Fini le boom du droit minier?

Daphnée Hacker-B.
2013-03-15 15:00:00

L’exploitation des ressources donne des emplois bien rémunérés à des dizaines de milliers de travailleurs, y compris les avocats, qui sont nombreux à avoir des clients importants dans l’industrie minière.
« Les sociétés minières représentent des clients loyaux qui peuvent nous apporter du travail pour des décennies, nous y tenons », lance Me Jérôme Beaugrand-Champagne, représentant de Heenan Blaikie à Pékin, qui est de passage à Montréal.
Ce dernier, ainsi que les autres avocats contactés par Droit-inc, reconnaissent être tout aussi préoccupés que les minières quant au climat d’incertitude politique qui règne.

« Depuis l’automne on parle d’une augmentation du régime de redevances plus élevées pour que la collectivité soit plus gagnante. Toutefois, nous ne connaissons toujours pas les nouvelles règles du jeu, c’est long, c’est obscur, c’est un climat qui nuit à l’investissement », explique Me Charles Kazaz, associé chez Blakes qui conseille de nombreuses minières.
Le Québec : un lieu d’investissement moins attirant
L’Institut Fraser a longtemps placé le Québec en tête des provinces les plus intéressantes pour investir… Jusqu’à 2010, année où le gouvernement Charest a haussé le pourcentage de redevances de 12 % à 16 %. Depuis ce temps, le Québec ne fait que chuter dans le palmarès.
Dans l’Enquête mondiale de l’industrie minière 2012-2013 effectuée par l’Institut Fraser, on peut voir que le Québec a été considéré comme le meilleur endroit sur la planète pour les investissements miniers de 2007 à 2010, avant de glisser au 4e rang en 2011, au 5e rang en 2012 puis au 11e rang cette année.

Il décortique la proposition de la ministre Ouellet : « Premièrement, l’imposition d’une redevance «plancher » de 5 %, appliquée peu importe la valeur du minerai, soulève un problème d’équité. Deuxièmement, l’idée d’un impôt déterminé en fonction du bénéfice, semblable à l’impôt sur le revenu, risque de refroidir plusieurs minières. »
Me Kazaz ajoute qu’il faut penser qu’une mine doit investir énormément d’argent pour créer les infrastructures nécessaires à l’exploitation, puis à la restauration des lieux. « C’est bien beau d’enlever un % des bénéfices, mais il faut absolument tenir compte de ces sommes déboursées, surtout si le gouvernement veut développer le Nord de la province. »
Statu quo : la solution pour garder les clients?
Selon une étude commandée à la firme PricewaterhouseCoopers, la formule actuelle qui taxe les entreprises en fonction de leur rentabilité est la meilleure qui soit pour favoriser les investissements. « C’est une analyse sérieuse dont les dirigeants devraient prendre note », dit Me Kazaz.

