Louise Arbour honorée à Paris

La Presse Canadienne
2011-11-25 10:15:00
C'est pour "son action à rendre efficace et visible la justice internationale" que Louise Arbour a été honorée. Elle a apporté "par ses innovations et son courage, une contribution majeure à la lutte contre l'impunité", a déclaré le premier ministre Fillon.
Mme Arbour s'est montrée "profondément honorée" et "particulièrement touchée" par la présence au premier rang de Jacques Chirac (qui n'a pas pris la parole).
L'ex-procureure du TPI a reconnu que la justice internationale est "encore très jeune" et que la menace d'être traduit en justice "ne suffit pas à elle seule à dissuader les tyrans autrement enclins aux pires atrocités, surtout quand les enjeux de leur emprise sur le pouvoir sont démesurés".
"Mais il est également vrai que l'impunité sur laquelle ils ont toujours pu compter est une insulte envers tous ceux qui obéissent à la loi et une trahison envers ceux qui comptent sur le respect du droit pour leur protection", a-t-elle lancé.
C'est l'ancien directeur général du Fonds monétaire international, Michel Camdessus, membre fondateur de la Fondation Chirac, qui a fait l'éloge de Mme Arbour, avant que Kofi Annan lui remette sa distinction.
Saluant "sa détermination et son sang-froid dans des situations extrêmement difficiles", il a loué "l'engagement sans faille" de la Montréalaise qui a "su valoriser les plus hautes valeurs du droit".
"Elle a donné toute sa force à l'action des tribunaux dont elle était en charge", a-t-il dit, avant de rappeler que grâce à son "engagement sans faille aucun chef de guerre, aucun chef d'État abusant de ses prérogatives et usant de la violence contre ses concitoyens n'est aujourd'hui à l'abri de poursuites pénales" pour crimes de guerre ou génocide.
Louise Arbour a notamment signé de sa main les actes d'inculpation du Serbe Slobodan Milosevic. Son action a permis d'arrêter et d'inculper les 131 principaux responsables de la tragédie yougoslave.
Dans son discours, Mme Arbour a souligné que son engagement envers la justice lui venait « sans aucun doute » de sa formation juridique à l'Université de Montréal et de ses années passées au sein de la magistrature canadienne.
Fière du travail accompli par la justice internationale, l'ancienne juge de la Cour suprême du Canada estime toutefois que les vrais changements prennent du temps.
Devenue juge à la Cour suprême du Canada après son passage aux tribunaux pénaux pour l'ex-Yougoslavie et le Rwanda, Louise Arbour a ensuite été haut-commissaire des Nations unies aux droits de l'Homme. Depuis deux ans, elle dirige l'International Crisis Group, une organisation non gouvernementale multinationale qui s'est donné pour mission de prévenir et résoudre les conflits meurtriers.
Créés il y a trois ans, les prix de la Fondation Jacques Chirac récompensent des personnalités qui "ont su discerner dans l'aveuglement de la haine, les hommes et les femmes qui pouvaient se parler, celles et ceux qui ont pu dissiper à temps les malentendus".
Si Louise Arbour a décroché le Prix spécial du jury, le premier prix, lui aussi doté de 100 000 euros, est allé à la Tutsi Marguerite Barankitse, une enseignante de 55 ans. Fondatrice de la Maison Shalom, de la Cité des anges et de l'hôpital Rema, "Maggy", comme on la surnomme, recueille depuis 1994 des orphelins hutus, tutsis et twas victimes de la guerre civile qui a éclaté en 1993 au Burundi et faisant plus de 250 000 morts.