Portrait

L’avocat québécois derrière les Jeux olympiques!

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éric Martel

2019-02-08 14:40:00

Ancien olympien exilé en Suisse, celui qui est devenu le directeur juridique de l’organisation revient sur sa carrière hors-norme!

Me Howard Stupp est conseiller juridique spécial au sein du Comité international olympique (CIO).
Me Howard Stupp est conseiller juridique spécial au sein du Comité international olympique (CIO).
Cela fait près de 35 ans que Me Howard Stupp, conseiller juridique spécial au sein du Comité international olympique (CIO), a quitté Montréal, pour habiter Lausanne, en Suisse.

Pourtant, à l'entendre parler de son pays natal, on pourrait bien croire qu’il vient tout juste de le quitter.

Lors des dernières décennies, il a dirigé la révision de contrats avec les villes hôtes des Jeux, protégé l’image de marque de son organisation, ou encore participé activement à des cas d’anti-dopage.

Au bout du fil, le juriste chevronné a dévoilé à Droit-Inc les secrets de sa carrière sur le Vieux-Continent…

Droit-inc : Vous qui êtes né à Montréal, pourquoi avoir choisi de déménager en Suisse?

Me Howard Stupp : Je suis un fier montréalais, québécois et canadien. Sincèrement, je ne pensais rester que deux ou trois ans en Suisse au départ. Les années ont passé et mon travail était extrêmement intéressant, alors j’y suis resté.

Ai-je des regrets par rapport à cette décision? Non, ce n’est pas mon genre… j’aurais tout de même voulu passer plus de temps au Canada avec mon père, qui est mort en 2003.

Ici, je me suis marié et j’ai une fille âgée de 18 ans. Si j’étais resté à Montréal, je n’aurais pas eu un poste aussi important à l’échelle mondiale, mais j’aurais peut-être eu une famille de quatre ou cinq enfants.

La vie se construit et on ne contrôle pas tout!

Est-ce que le mode de vie est très différent en Suisse?

Je pense que les gens de Montréal sont un peu plus aimables. Ils sont terre à terre et ont du chien. Les Suisses sont un peu plus formels, même si je pense qu’ils ont vraiment évolué avec les années.

Au départ, je me sentais comme un étranger ici, et c’est normal : j’en étais un. Je ne parlais pas très bien le français et mes proches me manquaient beaucoup. Je me sentais seul. Remplacer des amis d’enfance, ce n’est pas facile!

Comment s’est déroulée votre expérience aux Jeux Olympiques?

Ça été ma pire compétition. J’ai eu une appendicite quelques semaines avant, ce qui m’a fait manquer un mois d'entraînement. Une fois en compétition en Europe, mon entraîneur me disait que mes points de sutures étaient solides, alors je luttais.

C’est au Canada que le docteur m’a dit que j’étais inapte à combattre. J’ai tout de même réussi à m’entrainer pour les Olympiques, mais j’aurais pu être beaucoup plus en forme.

Quand j’étais au tapis, j’avais vraiment peur. Quand on lutte avec une blessure, notre instinct de survie s’enclenche. Finalement, j’ai perdu contre celui qui a gagné la médaille d’or.

Avez-vous tout de même apprécié votre expérience olympique?

 « Quand on lutte avec une blessure, notre instinct de survie s’enclenche» assure Howard Stupp.
« Quand on lutte avec une blessure, notre instinct de survie s’enclenche» assure Howard Stupp.
J’ai été très triste pendant les dix jours suivants, mais avec du recul, je suis quand même fier de ce que j’ai fait. Les gens me disaient : tu dois être déçu, les jeux sont à Montréal, dans ta ville natale. Au contraire, c’était fabuleux. Marcher vers le stade lors de la cérémonie d’ouverture, avec la foule qui nous entourait c’était magnifique.

Quel a été le plus beau moment de votre carrière sportive?

Quand j’ai remporté les Jeux panaméricains, en 1975 à Mexico puis en 1979 à Porto Rico.

Je ne devais pas gagner selon les pronostics, mais j’avais une grande force : mon mental. C’est vraiment une grande fierté d’être au sommet d’un podium, et d’entendre l’air d’un hymne national qui a été lancé grâce à sa victoire.

Comment avez-vous eu l’opportunité travailler sur le comité olympique?

Dans les années 1980, j’étais en stage avec Stikeman Elliott. Parmi les six stagiaires, aucun n’ont été retenus par le cabinet. C’est l’ancien nageur, Dick Pound, qui travaillait pour le même cabinet qui m’a parlé d’une ouverture de poste au Comité international olympique (CIO).

J’étais attaché juridique au comité depuis un an lorsqu’on m’a choisi pour devenir directeur des affaires juridiques. Disons que c’était prématuré! Je me débrouillais bien au départ, mais je me rends compte comme je me suis vraiment amélioré avec le temps.

Vous êtes désormais conseiller juridique spécial depuis un an. Pourquoi ce changement de poste?

Ça s’est fait d’un accord mutuel. J’étais un peu fatigué car j’ai travaillé de très longues heures surtout au début de mon mandat. On n’était que trois membres dans l’équipe au départ, alors qu’aujourd’hui on est 17.

J’ai insisté pour qu’on ait plus d’avocats au comité. Dans notre domaine, on ne peut pas couper les coins ronds, mais on avait beaucoup de travail à faire, donc nous avions besoin d’une grande équipe. Au bout de la ligne, je suis très fier de mon travail, et d’avoir mis sur pieds cette équipe qui assurera ma succession.

Et aujourd’hui, quelles sont vos tâches en tant que conseiller juridique spécial?

Maintenant, le comité m’appelle pour me demander des conseils. Je travaille nettement moins d’heures! C’est en quelques sortes une pré-retraite.

Vous qui avez fait les deux, quelles sont les différences entre étudier en génie et en droit?

 Me Howard Stupp a étudié en génie et en droit.
Me Howard Stupp a étudié en génie et en droit.
Sincèrement, la bac en génie est beaucoup plus difficile qu’en droit. Il fallait vraiment bosser pour réussir!

Chaque semaine, lorsqu’on recevait des devoirs, j’étais rarement capable de répondre aux questions. Je me retrouvais souvent à copier les réponses des autres, et même avec les réponses, c’était difficile de comprendre les démarches des calculs d’une ligne à l’autre!

En droit, je dirais que mes collègues n’étaient pas aussi sympathiques qu’en génie. Il y a plus de concurrence en droit, les gens acceptaient moins de partager leurs notes. Pourtant, en principe, c’est plus difficile de passer en génie.

Comment se déroulait votre conciliation études?

Je peux vous dire que mon père n’était vraiment pas chaud à l’idée que je fasse du sport pendant mon deuxième baccalauréat! Ça lui a pris dix ans à comprendre que la discipline, la persévérance et détermination qu’elle m’a apprise…

Même à 63 ans, je me rends compte que cette discipline me différencie des autres. Encore aujourd’hui, je ne fais jamais les choses à moitié!

Qu’est-ce qui vous attend au cours des prochaines années?

Je veux prendre du recul et réfléchir au temps qu’il me reste. Je veux profiter encore plus de la vie, surtout en donnant au prochain.

J’ai eu une belle vie, en prenant toujours au sérieux le CIO. Ça été plus qu’un travail pour moi! Maintenant, je veux trouver une autre manière d’aider les autres.
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