    Le nouveau Code est aussi rempli d'ambiguïtés dans son application et nous force à interpréter les articles comme possible (voir article 107 et 134 sur le bordereau de notification... un exemple parmi tant d'autres). Vraiment, ils auraient pu prendre le budget publicitaire de leur découpage d'orange et mettre ça dans une analyse plus approfondie de la VRAIE application de la procédure devant les tribunaux, non pas en forçant les parties à régler hors cours mais faire un cheminement en matière civile bien conçu et détaillé en conséquence de ce qui se passe réellement dans le domaine juridique et devant les tribunaux.

  3. Anonyme
    Anonyme
    il y a 8 ans
    Questions
    Très intéressant de constater que 78 à 90% des litiges se règlent d'eux-mêmes,

    Par ailleurs, vous affirmez que la médiation aurait un impact sur le moment du règlement (plus tôt dans le processus) et donnerait (pourrait donner?) un règlement de meilleure qualité et satisfaisant pour les parties. Est-ce que des études mènent à ces conclusions?

    Je pose la question tout d'abord pcq je n'ai pas constaté de différence au niveau satisfaction pour mes clients. Au contraire, j'ai déjà vu des regrets être exprimés après un séance quand un client estime par la suite avoir concédé trop "dans le feu de l'action."

    En ce qui a trait au timing, de la même façon mon expérience est à l'effet qu'un médiation trop rapidement tentée risque de dégénérer, notamment parce que les parties ne voient pas nécessairement bien la position de l'autre.

    Merci

    • Jean H. Gagnon
      Jean H. Gagnon
      il y a 8 ans
      Réponses à vos questions...
      Merci Mme, M. ou Me Anonyme de votre commentaire.

      Effectivement, le professeur Jean-François Roberge, de l’Université de Sherbrooke, a publié en décembre 2014 un important rapport dont je faisais état dans mon billet du 11 février 2015 ( http://www.droit-inc.com/article14651-Etat-des-lieux-sur-la-conference-de-reglement-a-l-amiable&highlight=jean-fran%C3%A7ois%20roberge ).

      Dans ce rapport, le professeur Roberge écrit notamment que : « Nous avons également remarqué que l’augmentation des coûts déjà encourus (ressources, opportunités, temps) influence de manière négative la satisfaction et que les parties qui ont un accord sont plus satisfaites. En plus d’un rapport coûts-bénéfices avantageux, le piège psychologique de “l’escalade des engagements” pourrait expliquer ce résultat. Selon ce phénomène psychologique, la partie voit les ressources en argent et en temps consacrées au litige comme un “investissement”. Par conséquent, elle s’attend à récupérer ses coûts en plus de ce qu’elle croit mériter en droit. Plus les coûts en argent et en temps augmenteront, plus la zone potentielle d’accord sur le plan financier se réduit avec pour conséquence une impasse potentielle et une diminution de la satisfaction. »

      La médiation pouvant intervenir beaucoup plus tôt qu’une CRA, les possibilités de règlement sont plus nombreuses et les obstacles à franchir moins élevés. Par exemple, il est beaucoup plus facile de préserver une relation entre associés si l’on intervient avant que des procédures judiciaires n’aient été engagées.

      Quant à la qualité du règlement, une médiation peut très bien se dérouler sur deux ou quelques séances afin de permettre aux parties de bien réfléchir sur leurs alternatives avant de se commettre à une entente.

      Les avocats jouent aussi un rôle fort important en médiation en conseillant leurs clients et en les secondant dans leurs négociations, ce qui contribue de beaucoup à la qualité de l’entente.

      Encore une fois cependant, la médiation n’est pas une panacée ni une solution-miracle !

      Par contre, et ceci est documenté dans de nombreuses études et recherches menées surtout aux États-Unis (que vous pourrez facilement retrouver sur internet) depuis les vingt dernières années, l’apport d’une tierce personne neutre (le « médiateur ») dans une négociation en accroît de manière importante les chances de succès.

      Ceci est encore plus vrai si le médiateur est compétent et expérimenté et si les parties sont assistées de procureurs qui jouent pleinement leur rôle de conseillers juridiques et de négociateurs.

      Jean

    • Mme, M. ou Me Anonyme
      Mme, M. ou Me Anonyme
      il y a 8 ans
      Merci!
      Merci d'avoir pris la peine de fournir ces infos.

Annuler
Remarque

Votre commentaire doit être approuvé par un modérateur avant d’être affiché.

NETiquette sur les commentaires

Les commentaires sont les bienvenus sur le site. Ils sont validés par la Rédaction avant d’être publiés et exclus s’ils présentent un caractère injurieux, raciste ou diffamatoire. Si malgré cette politique de modération, un commentaire publié sur le site vous dérange, prenez immédiatement contact par courriel (info@droit-inc.com) avec la Rédaction. Si votre demande apparait légitime, le commentaire sera retiré sur le champ. Vous pouvez également utiliser l’espace dédié aux commentaires pour publier, dans les mêmes conditions de validation, un droit de réponse.

Bien à vous,

La Rédaction de Droit-inc.com

PLUS

Articles similaires