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Le cabinet juridique de l’avenir

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Natacha Mignon

2009-08-13 14:15:00

Croyez-vous que les cabinets d’avocats tels que nous les connaissons soient dépassés ? Sont-ils vulnérables face à l’émergence de nouveaux modèles qui se développent tranquillement?

Si ce n’est pas (encore) votre opinion, c’est celle de Mitchell E. Kowalski, avocat et consultant juridique.

Dans un article publié dans l’édition juillet-août du National Magazine, Kowalski décrit sa vision du cabinet de l’avenir. Horizon temporel ? 2020.

L’exercice de style qu’il choisit est de retranscrire l’allocution imaginaire de Me Nancy Kwan, CEO de BFC Law Professional Corporation – attention, ne pas confondre avec BCF ! -, lors d’une remise de prix récompensant le meilleur dirigeant d’un cabinet d’avocats canadien, en 2020.

Kowalski, à travers les mots de Nancy Kwan, retient 4 pôles de réussites.

La structure

BFC Law Professional Corporation rompt avec la tradition de pratique individuelle fortement ancrée parmi les avocats. Tous les avocats de BFC doivent participer au bien du cabinet et l’améliorer par leurs contributions respectives. Pour que cela ne reste pas un vœu pieu, BFC a mis en place différents véhicules, dont une entité indépendante dans laquelle tous les avocats sont membres et un système de prise de décisions collectives.

Les coûts

BFC Law Professional Corporation les coupent à tour de bras. Déjà, les coûts de personnel. BFC n’emploie plus de personnel de nuit. Il collabore avec des juristes aux Philippines et profite ainsi du décalage horaire pour avoir du personnel compétent 24 heures sur 24. La firme a aussi choisi d’externaliser à des juristes en Inde de nombreuses phases du travail inhérent aux cabinets avocats, parmi lesquelles les recherches juridiques, la préparation des documents et les vérifications diligences. En cas de surcharge de travail, BFC fait appel ponctuellement à des avocats qui travaillent de chez eux. « Nous faisons peu d’efforts pour attirer les talents des universités (…) Nous préférons (…) laisser aux autres firmes l’investissement de former nos avocats », ironise Me Kwan.

Les frais de fonctionnement, ensuite. Pour la firme « de l’avenir », fini les grands bureaux au centre du quartier des affaires. Les avocats sont invités à aller rencontrer les clients chez eux, sur leur lieu de travail. Le home-working est aussi à l’honneur chez BFC. Dans ces conditions, un espace open-space avec un plein accès aux commodités d’un bureau en banlieue et une belle salle de réunion bien située font l’affaire.

La gestion des connaissances

BFC Law Professional Corporation croit que c’est une partie intégrante des activités d’un cabinet d’avocat. Alors, la discipline en la matière est de règle. Chaque jour, les avocats de BFC doivent envoyer les documents qu’ils ont préparés en Malaisie, où une équipe du cabinet les révise et détermine s’il est pertinent de les intégrer dans la base de données.

La facturation

Pour Me Kwan, c’est « peut-être le facteur le plus important du succès de BFC ». En la matière pas d’exception, les honoraires sont établis sur une base forfaitaire, avec un complément au résultat, et ce même en matière de litige. C’est plus facile pour la comptabilité et cela évite les pratiques frauduleuses de chargement des heures. Le cabinet fustige d’ailleurs les firmes qui refusent de prendre « les risques de leur inefficacité ». C’est arrivé chez BFC qu’un forfait soit trop juste. Dans ce cas, le cabinet en assume seul le coût, sans que le client ne soit impacté, et en tire les leçons pour l’avenir.

Alors, prêts à signer chez BFC Law Professional Corporation ?
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11 commentaires

  1. Me
    Me
    Si certains membres du Barreau (incluant des jeunes dans la 20aine et 30aine) pouvaient arrêter d'entretenir des reliques en appellant leur cabinet "étude légale", ce qui est une monstruosité du mauvais usage du français, ça serait déjà un grand début pour "le cabinet de l'avenir".

  2. Anonyme
    Anonyme
    il y a 14 ans
    Voeu pieux
    C,est un voeu pieux que de même penser que des avocats pourrait pratiquer de façon collective tant et aussi longtemps que la rémunération se fait au mérite (clients entrés, heures facturées, etc.).

  3. King
    King
    Rien de nouveau à l'horizon. Aux États-Unis la sous-traitance juridique est déjà omniprésente. À place de payer 50 000$/année pour un jeune avocat pour faire la recherche ou gérer certains dossiers, les firmes vont transmettre leurs dossier aux avocats en Inde et payer un avocat 5000$ par année. Pourquoi en Inde ? Parce que c'est une ancienne colonie anglaise d'où l'influence de la common law.

    Là on parle de l'épargne :)

  4. Me
    Me
    Au Québec ça se fait aussi. Dans les grands cabinets il est de pratique courante de faire faire une recherche suivie de la rédaction d'un avis juridique par un étudiant payé 20-25$/h et de la faire passer sous la signature de l'avocat au dossier que le client paiera 225-550$/h et ce, même si le C.d.a. l'interdit expréssement.

  5. Me
    Me
    Correction/précision:

    Je n'ai pas le Cda sous la main, mais il se peut que je me trompe. Peut-être n'interdit-il que le "recyclage" du travail d'un autre avocat sous la signature d'un confrère. Ça change rien... le "recyclage" du travail d'un étudiant sous la signature d'un avocat est en tout point similaire au phénomène que vous décrivez en Inde (l'avocat indien n'étant nullement un avocat au sens des lois déontologiques américaines).

