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Claude Jutra, Québécois sans droit?

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André Sirois

2016-03-11 11:15:00

Un avocat auprès d'organisations internationales, spécialisé notamment en droits de l'homme, s’insurge contre la façon dont le ministère de la Justice a traité l’affaire Jutra…

Me André Sirois
Me André Sirois
En ce qui concerne ce qu'il faut bien appeler malheureusement l'affaire Claude Jutra, serais-je le seul à m'étonner du silence des autorités publiques, du ministère de la Justice et de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse devant le lynchage du cinéaste?

La Charte des droits de la personne et de la jeunesse énonce à son article 4 que « Toute personne a droit à la sauvegarde de sa dignité, de son honneur et de sa réputation.» Sauf Claude Jutra?

La Charte ajoute à l'article 5 que: « Toute personne a droit au respect de sa vie privée.» Sauf Claude Jutra?

La Charte ajoute aussi, à l'article 33: « Tout accusé est présumé innocent jusqu'à ce que la preuve de sa culpabilité ait été établie suivant la loi. » Et cette présomption d'innocence comporte le droit à un procès juste et équitable. Sauf pour Claude Jutra? qui n'a jamais été accusé de quoi que ce soit?

Par ailleurs, la Commission des droits de la personne n'a-t-elle pas spécifiquement pour mission « de veiller au respect des principes énoncés dans la (...) Charte », comme le stipule son article constitutif, l'article 57 de la Charte?

Par conséquent, comment se fait-il que, sauf erreur, on n'ait entendu ni la Commission ni aucun de ses membres rappeler ces principes de la Charte et rappeler aussi que la Charte existe d'abord et avant tout pour éviter des dérapages pareils, des chasses aux sorcières, des lynchages publics ou des exécutions par tribunaux populaires.

Comment se fait-il aussi que la ministre de la Justice n'ait pas jugé bon d'intervenir pour rappeler qu'il s'agissait d'une affaire d'ordre public, qui est de sa responsabilité, et qu'elle a le devoir fondamental de voir au respect des droits garantis à chaque citoyen du Québec, y compris Claude Jutra?

Faut-il rappeler que la Charte n'est pas là pour protéger des droits que tous sont prêts à protéger spontanément d'un commun accord, mais que son utilité, sa nécessité, se manifeste pour protéger l'exercice de droits impopulaires et qu'elle sert alors à protéger les droits des minorités, voire des individus, face à des mouvements de masse et des manifestations aussi dangereuses et injustes qu'impulsives.

Un type de justice par délire populaire

Claude Jutra
Claude Jutra
L'origine douteuse de cette affaire et l'ampleur des réactions, souvent plus émotives que réfléchies, qu'elle a provoquées méritent un examen sérieux. Accepter ainsi ce type de justice par délire populaire est indigne d'un État de droit.

Déjà le code d'Hammourabi, l'un des premiers textes juridiques, adopté il y a plus de 3700 ans, prévoyait la peine de mort pour l'auteur d'accusations qu'il ne pouvait prouver. Et depuis ce temps, cette condamnation des accusations sans fondement a été constamment reprise dans d'innombrables codes et textes juridiques visant à protéger des droits fondamentaux.

Or, sur quoi reposent ces condamnations de Jutra? Rappelons d'abord que Claude Jutra n'a jamais été accusé de quoi que ce soit de son vivant (ni après sa mort d'ailleurs il y a de cela 30 ans) et que, par conséquent, il n'a jamais eu le besoin ni la possibilité de se défendre contre quelque accusation que ce soit.

L'affaire repose sur quelques ragots exploités par le biographe de Jutra, M. Lever: « Quand j'ai écrit le livre, on m'a suggéré de traiter ce passage en disant simplement qu'il aimait les jeunes garçons sans employer le mot pédophilie, explique M. Lever. Mais je me suis dit que si je ne le faisais pas quelqu'un d'autre le ferait à ma place.» (Déclaration de M. Lever au Journal de Montréal, le 16 février 2016, p. 38)

Peut-on vraiment condamner quelqu'un ainsi? Remplaçons le mot « pédophilie » par le mot « meurtre » pour voir l'absurdité grossière du procédé de M. Lever. Par la suite, comme souvent dès qu'une affaire de sexe est soulevée dans les médias, deux accusateurs, que certains médias identifient comme des « victimes », sont apparus; l'un exige l'anonymat (quelle serait la valeur d'un témoignage anonyme et non contesté devant un tribunal?), l'autre s'identifie.

