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Une pénurie de juges à la Cour supérieure

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Radio -canada

2023-05-10 13:15:00

La Cour supérieure dépend de « miracles » au quotidien pour gérer la pénurie de juges…
La juge en chef de la Cour supérieure du Québec, Marie-Anne Paquette. Source: Cour supérieure du Québec
La juge en chef de la Cour supérieure du Québec, Marie-Anne Paquette. Source: Cour supérieure du Québec
Le manque de juges cause une série de drames « inacceptables » pour les familles qui se retrouvent devant les tribunaux à des moments particulièrement troublants ou traumatisants de leur vie, affirme la juge en chef de la Cour supérieure du Québec, Marie-Anne Paquette.

En entrevue à Radio-Canada, elle raconte qu’une famille en pleine séparation acrimonieuse a appris qu’elle devra attendre 19 mois avant que les questions d’autorité parentale et de pension alimentaire soient entendues par la Cour supérieure.

« L’enfant a quatre ans aujourd’hui. Il va en avoir six quand on va le revoir pour déterminer comment papa et maman auraient dû gérer leur coparentalité », dénonce-t-elle. « C’est 19 mois de situation intenable pour les parents et pour les enfants ».

Ces problèmes sont la conséquence directe de la pénurie de juges au sein des tribunaux du pays, une situation que vient de dénoncer le juge en chef du Canada, Richard Wagner, dans une lettre adressée au premier ministre Justin Trudeau.

À l’échelle nationale, il y a 85 postes de juge vacants sur environ 1200 au sein des différentes juridictions de compétence fédérale.

« Je suis très heureuse de cette initiative que le juge en chef a prise. Mais je suis malheureuse que cette initiative soit nécessaire », affirme la juge en chef Paquette.

Le juge en chef de la Cour suprême, Richard Wagner. Source: La Presse canadienne / Justin Tang / Radio-Canada
Le juge en chef de la Cour suprême, Richard Wagner. Source: La Presse canadienne / Justin Tang / Radio-Canada
Environ 90 % des causes entendues par la Cour supérieure du Québec sont de nature civile, souvent dans des situations de séparation ou de divorce, de perte d’emploi ou de conflits commerciaux, rappelle la magistrate.

Une autre conséquence négative de la pénurie de juges est le risque d’une multiplication des arrêts de procédures dans des dossiers criminels.

En raison de l’arrêt Jordan prononcé par la Cour suprême du Canada en 2016, les dossiers de nature pénale doivent être réglés dans un délai maximal de 30 mois, à moins de circonstances exceptionnelles.

« Pour l’instant, les choses sont sous contrôle, mais ça tient à des miracles. On manœuvre avec les moyens du bord et avec le proverbial duct tape », soutient la juge Paquette.

Délai sans précédent

La juge en chef Paquette note que le gouvernement fédéral n’a toujours pas pourvu le poste laissé vacant en mars 2022 par le décès de la juge en chef adjointe Eva Petra.

« Ça semble être un record de délai à combler ce type de poste-là, mais ce n’est pas le genre de record qu’on aime détenir », dit-elle.

Il y a officiellement trois autres postes vacants au sein de la Cour supérieure du Québec, sans compter le fait que quatre juges devraient prendre leur retraite au cours des prochains mois.

De plus, la Cour supérieure a évalué qu’elle a besoin de neuf postes de juge supplémentaires pour s’acquitter de toutes ses obligations, un constat que partage le gouvernement du Québec.

En tout, dans ce contexte, la juge en chef Paquette voudrait qu’Ottawa nomme 17 nouveaux juges à court terme à la Cour supérieure du Québec.

Pourtant, le processus de nomination à la magistrature bloque à Ottawa. Par conséquent, la Cour doit faire des « prouesses » pour éviter que des causes au criminel tombent en raison de l’arrêt Jordan ou que les dossiers civils s’enlisent.

Le ministre fédéral de la Justice, David Lametti. Source: La Presse canadienne / Spencer Colby / Radio-Canada
Le ministre fédéral de la Justice, David Lametti. Source: La Presse canadienne / Spencer Colby / Radio-Canada
Un gouvernement qui « néglige ses responsabilités »

De son côté, le Bloc québécois accuse le gouvernement de négliger encore une fois ses responsabilités de base.

« La responsabilité de nommer ces juges revient à Ottawa et à personne d’autre. Mais encore une fois, comme ce fut le cas pour les passeports, comme c’est le cas pour l’immigration et pour l’assurance-emploi, le fédéral manque à remplir ses fonctions les plus élémentaires », avance le député bloquiste Rhéal Fortin.

Le ministre fédéral de la Justice, David Lametti, a réagi en affirmant qu’il est d'accord avec les constats du juge en chef Wagner, qui souligne que la pénurie de juges pourrait miner la réputation de toutes les institutions démocratiques au Canada.

« Je suis tout à fait en accord. C’est un problème sérieux, on s’attaque au problème », a expliqué David Lametti.

Il a ajouté que son gouvernement a nommé plus de 600 juges depuis 2015 et qu'il a aussi créé une centaine de postes de juge supplémentaires qu’il travaille « avec acharnement » à pourvoir.
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2 commentaires
  1. Anonyme
    Anonyme
    il y a un an
    Différence entre un juge et un urgentologue?
    Devant une vrai urgence médicale, tout urgentologue va voir le patient.

    Devant une vrai urgence judiciaire, certains juges s'en vont au chalet parce qu'il est 16h55, et qu'à 17h00 les très efficaces gardiens de sécurité de l'agence Neptune ferment les portes du palais.

  2. GMA
    Mais encore
    Oui, plus de juges.

    Mais sans greffières, personnels de le cour, constables spéciaux additionnels, les salles d'audience ne pourront pas plus rouler. Il faudrait d'abord régler ce problème à la base, qui est connu depuis bien avant la pandémie...

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