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Organiser autrement l’après-rupture par le droit collaboratif

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Carolle Tremblay

2021-10-18 11:15:00

Une avocate aborde la Loi sur le divorce ainsi que l’approche de droit collaboratif…

Carolle Tremblay, l’auteure de cet article. Source: Site web de TCJ
Carolle Tremblay, l’auteure de cet article. Source: Site web de TCJ
Depuis mars 2021, la Loi sur le divorce (ci-après la « Loi ») impose aux parties l’obligation de tenter de régler leurs conflits au moyen d’un mécanisme de règlement des différends familiaux autres que le processus judiciaire. Une référence expresse y est faite au droit collaboratif comme mode alternatif de règlement. L’approche de droit collaboratif a été élaborée devant un constat d’insatisfaction et de déception, celles des justiciables, mais aussi des avocats familialistes face aux limites du modèle litigieux.

Plutôt que de confier au juge, dans le cadre d’une confrontation des positions, le soin de leur imposer une décision qui souvent ne satisfait pas entièrement ni l’un ni l’autre des conjoints, ceux qui optent pour une démarche en droit collaboratif conservent le pouvoir décisionnel sur tous les aspects de l’après-rupture, incluant les aspects qui ne pourraient être adressés dans le cadre d’un litige à la cour.

Les avocats qui pratiquent le droit collaboratif familial ont reçu une formation intensive et spécifique qui dépasse l’acquisition des habiletés propres à la négociation traditionnelle entre procureurs et celles de la représentation devant les tribunaux. Ils sont membres du Groupe de droit collaboratif du Québec.

L’approche collaborative repose sur l’adhésion de tous les participants, les clients comme les avocats, à des valeurs qui sont différentes de celles inhérentes aux recours devant les tribunaux. Les valeurs endossées se traduisent par des règles et principes qui seront nécessairement suivis en droit collaboratif.

La transparence, des discussions respectueuses, des interventions ciblées sur les priorités de chaque partie, le recours à l’approche multidisciplinaire lorsque nécessaire pour résoudre les questions particulières, la confidentialité et l’engagement de tous à diriger les efforts vers un règlement à l’amiable sur mesure, répondant à la spécificité de chaque situation sont les principes suivis en approche collaborative.

Protéger l’enfant du conflit par l’approche de droit collaboratif

La nécessité de s’entendre sur des modalités spécifiques à chaque situation est particulièrement évidente lorsque la vie d’un enfant doit être réorganisée en raison de la rupture des parents. La Loi impose aux parents l’obligation de protéger l’enfant contre les conflits, et dans plusieurs cas, de tenir compte de son point de vue et de ses préférences. Dans les affaires touchant les enfants, la participation des parents dans un processus collaboratif remplit ces obligations et présente plusieurs avantages. Pour un enfant, les bénéfices de voir ses parents travailler ensemble malgré la rupture sont indéniables.

Les avocats formés en droit collaboratif aideront les parents à rester centrés sur le meilleur intérêt de l’enfant et à améliorer la communication entre eux pour établir une coparentalité efficace. Un plan parental détaillé établi en droit collaboratif adressera aussi l’avenir, notamment la prise de décision, les relations de l’enfant avec la famille étendue, les besoins particuliers de l’enfant et le rôle éventuel des nouveaux partenaires dans la vie des parents, ou les défis des familles reconstituées.

Une alternative à la médiation

Le processus de droit collaboratif se distingue de la médiation en ce que chaque partie bénéficie de l’assistance continue de son avocat à toutes les étapes du processus. Le client reçoit donc des conseils juridiques qui demeurent protégés par le secret professionnel.

Des consultations privilégiées entre l’avocat et son client se tiennent au besoin ou en alternance avec des rencontres auxquelles les deux procureurs et les deux clients assistent. Les parties décident ensemble des questions prioritaires à aborder et régler et de l’agenda de chaque rencontre à quatre.

Une démarche qui se conclut plus rapidement qu’un litige

Les rencontres se déroulent au rythme et à la fréquence décidée par les parties, mais avec l’assurance que les deux avocats sont mobilisés pour agir en facilitateur de compromis et à encadrer la communication efficace. Autrement dit, les discussions se tiennent à l’abri de la confrontation des positions, de la menace de se retirer des négociations ou de l’exploitation stratégique des fautes, des vulnérabilités ou d’un déséquilibre des pouvoirs.

Le succès de la démarche est appuyé par l’engagement des avocats à ne pas représenter leur client devant la cour. Cet engagement est aussi la garantie de la motivation des clients à régler leur situation à l’amiable. Selon son âge, l’enfant et son procureur peuvent participer à certaines rencontres en démarche collaborative.

À l’issue du processus, l’obtention d’un jugement de divorce est pratiquement une formalité administrative. Dans la plupart des situations, le jugement est obtenu sans que les clients aient à se présenter à la cour. Le même fonctionnement est appliqué au jugement confirmant le partage des intérêts financiers et celui des biens, à un jugement confirmant les arrangements sur toutes les questions concernant les enfants. De cette manière, les enfants sont gardés à l’abri des conflits.

Sur l’auteure

Carolle Tremblay est spécialisée en droit de la famille et des personnes depuis 1990 et agit à titre d’avocate-conseil, chez Therrien Couture Joli-Coeur.
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1 commentaire

  1. Anonyme
    Anonyme
    il y a 2 ans
    Quel est le taux de succès ?
    "La transparence, des discussions respectueuses, des interventions ciblées sur les priorités de chaque partie, ..."


    Quand "les priorités de chaque partie", ou d'une partie, est de détruire l'autre (ce qui est une priorité très fréquente), comment une telle approche ne serait-elle pas vouée à l'échec?

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