La façon normale de procéder est alors d'aller à la police et de porter plainte. C'est leur droit le plus strict. Il conviendrait alors de prendre leur témoignage et de l'examiner à la lumière des règles de droit puis de décider s'il y a matière à procès et, éventuellement, de faire un procès juste et équitable.

Des condamnations à l’emporte-pièce

Au lieu de cela, on a immédiatement droit à une avalanche de condamnations à l'emporte-pièce, certaines provenant de gens de bonne foi plus inquiets que bien renseignés, d'autres de gens aux motivations beaucoup plus sombres.

On a notamment l'impression que c'est une belle occasion d'accuser de pédophilie, par amalgame, les homosexuels, les bisexuels, les amateurs de sexe en général, les « flower people » , les intellectuels et les « artisses ». Bel exercice de défoulement populaire et de psychothérapie de groupe. Mais où se trouvent la justice et le respect des droits?

Il est devenu d'autant plus facile de condamner Jutra, célibataire, décédé et sans famille, c.a.d. sans défense, que, dans les faits, son propre gouvernement, par son inaction devant le lynchage, l'a déjà dépouillé de ses droits fondamentaux. Et que, contrairement à certains autres, il n'a pas une puissante famille financière ou politique pour défendre sa mémoire et intimider d'éventuels accusateurs. Grâce à cette garantie d'immunité, on peut dire n'importe quoi et on ne s'en prive pas. C'est ignoble.

Jutra se trouve jugé et condamné sans jamais avoir été accusé de quoi que ce soit et sans avoir pu se défendre. Et il est condamné ainsi très publiquement et très officiellement par les autorités responsables de protéger ses droits et de protéger nos droits. Faut-il souligner que le prochain lynché, la prochaine victime d'une chasse aux sorcières, ce pourrait être n'importe qui d'entre nous? Et que notre gouvernement et notre Commission des droits de la personne ne feront rien pour assurer la protection de nos droits: la preuve en est maintenant faite.

Il y a sûrement lieu de tirer des leçons de cette malheureuse affaire et, pour cela, il faut au plus tôt constituer un comité d'experts indépendants pour voir comment assurer à l'avenir la protection des droits des personnes concernées, y compris au premier chef la ou les victimes d'un tel lynchage.


Consultant auprès de tribunaux internationaux et d’organisations internationales, conseiller juridique pour plusieurs fournisseurs et syndicats d’organisations internationales, et certains de leurs membres, et conférencier en matière de droit administratif international et en matière de traduction juridique, Me André Sirois a été très actif dans la création d’un barreau pour les avocats travaillant auprès des organisations internationales et des tribunaux internationaux, pour la réforme du système de justice interne de l’ONU, l’application de la règle de droit à l’intérieur de l’ONU et la reconnaissance des droits de l’homme pour les fonctionnaires de l’ONU.

Me Sirois est le premier Canadien à avoir jamais été embauché comme fonctionnaire des services linguistiques de l’ONU. Il a aussi été l’un des premiers employés du Tribunal international pour le Rwanda, dont il a ensuite dénoncé l’incurie et la mauvaise administration, ce qui en a fait l’un des premiers lanceurs d’alerte de l’ONU. Il a travaillé dans différents bureaux, missions et tribunaux de l’ONU. Il est l’un des auteurs de Justice Belied, The Unbalanced Scales of International Criminal Justice.
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20 commentaires

  1. Anonyme
    Anonyme
    il y a 8 ans
    Protection de qui?
    maintenant
    des garçons de passage
    lui dérobaient des bouts d’sa vie
    il dessinait leurs doux visages
    eux repartaient sans dire merci

    Extrait de l'Oubli de M. Rivard, chanson écrite en hommage à Jutra.

    Pour résumer le propos de l’auteur, comme il n'y a pas eu d'accusations, il ne saurait y avoir condamnation. Considérant que Jutra est mort depuis 30 ans, il n'y aura jamais de procès, on ne l'accusera jamais. Et ses droits à sa vie privée, son honneur, sa réputation devraient faire en sorte que l’on ne puisse se questionner?

