La colère gronde chez les 2 500 juristes du gouvernement du Canada

L'équipe Droit-Inc
2008-10-06 10:30:00
"Nous sommes d'autant plus outrés de la décision du Conseil du trésor que ses représentants ont rejeté les trois candidatures que nous leur avions soumises par l'intermédiaire d'un médiateur, dont celle d'un ancien juge de la Cour suprême. Ils ont également refusé de se commettre sur les critères de choix que nous leur proposions, des critères aussi élémentaires que l'indépendance face à la fonction publique et au gouvernement, l'expérience pertinente et variée, la reconnaissance par les parties. Pour nous, il est bien clair que le gouvernement, qui a pourtant fait de la loi et l'ordre ses chevaux de bataille, n'est pas prêt à reconnaître que les juristes qui écrivent les lois, contribuent à leur pleine application, les défendent devant les tribunaux, méritent des conditions de travail comparables à celles offertes sur le marché ", a dclaré le président M. Patrick Jetté.
Rappelons que les juristes du gouvernement du Canada sont regroupés en syndicat et accrédités en vertu de la Loi sur la fonction publique depuis le 28 avril 2006. Ils ont déposé un projet pour la négociation de leur première convention collective en novembre 2006.
N'ayant donné aucun résultat tangible, la négociation s'est poursuivie en présence d'un médiateur pendant 5 mois. Puis, en avril dernier, une demande d'arbitrage a été faite et depuis lors, des pourparlers se tiennent entre les parties pour le choix d'un président du conseil arbitral.
"Pendant que le gouvernement prend soigneusement son temps et étire au maximum tous les délais dans le cadre de la négociation, des avocats du Service des poursuites pénales (SPPC) en nombre de plus en plus grand font le choix de poursuivre leur carrière soit au niveau provincial ou territorial, soit en pratique privée ou en entreprise. Les motifs fournis par ces personnes pour quitter se ressemblent, des conditions de travail insuffisantes et un manque de respect de la part de l'employeur, qui a d'ailleurs de plus en plus de mal à recruter de nouveaux procureurs pour le SPPC. Ce n'est pas en retardant indument l'arbitrage et en faisant preuve de si peu d'intérêt pour la conclusion d'une entente sur nos conditions de travail que le Conseil du trésor va se rendre attirant pour les jeunes avocats, ni inciter les plus expérimentés à demeurer à son emploi", a conclu le président de l'Association.
Embauche et rétention des juristes
Même si le Conseil du trésor n’a pas encore remis une étude révélant des données sur les mouvements de personnel chez les juristes, l'AJJ a pu colliger certains chiffres dans quelques bureaux régionaux grâce à ses représentants. Ce qu'il faut en retenir, c'est que depuis quelques mois, une cinquantaine de juristes ont quitté leur emploi soit au ministère de la Justice ou au SPCC, dont la moitié du bureau de l'Ontario à Toronto. Il semble clair, selon l'AJJ, que les conditions de travail et de salaire y sont pour beaucoup dans leur décision de quitter.
"Nous ne sommes pas étonnés que ce soit le bureau de Toronto qui connaisse la plus importante érosion, a précisé M. Jetté, quand on regarde les échelles salariales des procureurs de la Couronne provinciale qui sont en moyenne de 45 % plus élevées que les nôtres. Ces départs de juristes sont d'autant plus préoccupants que le nombre de poursuites est en hausse, que les dossiers se complexifient et que de nouvelles législations sont promises par le gouvernement Harper. Cela se situe dans un contexte où le recrutement de nouveaux juristes est difficile. Il est donc temps que les politiciens prennent conscience de cette réalité qui risque d'avoir des conséquences négatives sur l'administration de la justice au Canada et le public canadien."