L’annus horribilis de l’État de droit

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Frédéric Bérard

2012-12-12 14:15:00

2012 est sur le point de s'achever. C'est le temps des bilans. Frédéric Bérard dresse celui des atteintes à l'État de droit au Canada pendant l'année écoulée.

Dure année pour la primauté du droit. Et il n’est pas ici question de l’Égypte, de la Syrie, de Guantanamo. Plutôt du Canada, du Québec. En 2012. Oui.

Voici un rappel, assez peu édifiant, des douze derniers mois. Notons que cette liste se veut, malheureusement, non exhaustive :

• Un gouvernement fédéral violant la séparation des pouvoirs en répudiant l’Accord de Kyoto, et ce, malgré l’existence d’une loi toujours existante à cet effet (la démocratie parlementaire ou l’épine au pied de l’exécutif);

Frédéric Bérard fait le bilan des atteintes à l'État de droit au Canada cette année
Frédéric Bérard fait le bilan des atteintes à l'État de droit au Canada cette année

• Une loi visant à assurer rétroactivement le caractère légal d’une entente-cadeau entre Québecor et la Ville de Québec quant à la construction d’un amphithéâtre risquant d’accueillir davantage un festival gourmand quelconque qu’un club de la LNH (bel aveu ici de la violation du droit positif, ceci dit);

• Un sénateur, porte-parole du ministre de la Justice, enjoint les prisonniers repentants à se passer la corde au cou, infraction prévue au Code criminel (un détenu coûte cher, faut dire);

• Un ministre de la Sécurité publique qui émet la directive d’utiliser toute preuve obtenue par la torture, si étant que celle-ci fusse effectuée à l’étranger (hypocrisie, quand tu nous tiens);

• Le non-respect des conditions prévues par la Loi canadienne sur la santé ou la violation implicite de celle-ci (hypocrisie, disions-nous);

• La détention obligatoire des immigrants débarqués illégalement au pays, sans revue judiciaire aucune. Cette mesure s’appliquant de la même manière aux enfants de ces immigrants dits illégaux, à la discrétion du ministre, constituant ainsi une violation ainsi flagrante de la Convention relative au statut des réfugiés (rien contre les immigrants, pourvu qu’ils restent chez eux);

• Une Loi 78 suspendant la liberté d’expression et le droit à la manifestation pacifique, ladite loi soulignant dès lors, Ô ironie, l’incapacité des corps policiers à faire respecter son esprit ou sa lettre (comment arrêter simultanément plus de 200 000 manifestants dits « illégaux » ?);

• L’encouragement implicite de la désobéissance civile provoqué par cette même loi (merci aux concerts de casseroles, malgré quelques fausses notes, de s’être substitués aux actes de vandalisme habituellement afférents à cette même désobéissance);

• Une promesse électorale du nouveau gouvernement en place quant au retrait de droits démocratiques fondamentaux (éligibilité aux élections, signature de pétitions, contribution aux partis politiques) pour tout citoyen du Québec ne possédant pas une « connaissance suffisante » du français (peut-on assujettir les Québécois dits de souche à ce même test ?);

• Une Loi sur la suspension temporaire des élus municipaux, loi adoptée sous les pressions médiatiques, notamment celles du réputé chroniqueur-juriste-officieusement-auto-considéré-juge-en-chef-de-la-province, celui-ci ayant conclu, de par son éminente sagesse, à la culpabilité des élus ainsi visés (il est tout de même détenteur d’un bac en droit, faut dire);

• La maintenant célèbre affaire Dumont, au cours de laquelle le même chroniqueur-juriste-officieusement-auto-considéré-juge-en-chef-de-la-province a déclaré que, malheureusement, Dumont n’a su faire la preuve scientifique de son innocence (concept original, avouons-le, surtout pour ce fier bachelier en droit);

• La tenue d’une commission d’enquête ayant pour effet de confesser et ensuite glorifier médiatiquement parlant tout fraudeur « repenti », en particulier si le témoignage de ce dernier permet de balancer, corroboration ou pas, quelques noms d’élus d’envergure (ai-je déjà mentionné l’ovation debout reçue par Zambito à TLMEP ?);

• La tenue d’une commission d’enquête ayant pour effet de faire connaître au grand public tous les salopards ayant eu leur nom inscrit sur une liste d’un club privé montréalais, bien que l’enquêteur-machin fut dans l’impossibilité de faire la preuve des sujets abordés lors de ces mêmes rencontres ou, pire encore, que ceux-ci ont effectivement eu lieu (aucun autre commentaire pertinent ici).

Voilà pour 2012. Pas mal.

Dans l’espoir d’une année 2013 plus tranquille, voire plus respectueuse de l’État de droit, légère pause de mon côté. Je profite ainsi de l’occasion pour souhaiter de joyeuses fêtes à l’ensemble des lecteurs, fidèles ou ponctuels, de cette chronique. Réel honneur que de vous compter parmi son lectorat, d’accord ou non avec son contenu.

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