    Donc, il s'en tire indemne? C'est fini, rien à rajouter? On continue de lui rendre hommage? Non seulement ça, mais le gouvernement aurait l’obligation de le défendre? On fait fi de toute la boucane, on laisse les morts en paix.

    En passant, j’imagine que pour vous OJ Simpson est une victime parce que lui a même été trouvé non-coupable.

    Et non, il n’y a pas confusion entre pédophilie d'une part et homosexualité et tout le reste d'autre part, c’est vous qui semblez ne pas être fichu de faire la différence. C’est dommage.

    Je ne sais pas si vous étiez son ami ou si vous admirez son œuvre, mais quoi qu’il en soit, que vouliez-vous? Que des poursuites soient intentées par les autorités? On poursuit donc les victimes? Et qu’est-ce qui arrive si on les croit en bout de ligne? Qu’arrive-t-il aux droits des hommes qui disent avoir été agressé par Jutra?

  2. Gabrielle
    Gabrielle
    il y a 8 ans
    Réponse à Anonyme
    Je ne crois pas que le texte ci haut est une invitation à banaliser la situation, ni à poursuivre les victimes, ni à taire les propos.

    Il s'agit plutôt d'une réflexion sur le fait qu'un individu est présumé innocent jusqu'à preuve de sa culpabilité. Que les accusations de pédophilie contre Claude Jutra n'ont jamais été sujet d'un enquête et d'un procès pour juger et sanctionner ce dernier à partir de la loi et non de l'opinion publique. Comme il est si bien dit dans le texte:" Et il est condamné ainsi très publiquement et très officiellement par les autorités responsables de protéger ses droits et de protéger nos droits. Faut-il souligner que le prochain lynché, la prochaine victime d'une chasse aux sorcières, ce pourrait être n'importe qui d'entre nous? ..."

    Il s'agit d'une réflexion beaucoup plus grande que le cas Jutra concernant la protection et le respect des droits de la personne.

    • Anonyme
      Anonyme
      il y a 8 ans
      re à réponse
      Avec respect, ça ne tient pas debout.

      La présomption d'innocence s'applique en matière pénale et criminelle. Elle n'a aucune application en l'espèce puisqu'il n'y a justement pas d'accusation. Pas d'accusation, veut dire pas de présomption. Il n'a pas été trouvé coupable de quoi que ce soit par un tribunal, comment voulez-vous appliquer cette présomption? Un peu de rigueur svp.

      À vous entendre, les victimes ne peuvent plus raconter leur histoire, vous savez, question de présomption d'innocence! Nathalie Simard ne pouvait pas raconter son histoire tant que Fournier n'avait pas été trouvé coupable? Et s'il avait été acquitté sur une technicalité ou une absence de preuve après toutes ces années, Nathalie n'aurait pas pu en parler?

      Et on ne peut plus prendre de décision tant qu'un tribunal ne s'est pas prononcé sur le fond de l'affaire? Le mec n'a pas payé pour être honoré de cette façon, ce sont ses concitoyens qui ont fait ce choix. Ils peuvent lui retirer de la même façon. On n'a pas demandé une preuve hors de tout doute raisonnable de son génie, pourquoi en demandé autant pour le démettre.

      Si effectivement il y a eu diffamation, c'est de l'ordre du civil, pas du pénal. La succession pourra poursuivre si elle le juge à propos, mais il n'y aura pas de présomption d'innocence.

      L'auteur semble par ailleurs oublier l'existence du droit d'expression de tous ceux concernés. Et le fait que le décès a qquand même un certain impact sur les droits des personnes

    • Précision
      Précision
      il y a 8 ans
      oups...
      pas Fournier...Cloutier

  3. Avocat
    Avocat
    il y a 8 ans
    Partir au galop
    Pourquoi diable est-ce que le MJQ et la CDPDJ devraient faire une sortie publique pour une affaire privée?? Cette histoire n'est pas d'intérêt public. Svp MJQ et CDPDJ, continuez d'agir comme vous le faites actuellement, soit en s'attaquant aux domaines d'intérêt public. J'ai pas envie que mes taxes servent à brimer la liberté d'expression contre un présumé pédophile qui est mort, soit dit en passant. La présomption d'innocence dont traite Me Sirois, c'est pour les vivants; aucune idée pourquoi Sirois mélange tout ça ensemble pour faire une sauce douteuse. Mauvais article.

