Reportages

À vos marques !

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Rene Lewandowski

2007-04-12 06:15:00

Les dirigeants du détaillant Reitmans ont eu une bien mauvaise surprise en janvier 2005 lorsqu’ils se sont aperçus que le nom de domaine d’une de leurs filiales avait été squatté par un individu de Winnipeg. Addition-Elle, chaîne de magasins de vêtements pour femmes de tailles fortes, avait déjà son propre site (www.addition-elle.com), mais ses responsables avaient omis d’en enregistrer une version canadienne avec le suffixe « .ca ». Grave erreur!

En plus de proposer des petites culottes aux internautes, le site www.additionelle.ca publiait des photos très suggestives. « À la limite de la pornographie », raconte l’avocat Laurent Debrun (photo), tout juste arrivé chez Kaufman Laramée, à Montréal. De quoi donner des bouffées de chaleur aux actionnaires de Reitmans.

Bien que cela soit interdit depuis 1999, de nombreuses entreprises continuent d’être victimes de cybersquattage. Cette pratique consiste à acheter un nom de domaine dans le but d’en tirer un profit en le revendant à prix fort. L’adresse www.radiocanada.ca a ainsi été acquise par un homme de Toronto qui avait l’intention de la revendre à la Société d’État, dont le site officiel est www.radio-canada.ca.

Plus récemment, un individu de Colombie-Britannique a fait de même en enregistrant l’adresse www.tdvisa.ca. Le site pouvait laisser croire être la propriété conjointe de la Banque TD et de VISA. Au contraire, il invitait plutôt les internautes à visiter les sites des banques concurrentes !

« Le cybersquattage crée de la confusion autour des marques de commerce », explique Marie Laure Leclercq, avocate spécialiste en propriété intellectuelle au cabinet De Grandpré Chait, à Montréal.

Pour les entreprises, l’enjeu est gros. Car à l’ère de l’économie numérique, la protection des marques de commerce est devenue à la fois complexe et incontournable. Complexe, parce que la concurrence déloyale et la contrefaçon pullulent dans le cyberespace, et que les combattre peut sembler trop souvent une activité sans fin. Intournable, parce que la marque de commerce est pour bien des entreprises l’actif ayant le plus de valeur.

Comment se protéger ?

Contre le cybersquattage, les entreprises disposent de plusieurs de moyens. En premier lieu, contacter le cybersquatteur pour tenter de lui faire entendre raison. S’il n’y a rien à faire, il faut alors passer à la deuxième étape, c’est-à-dire engager des procédures devant les organismes d’arbitrage qui décideront à qui revient le nom de domaine en litige.

Au Canada, c’est l’Autorité canadienne pour les enregistrements Internet (ACEI) qui est responsable des adresses « .ca ». Pour les noms de domaine plus génériques, tels que « .com », cette responsabilité revient à l’ICANN (Internet Corporation for Assigned Names and Numbers).

C’est d’ailleurs ce qu’ont fait les dirigeants Reitmans pour tenter de récupérer le site canadien d’Addition-elle. Après avoir envoyé courriels et lettres au cybersquatteur, restés sans réponse, ils ont décidé de soumettre le dossier devant un arbitre de l’ACEI.

Cette procédure fonctionne bien, mais peut parfois être coûteuse. Selon la complexité du dossier, il faut s’attendre à débourser quelques milliers de dollars. Si la plainte est contestée, la facture peut grimper rapidement. Dans le cas de Reitmans, le cybersquatteur ne s’est même pas présenté aux audiences, ce qui a accéléré les choses ; l’entreprise a rapidement eu gain de cause et le site en litige lui a été transféré.

En général, il faut compter de trois à six mois avant d’obtenir une décision de l’ACEI. Quelquefois, c’est plus long. Ainsi, il s’est écoulé près de trois ans entre le moment où Radio-Canada a envoyé une mise en demeure au cybersquatteur et celui où l’ACEI a décidé de lui transférer le site en litige.

La décision de l’arbitre est toutefois sans appel. Lorsqu’on perd, il faut alors négocier avec le squatteur si l’on tient absolument à récupérer le nom de domaine. Et être prêt à fouiller dans son portefeuille.
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