D’ailleurs, si on regarde les plus récents investissements miniers d’envergure au Québec, allant au-delà des milliards de dollars, c’est principalement des projets chinois ou indiens. Pourquoi? Ce sont les seuls qui détiennent les liquidités nécessaires, puisqu’ils ont besoin de ces ressources pour pouvoir développer leur économie.
Contrairement aux sociétés motivées par le retour aux actionnaires, ces compagnies visent des plans d’exploitation à long terme.
Pour les avocats, de tels clients valent leur pesant d’or. « Ce sont des clients sophistiqués, qui font appel à diverses spécialités du droit, tant en immobilier, en ressources naturelles qu’en droit fiscal en passant par l’environnement, ils apportent beaucoup d’eau au moulin », admet Me Gélinas.
Me Charles Kazaz qui pratique dans le domaine du droit minier depuis 20 ans reconnaît que les dix dernières années, période où le prix des minerais a grimpé sur le marché, ont été marquées par beaucoup d’embauches dans le secteur du droit minier.
« Il ne reste plus qu’à espérer que le gouvernement trouve un juste équilibre entre son choix idéologique et les considérations d’affaires qui sont non négligeables », conclut Me Champagne.
Agence QMI
Le fardeau fiscal des minières présentes au Québec est déjà rendu proche du plafond, avertit la société ArcelorMittal, alors que le gouvernement semble peu enclin à renoncer à un régime qui taxe la production brute.
C'est ce qui ressort des échanges de vendredi matin en marge du Forum sur les redevances minières, tenu à HEC Montréal.
Dans son document de consultation, Québec propose un régime «hybride», qui taxerait 5 % de la production brute des entreprises minières, en plus d'un impôt progressif sur les profits. Depuis la dernière réforme, mise en oeuvre sous la gouverne de Jean Charest, l'État taxe 16 % des profits.
Le régime actuel coûte déjà assez cher aux entreprises, estime Éric Tétrault, porte-parole d'ArcelorMittal. «Chacun pourra trouver sa zone de confort parce que nous ne sommes pas tous dans le même marché [de minerai], a-t-il dit. Je ne pourrais pas vous dire quelle serait la meilleure formule (...), mais il y a un point d'équilibre extrêmement fragile et on s'en approche dangereusement.»
ArcelorMittal est le principal contributeur du régime, ayant versé 500 millions $ en redevances en 2010-2012.
M. Tétrault a toutefois lancé un avertissement parce que les coûts de l'industrie augmentent et parce que les prix des métaux ne sont plus aussi avantageux qu'en période de boom.
«Si le Québec est le seul à imposer un fardeau fiscal supplémentaire, les prochains projets d'investissement se feront ailleurs dans le monde, a indiqué le porte-parole. Toutes les minières veulent poursuivre leurs investissements au Québec, mais il faut un climat fiscal raisonnable pour pouvoir le faire. Dans le cas du fer, c'est encore plus vrai parce que c'est ce qu'il y a de plus commun comme ressource.»
Renaud-François Lortie, associé au cabinet de conseil d'affaires KPMG-SECOR, donne partage cet avis. «Nous croyons que toute augmentation des redevances aurait un impact négatif. Nous sommes au point d'équilibre», a-t-il dit.
Jusqu'ici, la ministre des Ressources naturelles, Martine Ouellet, s’est dite ouverte au débat, mais pas à abandonner l'idée d'une hausse. «Ce que j'ai entendu, c'est que c'est une question d'équilibre, a dit la ministre. Nous sommes convaincus qu'il est possible de le faire tout en maintenant un climat stable et compétitif pour les investisseurs.»
La ministre a nié un rejet des critiques formulées par les dirigeants des minières. «Je voudrais les rassurer, a-t-elle ajouté. Nous voulons continuer à développer les mines au Québec, mais nous savons qu'il y a de la place pour améliorer le partage de la richesse créée.»
Ce message ne séduit pas Françoise Bertrand, présidente de la Fédération des chambres de commerce du Québec (FCCQ). «Nous comprenons bien l'importance de contribuer aux finances publiques, mais nous ne pouvons pas en faire les frais, a-t-elle déclaré. Conséquemment, si c'est ce que l'on nous impose, nous devrons faire des choix d'investissement ailleurs qu'au Québec.»
Mme Bertrand a affirmé qu'il ne faut pas traiter l'industrie différemment du reste de la population. «Les 45 000 travailleurs, ce sont des citoyens, a-t-elle mentionné. Leurs familles, leurs amis et les commerces qu'ils encouragent sont des citoyens».
La FCCQ estime que le régime actuel doit encore faire ses preuves : «Ce n'est pas un statu quo qui existe depuis 92 ans. On ne peut pas dire que ce n'est pas valable et que l'on recommence tout.»
Mtre
il y a 12 ansLa Première Ministre Marois n'avait-elle pas dit que la souveraineté du Québec passait par sa prospérité? Ça n'est pas en nivelant par le bas, en surtaxant les entreprises et en décourageant les investissements que son plan va lever. Les Libéraux avaient le Plan Nord. Le PQ a le Plan Mort.
Anonyme
il y a 12 ans"en surtaxant les entreprises et en décourageant les investissements"
Il y a longtemps que l'économie mondiale n'est plus au stade du développement où l'augmentation du coût des ressources naturelles était suivi d'exploitation supplémentaires ramenant les prix à leur niveau d'avant.
C'était l'époque où les ressources facilement accessibles étaient considérablement plus abondantes que les besoins. C'était aussi l'époque où les multinationales des ressources naturelles avaient le gros bout du bâton lorsqu'elles menaçaient de s'implanter à un endroit plutôt qu'à un autre.
Aujourd'hui, rareté oblige, les entreprises sont en concurence pour les mêmes ressources, et c'est le plus offrant qui gagne.
Un pays aurait donc tort de céder au chantage traditionnel et de laisser partir ses ressources à vil prix. Les ressources naturelles inexploitée sont aujourd'hui de "l'argent en banque" pour les sociétés, et les gouvernements sont en mesure de décider quand il feront des retraits.
Anonyme
il y a 12 ansVous pouvez continuer d'insulter, il n'en demeure pas moins que nous savons que s'il n'y a pas d'argent à faire, les gens n'investiront pas, surtout en considérant les investissements requis pour une mine. Le risque doit en valoir la peine.
À l'heure actuelle il y a de la concurrence de d'autres juridictions pour certaines ressources. Si le Québec ne veut pas exploiter ses ressources et les conserver pour les générations futures, soit, mais il va falloir comprendre qu'il y aura des conséquences sur la situation économique actuelle.