  6. King
    King
    À ma connaissance le C.d.a n'interdit rien dans votre exemple avec l'étudiant. Par contre, je crois que le client doit être avisé d'avance ce qui est rarement fait en pratique.

    Vous avez raison avec l'exemple de la sous-traitance entre confrères, C.d.a l'interdit sauf si le client est avisé d'avance et qu'il accepte qu'une partie ou la totalité du travail soit effectué par un confrère.

  7. Me
    Me
    C'est vrai, la réalité est plutôt conforme au résumé que vous en faites...

    Par contre c'est assez bizarre et con (comme beaucoup de choses qui gouvernent l'archaique droit des professions au Québec), que tout quidam puisse s'introduire dans le dossier du client avec seulement la permission de l,avocat au dossier, mais qu'être avocat ceci lui soit interdit (à moins que le client accepte). Comme quoi parfois lorsqu'on est plus, on vaut moins.

  8. Anonyme
    Anonyme
    il y a 14 ans
    Re : Me
    > C'est vrai, la réalité est plutôt conforme au résumé que vous en faites...
    >
    > Par contre c'est assez bizarre et con (comme beaucoup de choses qui gouvernent l'archaique droit des professions au Québec), que tout quidam puisse s'introduire dans le dossier du client avec seulement la permission de l,avocat au dossier, mais qu'être avocat ceci lui soit interdit (à moins que le client accepte). Comme quoi parfois lorsqu'on est plus, on vaut moins.

    Et ça, c'est sans parler du secret professionnel qui est violé en faisant de la sous-triatance hors du cabinet.

  9. Anonyme
    Anonyme
    il y a 14 ans
    Re : Me

    «Étude légale» est tout simplement un anglicisme.

    Je vous félicite Me pour avoir réussi à comparer une règle de français à une «relique» possible «d’entretenir» qui, par un entretien, devient ainsi une monstruosité soit une déformation. Mais je me demande, peut-on déformer une mauvaise utilisation d'une règle de français? Il y aurait donc de bon mauvais usage grammatical! Autrement dit, il y aurait des erreurs grammaticales qui sont justes. Vous devez au moins reconnaître qu’il y a du mérite de poser l’action de maintenir en bon état ce mauvais usage…

    C’est toujours un plaisir de vous lire. Bien à vous Me.

  10. Anonyme
    Anonyme
    il y a 14 ans
    Nouvelle religion du capitalisme

    En cette année 2009, le Barreau du Québec invite les avocats à penser en termes de leadership. Et qu’est-ce que le leadership sinon d’avoir l’habileté d’inspirer les autres? Et bien, non, je ne signerais pas chez BFC Law Professional Corporation. Non seulement Me Mitchell E. Kowalski ne m’inspire pas, mais il me semble, à mon humble avis, débranché de l’actualité dans sa recherche de grandes idées.

    Dans sa vision du nouveau modèle de cabinet, au lieu d’effectuer une rupture avec le passé, comme il nous le laisse croire par l’exposition de ses idées dans le pôle des coûts, il contribue, selon moi, à perpétuer la «nouvelle religion du capitalisme» comme l’appelle Yves Michaud dans «Petites et grandes misères de l’actionnaire à l’heure de la mondialisation» (EYB2002DEV603). Selon lui, c’est «LE vrai problème de notre époque», propos publiés en 2002. En 2009, avec ce que nous savons aujourd’hui, force est d’admettre qu’il a sûrement vu juste sur quelques points. Rien dans la vision de Me Kowalski me laisse entendre qu’il a considéré une parcelle de ce qui sous-tend le propos de Yves Michaud. Me Kowalski m’apparaît ainsi, en cet été 2009 où nous observons des phénomènes sans précédents dans notre économie mondiale, comme courir à sa perte ou être dénué d’humanisme ce qui revient, au final, au même pour celui qui aspire à construire.

    John Kenneth Galbraith, économiste canado-américain, a écrit que «Tous les grands leaders ont eu ceci en commun : leur volonté d’affronter sans équivoque la grande anxiété de leur peuple à leur époque». Et, quelle est l’anxiété actuelle? Malheureusement, à cause de cette crise économique, nous sommes à même de la comprendre chaque jour. Je cite encore Yves Michaud : «Une religion dont on baise amoureusement les pieds des nouvelles saintes : Sainte Compétitivité, Sainte Privatisation, Sainte Déréglementation, Sainte Mobilité, Sainte Mondialisation, Sainte Libéralisation, Sainte Restructuration, Sainte Rationalisation…» alors que les lois mises en place pour créer un équilibre dans le système capitaliste ne font plus le poids.

    Je termine avec une autre des idées de Yves Michaud, un peu décontextualisée, que je n’aurais jamais cru un jour reprendre à mon compte : «Le moyen d’avoir raison dans l’avenir est, à certaines heures, de savoir se résigner à être démodé». Ce à quoi je rajoute les propos d’un spécialiste du concept de mode, le couturier français Paul Poiret : «passées les limites, il y a les bornes». Donc, à un certain niveau, il y a l’État, à un autre, il y a le Barreau et, à un niveau modeste, il y a l’individu. Si passé 2020, je recevais le même prix que Me Nancy Kwan comme meilleur dirigeant d’un cabinet d’avocats canadien, je le refuserais.

    I.G.

  11. Me
    Me
    Dans ce cas il suffirait d'informer le client de la sous-traitance et l'amener à renoncer au secret professionnel (pas totallement bien-sûr, mais seulement à l'égard des sous-traitants). Je crois que c'est possible.

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