  4. Nabuchodonosor
    Nabuchodonosor
    il y a 8 ans
    La Charte des morts
    Je ne savais pas que les chartes protégeaient les droits des morts. Faudra m'indiquer la jurisprudence là-dessus.
    D'autre part, laisser sous-entendre que les victimes n'ont plus le droit de rien dire aujourd'hui parce qu'ils n'ont pas porté plainte du vivant de Jutra, c'est particulièrement ridicule.

  5. Anonyme
    Anonyme
    il y a 8 ans
    Acte manqué
    Me Sirois,

    Bien que vous ayez absolument droit à votre position, pour ma part je considère que celle-ci constitue un acte manqué dans le contexte.

    Respectueusement,

    Me A. Nonyme

  6. Sceptique
    Sceptique
    il y a 8 ans
    Un peu de vrai, un peu de ridicule
    Il est vrai que cette situation soulève des questions juridiques intéressantes sur les droits des personnes décédées.

    Toutefois, le ton employé par l'auteur, son abus du terme "lynchage" ainsi que certaines de ses conclusions (amalgames entre homosexuels, artisss et pédophiles?) laissent à désirer. D'ailleurs, contrairement à Me Sirois, le fait de remplacer le mot "pédophilie" par le mot "meurtre" ne me porte pas à conclure à l'absurdité de la démarche de M. Lever si les allégations étaient basées sur des témoignages crédibles.

    Si je dis que Marc Lépine ou Martin Couture-Rouleau étaient des meurtriers, la Commission des droits de la personne devrait-elle agir ? Ils n'ont jamais été condamnés...

    En théorie, M. Jutra, s'il était coupable, aurait dû être condamné par un tribunal plutôt que par l'opinion publique. Dans les faits, un procès serait plutôt farfelu compte tenu que le gars est mort depuis 30 ans. Comment pourrait-il être sanctionné par la loi? On transfère sa dépouille au pénitencier? Quel est le dommage réel subi par M. Jutra ? Nul. Il est mort.

    Qu'auraient dû faire les autorités? Condamner les allégations? Encourager les victimes alléguées à porter plainte à la police ou à garder le silence? Se mettre la tête dans le sable en attendant la fin de la tempête? Peut-être que certains intervenants ont réagi trop vite, mais à moment donné, il est trop tard pour faire rentrer le dentifrice dans le tube.

  7. Jaeger-LeCoultre
    Jaeger-LeCoultre
    il y a 8 ans
    Présomption d'innoncence pour les morts
    Beaucoup de personnes ont été accusé de crimes une fois qu'ils étaient morts, sans avoir été jugé en bonne et due forme de leur vivant. Doit-on pour autant faire comme si rien ne s'était produit? Si oui, je plains les historiens!

    Voici une liste aucunement exhaustive:
    - Lénine
    - Staline
    - Hitler
    - Franco
    - Mao
    - Mussolini
    - Idi Amin Dada
    -Bokassa
    - Ivan le Terrible
    - Salazar
    - Basile II le Bulgaroctone

  8. Anonyme
    Anonyme
    il y a 8 ans
    Procès Max Roussy
    C'est drôle, je viens de lire un article sur ce procès et la version de la victime, qui le traite de pédophile. Pourtant, il n'a pas été reconnu coupable et maintenant il est sali, même s'il devait être acquitté. Les autorités devraient-elles rappeler à tout le monde la présomption d'innocence?

  9. Anonyme
    Anonyme
    il y a 8 ans
    Ben voyons donc!
    Faudrait qu'on m'explique comment on peut porter une accusation contre un mort? De toute façon, comment ce défunt pourrait-il avoir une défense pleine et entière!?!

    La présomption d'innocence, c'est un principe qui s'applique lors d'une poursuite au criminel. Ici, il ne peut y avoir procès bien évidemment donc la présomption d'innocence n'a pas sa place dans la discussion selon moi.

  10. Anonyme
    Anonyme
    il y a 8 ans
    Petite mise au point
    Juste de meme, je serais curieux de savoir combien ca a couté aux différentes instances qui ont changé le nom de Jutra un peu partout.

    Parce que mettons qu on remplace Jutra dans cette affaire par mettons P.E. Trudeau. Aurions nous changé si rapidement le nom de l aeroport avec tous les couts directs et indirects que ce changement de nom aurait engendré?

