Action collective contre Nordik Spa

Nordik Spa Village Chelsea a-t-il manqué à ses obligations alors que plusieurs de ses massothérapeutes sont soupçonnés d’avoir agressé sexuellement des clientes?

Une demande d’autorisation d’une action collective souhaite que la Cour supérieure du Québec se prononce sur cette question.

La demanderesse, une résidente de Montréal identifiée sous les initiales de A.B., réclame des dommages-intérêts compensatoires afin d’indemniser les victimes pour les préjudices engendrés par les agressions sexuelles qu’elles ont subies.

A.B. est représentée par une équipe du cabinet Lambert Avocats, composée de Me Jimmy Laguë-Lambert, Me Benjamin Polifort, Me Philippe Brault et Me Antuan King.

Le 2 décembre 2024, la demanderesse se rend chez Nordik Spa Village à Chelsea, pour profiter des services offerts par l’établissement. La demanderesse paye 152 $ pour un massage « Intensité 60 minutes ». Après avoir profité des bains avec une amie, la demanderesse se rend dans la salle d'attente de la section de massothérapie de l’établissement. Elle dit n'avoir reçu aucune information à ce moment-là quant au déroulement du massage qu'elle s'apprête à recevoir.

Le massothérapeute Lorenzo Velasque vient la chercher dans la salle d’attente et se dirige avec elle vers la salle de massage. Il ne lui explique pas le déroulement du massage, et ne lui dit pas quelles parties de son corps seront traitées.

Le massothérapeute dit ensuite à la demanderesse de se déshabiller, « sans lui indiquer qu’elle peut choisir de rester vêtue, et sans lui offrir une paire de sous-vêtements qu'elle peut porter pour se sentir plus confortable durant le massage », précise la demande.

Le massothérapeute quitte la pièce. Et la demanderesse, qui était en maillot de bain, se déshabille complètement et se place sur son ventre sur la table de massage, se couvrant avec le drap posé sur la table.

De retour dans la pièce, le massothérapeute commence par un massage des épaules et du haut du dos de la demanderesse. Bien qu'elle demande à trois reprises au massothérapeute d'utiliser moins de pression, celui-ci met trop de force au goût de la demanderesse.

Puis, « la demanderesse ressent soudainement les testicules du massothérapeute dans sa main gauche, à travers les pantalons de ce dernier », mais « sur le coup, la demanderesse est en état de choc, et ne dit rien puisqu'elle peine à croire ce qui vient de se dérouler ».

Par la suite, la demanderesse est choquée à plusieurs reprises par des regards du massothérapeute sur son corps, lorsqu'elle se tourne pour se mettre sur le dos, puis alors qu'il tient le drap relevé. Il lui jette également une serviette sur le visage, avec force.

« Le massothérapeute replace ensuite le drap sur la demanderesse, et commence à masser l'intérieur de sa cuisse, à quelques centimètres de son vagin, pendant environ dix minutes, et ce, alors que la serviette est toujours posée sur le visage de la demanderesse. »

« La demanderesse, à laquelle personne n'avait expliqué le déroulement de son massage, ne comprend pas pourquoi elle se fait masser dans cette région du corps. » Elle ne sait pas non plus comment obtenir de l'aide de la part de l'établissement qui emploie le massothérapeute.

Une fois le massage terminé, la demanderesse rejoint son amie, et lui raconte que le massothérapeute a massé l'intérieur de sa cuisse proche de ses parties intimes. L'amie est surprise puisque son propre massage s'est déroulé autrement.

Le lendemain, A.B. téléphone à l'établissement, et raconte la situation à la gérante des massothérapeutes. Pourtant, elle ne reçoit aucune excuse ; elle n'est pas rappelée ultérieurement par l'établissement ; et la demanderesse ne cherche pas à en savoir davantage pour prévenir d'autres abus.

Plusieurs agressions sexuelles

À la suite de l'agression sexuelle alléguée, la demanderesse se sent plus anxieuse et déprimée. Elle rencontre des difficultés de concentration et se sent léthargique. Elle ne se sent plus en mesure de bien s'occuper de ses enfants. Elle renonce à démarrer l'entreprise à but non lucratif qu'elle avait prévu de démarrer quelques jours plus tard. Elle a également dû augmenter sa dose de médicaments pour traiter son anxiété et sa dépression. Elle a aussi subi des pertes financières en raison de son agression.

Les faits poussent la demanderesse à solliciter une avocate, qui contacte Nordik Spa le 16 décembre 2024 afin d'obtenir compensation pour l'agression subie.

Le 4 février 2025 et le 8 avril 2025, une avocate de la défenderesse répond à cette lettre, et affirme que Monsieur Lorenzo Velasque est un « independent contractor », et non un employé de la défenderesse.

Selon la demanderesse, Nordik Spa « se lave ainsi les mains de l’agression », et « néglige ou omet de prendre les mesures requises pour prévenir la commission d'abus sexuels par ses massothérapeutes sur sa clientèle ».

Or, la demanderesse apprend que d'autres clientes ont été victimes d’agressions sexuelles chez Nordik Spa. En octobre 2021, le massothérapeute Maxime Bédard a été condamné à six mois d'emprisonnement pour des agressions sexuelles sur deux victimes distinctes lors de massages chez Nordik Spa. En décembre 2022, un massothérapeute de 45 ans est arrêté par la police, car il est soupçonné d'une agression sexuelle survenue chez Nordik Spa.

Le 28 janvier 2025, une autre femme poursuit Nordik Spa à la suite d'une agression sexuelle qu'elle aurait subie lors de soins de massothérapie prodigués par Seifallah Naouar. Et d'autres massothérapeutes de Nordik Spa font l'objet d'accusations criminelles pour des agressions sexuelles commises dans le cadre de leur travail, souligne la demande.

« L'ampleur et la récurrence du phénomène témoigne d'un problème systémique dans la prévention des agressions et inconduites sexuelles commises par divers massothérapeutes que la défenderesse emploie », pointe la demande d’action collective.

La demande allègue que la défenderesse était consciente de la problématique entourant la commission d'agressions sexuelles au sein de son établissement, et qu'elle a pourtant omis de prendre les mesures nécessaires pour prévenir ou faire cesser ces abus sexuels.

La demanderesse réclame d'être nommée représentante du groupe composé de « toutes les personnes, de même que leurs héritiers et ayants droit, ayant été agressées sexuellement durant un massage au Nordik Spa Village Chelsea ».

Au nom du groupe, A.B. à la Cour supérieure de condamner Nordik Spa Village à verser des dommages-intérêts compensatoires aux membres, afin de les indemniser pour les préjudices engendrés par les agressions sexuelles subies. Elle réclame également des dommages-intérêts punitifs afin de sanctionner l’atteinte aux droits à la sûreté, à l’intégrité et à la sauvegarde de la dignité des victimes d’agressions sexuelles, qui sont protégés par la Charte des droits et libertés de la personne.