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Seuls face à la justice

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Agence Qmi

2011-11-09 14:15:00

Certaines causes criminelles peuvent traîner en longueur dans les palais de justice du Québec. À Laval, deux dossiers attirent l’attention alors que les accusés qui se défendent seuls ont passé devant le juge plus de 60 fois, chacun pour un même dossier.
Marc Ouellette traîne sa cause depuis 7 ans et se défend seul
Marc Ouellette traîne sa cause depuis 7 ans et se défend seul
Un des deux accusés, Jean-Luc Malboeuf, a finalement reçu sa sentence le 31 octobre. Il a été reconnu coupable de conduite dangereuse, de conduite avec les capacités affaiblies ainsi que de trois délits de fuite. Les évènements remontaient à l’été 2000.

Quant à Marc Ouellette, il traîne sa cause depuis maintenant sept ans. Il a été appréhendé en décembre 2004 après avoir réalisé une transaction de stupéfiant avec un agent double du Service de police de Laval. Il se défend seul et plaide depuis le début que ses droits ont été bafoués et que les policiers ne l’ont pas mis en état d’arrestation selon les règles de l’art. L’homme de 39 ans en sera à sa 68e présence devant le juge le 28 novembre prochain.

Forcé de plaider sa cause

Marc Ouellette soutient avoir été forcé de se représenter seul puisque les avocats de l’aide juridique n’ont pas osé prendre son dossier.

« L’aide juridique, c’est bon quand tu plaides coupable. Quand je leur ai dit que je voulais appeler une trentaine de policiers à la barre des témoins, personne n’a voulu me représenter », a dit M. Ouellette qui n’en est pas à ses premiers démêlés avec la justice.

Depuis 1993, il s’est défendu seul dans une dizaine de causes au criminel qui se sont généralement déroulées dans un délai raisonnable. Il a perdu sa première quand il a été condamné à verser une amende dans un dossier de voies de fait contre des policiers. Pour les autres dossiers, il a toujours été acquitté ou a reçu une absolution inconditionnelle, sauf dans le cas présent où il a été trouvé coupable de trafic de stupéfiants. Il est toujours en liberté et recevra sa sentence le 28 novembre. Il entend déjà faire appel de la décision.

Coût du système

Contacté à ce sujet, le ministère de la Justice a convenu que ces deux cas semblaient exceptionnels, mais a indiqué qu’il n’avait pas d’indices qui pourraient lui permettre d’évaluer le coût de ces procédures.

Lors de chaque comparution, il faut la présence d’au moins un constable, un greffier, un procureur de la couronne et un juge pouvoir procéder, et ce, sans compter les différents témoins appelés à la barre.


La complexité de se défendre seul

C’est un droit pour quiconque le désire que de se représenter seul devant la loi. Cependant, en plus d'être défi pour la personne, cette situation comporte des difficultés pour la justice elle-même.
« De plus en plus de personnes font le choix de se défendre elles-mêmes et souvent pour des raisons économiques », indique la directrice générale de la Fondation du barreau, Me Claire Morency.
Elle soutient par contre que l’exercice demande un minimum d’habiletés puisque les procédures peuvent être complexes.
L’organisme a donc publié les guides ''Seul devant la cour en matière de famille'' et ''En matière civile''. Le guide concernant la cour criminelle devrait être publié au printemps.
« Nous avons été interpellés par la magistrature qui est de plus en plus confrontée à ce phénomène. Les juges se retrouvent devant des gens qui sont plus ou moins familiers avec le système et qu’ils doivent encadrer. Ils ne veulent toutefois pas avoir l’air de prendre parti », explique Me Morency.


Des défis pour les juges

Accusé de trafic de stupéfiants, Marc Ouellette se représente lui-même depuis 18 ans.
« Je ne me prétends pas avocat, mais je commence à avoir de bonnes connaissances en droit et je sens que ça frustre parfois la couronne et les juges, indique M. Ouellette. J’ai tout de même la chance d’être articulé et d’avoir la capacité de faire mes recherches. C’est très demandant. »
Cette cause a aussi été exigeante pour le juge Valmont Beaulieu qui, à plus d’une reprise, a envoyé M. Ouellette en cellule en raison d’escalade verbale entre les deux hommes.
Le juge a aussi fait preuve de clémence lorsque M. Ouellette a demandé à interroger une trentaine de témoins sans dévoiler l’ordre dans lequel il voulait les entendre. « Ils étaient une trentaine de policiers à attendre dans le corridor pendant une semaine, à attendre leur tour », confie un employé du palais de justice qui préfère garder l’anonymat.
« Bien des gens commencent par se défendre seuls et font finalement appel à un avocat quand ça commence à déraper. Par contre, c’est toujours plus difficile à rattraper dans ce temps-là », précise Me Morency.
Bien que M. Ouellette ait l’intention d’en appeler de son verdict de culpabilité alors qu’il se sent lésé par le juge Valmont Beaulieu, il n’entend toujours pas demander l’assistance d’un avocat.
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3 commentaires
  1. Sid Vicious
    Sid Vicious
    il y a 13 ans
    Tout le monde sauf le Pape
    »Quand je leur ai dit que je voulais appeler une trentaine de policiers à la barre des témoins, personne n’a voulu me représenter

    Quand un client veut appeler 30 policiers, le Prident de Chrysler, le Premier ministre, le Secrétaire général de l'ONU, le Haut Commisaire de la Grande Bretagne, le Duc d'édimbourg et la Reine, il va avoir de la misère à trouver un avocat à le représenter. Et avec raison.

  2. Sid Vicious
    Sid Vicious
    il y a 13 ans
    Bonnes connaissances
    » Accusé de trafic de stupéfiants, Marc Ouellette se représente lui-même depuis 18 ans.
    « Je ne me prétends pas avocat, mais je commence à avoir de bonnes connaissances en droit»

    Il a peut-être acquis de bonnes connaissances en droit, mais il n'a pas acquis les connaissances requises pour ne pas commettre d'autres actes criminelles. Ou, du moins, de ne pas se faire prendre.

  3. Sid Vicious
    Sid Vicious
    il y a 13 ans
    Surprise
    » Bien que M. Ouellette ait l’intention d’en appeler de son verdict de culpabilité

    Who is surprised he was guilty?

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