    Il me semble que les instances publiques devraient faire preuve d un peu de rigueur avant de reagir sur de simples rumeurs. Comme c est la, toute la reputation d un individu a ete effacee de l histoire sans que les faits aient aucunement été démontrés. On est loin de Hitler ici, a date on a eu moins de temoignages sur Jutra que sur Aubut ou que sur Gomeshi...encore la, Aubut a vu son nom retiré d un aréna mais a ma connaissance il clame toujours son innocence et n est poursuivi par personne...

    Ca va s arreter ou? C est bel et bien du lynchage public et il faudrait trouver une facon de gérer ces déclarations posthumes ou qui ne font pas l objet de poursuites. Car oui, on devrait etre présumé innocent en l absence de preuve. Et un PRÉSUMÉ pédophile n a pas moins de droit que quiconque accusé de tout acte criminel, si mort soit il.

    L'inquisition ca vout dit quelque chose??? Ben c est a peu pres ca que Jutra a eu comme droit de se defendre du titre de pedophile maintenant associé a sa mémoire.

    • Anonyme
      Anonyme
      il y a 8 ans
      Tout mélangé
      Vous mélangez bien des choses. Premièrement, il n'est pas présumé pédophile. Il est au contraire présumé innocent. Deuxièmement, il est faux de dire que les morts n'ont pas moins de droits que les vivants puisque les morts n'ont aucun droit. Enfin, la décision des instances publiques de retirer le nom de Jutras n'a rien à voir avec le droit. D'une part, personne n'a le droit d'avoir un prix ou un monument à son nom. D'autre part, ces décisions sont fondées sur des principes, non pas juridiques, mais de relations avec les médias. Plutôt que d'être harcelés par les médias, on retire tout simplement le nom et s'en est fini.

  11. Isabelle
    Isabelle
    il y a 8 ans
    Un trou dans le droit
    Pour plusieurs, hors du droit criminel, la présomption d'innocence n'existe pas.

    Or, il s'agit d'un principe de justice naturelle. De justice tout court. Chez les êtres humains civilisés, la règle veut qu'on présume qu'une personne n'est pas dans le tort (peu importe la, jusqu'à preuve du contraire, et on donne à cette personne, autant que faire se peut, la possibilité de se défendre.

    Ce que l'auteur dit, notamment, c'est que ce principe de justice humaine a été bafoué dans le cas de Jutras. Et bafoué par les autorités et des organisme officiels - non pas seulement par les énervés qui commentent les articles du Journal de Montréal.

    Il y a un trou dans notre droit. S'il était vivant, il aurait droit à une défense, que ce soit au criminel ou au civil. Mort? Aucun droit. Deux témoignages et c'est réglé.

    Moi je trouve la question de la présomption d'innocence (dans le sens large) des personnes décédées importante et difficile, et c'est bien que des juristes s'y intéressent.

    • Isabelle
      Isabelle
      il y a 8 ans
      re Un trou
      Oups:

      "... la règle veut qu'on présume qu'une personne n'est pas dans le tort (peu importe la ===nature de ce tort: criminel, civil, éthique, etc.=== jusqu'à preuve du contraire..."

  12. Me Stéphane Lacoste
    Me Stéphane Lacoste
    il y a 8 ans
    Un droit qui survie au décès
    En droit civil, le droit à la vie privée et à la réputation continue ou survie au delà de la mort de l'individu; il appartient aux héritiers de les faire respecter (avec toutes les difficultés que cela implique).

    Quant à l'affaire Jutra, je suis d'accord que la CDPJQ et la MJQ ont manqué une belle occasion de faire valoir la règle de droit.

    Cela est différent de la question du changement de nom du gala, des prix et des lieux publics. Une réputation entachée, même injustement, est entachée et les tiers n'ont pas à se maintenir dans la boue. Garder le nom de Claude Jutra, entache maintenant ces tiers.

    Finalement, la question de la présomption d'innocence est un peu mal posée. En droit civil, il existe une présomption d'innocence, de normalité, de bonne foi. C'est ainsi qu'il appartient à celui qui allègue une faute de la prouver par prépondérance. Dans ce cas, la succession de Jutra pourrait poursuivre les auteurs des diffamations à sa mémoire, prouver les allégations, qu'elles portent atteinte à son honneur, sa réputation et sa vie privée et que des dommages lui ont été causés. La succession pourrait en théorie obtenir le paiement de dommages et intérêts (improbable selon moi) et de dommages punitifs. Elle pourrait aussi obtenir une injonction. La décision de la Cour aurait certainement un grand effet "curatif". Les défendeurs devraient prouver la vérité de leurs allégations ou faire valoir toute autre défense applicable, notamment quant à l'intérêt public.

  13. Anonyme
    Anonyme
    il y a 8 ans
    Euh, non...
    C'est bien beau parler de présomption d'innocence ou de fardeau de preuve (qui semble être l'application décrite dans les commentaires de Me Lacoste et Isabelle), mais on fait quoi quand la personne est décédée depuis 30 ans? On applique cette présomption de façon absolue et empêche les individus qui ont des doléances de les faire valoir autrement que dans le cadre d’un procès? On honore des gens en dépit de sérieux doutes sur la validité de l’honneur?

    Il n’y aura évidemment pas de procès pénal, mais allez-vous chialer qu’un procès civil est impossible/inéquitable dans la mesure où l’accusé ne pourrait évidemment pas se défendre? Donc que la victime est sans recours à compter du décès de l’individu?

    Ouais, Me Lacoste la succession pourrait évidemment poursuivre, mais encore faudrait-il avoir une preuve contradictoire à présenter, non? Il va de soi que la preuve des « victimes » sera non-contredite, non?


    Est-ce que Jutra a commis les actes qui lui sont reprochés? Je ne sais pas. Mais je suis pas mal certain que Me Sirois ne le sais pas plus que moi. Je trouve incroyable de voir des gens se porter à la défense de Jutra. Si c’était une femme qui accusait un homme de viol, on crierait que l’on doit lui donner le bénéfice du doute, que le système est injuste en exigeant que la victime confronte l’accusé etc.

    Pourquoi cette différence quand on parle d’hommes victimes? En fait, on oublie que les victimes ne sont pas des hommes mais plutôt des enfants? Quand Me Sirois parle de ragots, est-ce qu’il comprend combien ça peut être douloureux pour les « victimes »?

    « S'il était vivant, il aurait droit à une défense, que ce soit au criminel ou au civil. Mort? Aucun droit. » Euh, il n’y a pas de procès, les règles ne s’appliquent pas, pas plus qu’elles se sont appliqués pour bien des gens qui sont « accusé » de façon publique hors du cadre d’un procès et dont la réputation est entachée de façon irrémédiable. Ses proches ont tous les droits de le défendre, rien en leur a été enlevé.

    Son affection pour les garçons (pas les hommes) était tellement connue que Rivard en a parler dans une chanson hommage! Une des « victimes » est demeurée anonyme. Me Sirois voit ça d’un mauvais œil. Pour moi, c’est l’inverse. Cette personne ne cherche pas la gloire, ni l’argent. Il a témoigné, son entourage a confirmé certains propos notamment que Jutra était un ami de la famille et que la « victime » l’avait dénoncé au moment du décès de Jutra. Un autre homme, identifié celui-là a décrit une situation semblable.

    Avec respect, pour moi la preuve est suffisante pour renverser la « présomption ».

    • Isabelle
      Isabelle
      il y a 8 ans
      ah oui? ah bon.
      "Si c’était une femme qui accusait un homme de viol, on crierait que l’on doit lui donner le bénéfice du doute, que le système est injuste en exigeant que la victime confronte l’accusé etc."

      Ah oui? Pas moi.

    • Anonyme
      Anonyme
      il y a 8 ans
      Oui!
      Vraiment? Vous aller prétendre n'avoir jamais entendu ces propos? Il n'y a pas si longtemps, des gens sugéraient de baisser le standard de preuve pour une condamnation pour viol.

    • Isabelle
      Isabelle
      il y a 8 ans
      re Oui!
      Oui je les ai entendus, et ces propos sont idiots. À moins qu'on aie la conviction que les femmes sont des personnes faibles.

      Ce que je voulais souligner, c'est que les points de vie sont très partagés sur la question. D'ailleurs, je ne serait pas surprise que mon point de vue soit pas mal plus populaire que celui dont vous faites état.

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