La Cour supérieure poursuit les deux gouvernements!
Julien Vailles
2017-07-19 15:30:00

Les avocats sur le dossier seront William J. Atkinson, ainsi que deux juristes de Langlois Avocats, Sean Griffin et Véronique Roy.

D’autre part, on en a contre le pouvoir de surveillance et de contrôle attribué à la Cour du Québec en certaines occasions.
Pourquoi est-ce à ce moment-ci, dans un contexte « post-Jordan », où les tribunaux sont engorgés et le système de justice presque paralysé, que les juges décident de soumettre cette question à la Cour?
« Il s’est toujours agi, et il s’agit encore d’une question fondamentale. Plus que jamais, dans ce contexte, il faut savoir quel rôle doit avoir chacun des tribunaux, et quelles sont les ressources appropriées pour ceux-ci », explique l’ancienne bâtonnière et avocate Madeleine Lemieux, porte-parole du recours.
Compétence exclusive et concurrente
Pour comprendre, il faut revenir aux bases du système de justice canadien. Ainsi, la Cour suprême du Canada, ainsi que les cours d’appel et supérieures en place dans chaque province, relèvent de la prérogative du gouvernement fédéral. C’est donc le fédéral qui nomme, et qui paie, tous les juges de ces cours. À l’opposé, la Cour du Québec relève de Québec, qui nomme et paie les juges qui la composent.
Or, il est clairement établi – encore aujourd’hui – que la Cour supérieure, étant le tribunal de droit commun, doit entendre toutes les causes qui ne sont pas de la juridiction exclusive d’un autre tribunal. Et au moment de la Confédération, en matière civile et en première instance, seule la Cour de circuit possédait une telle compétence exclusive, soit pour les litiges n’excédant pas 200 $. Les juges de cette Cour étaient eux aussi nommés par le fédéral.
En 1869, la Cour de Magistrat, ancêtre de la Cour du Québec, a été créée par la législature québécoise. Ses juges, nommés par Québec, détenaient une certaine compétence concurrente avec la Cour de circuit, soit pour les litiges de 25 $ ou moins.
En 1922, la juridiction de la Cour de circuit a été suspendue dans les comtés et districts ou siégeait la Cour de Magistrat, ce qui a conféré à cette dernière une compétence exclusive dans les matières qui étaient autrefois du ressort de la Cour de circuit. En 1953, la Cour de circuit a finalement été supprimée au Québec. La combinaison des événements de 1922 et de 1953 a donc permis de transférer la compétence exclusive d’une cour de juridiction fédérale à une cour de juridiction provinciale. D’où la poursuite : on argue que ce transfert de pouvoirs est anticonstitutionnel.
Limite de 10 000 $

Les cours de juridiction fédérale ont donc compétence exclusive sur tous les litiges d’au moins 100 $ de 1867, clament les demandeurs. En dollars d’aujourd’hui, cela équivaut à 10 000 $. Quant à la Cour supérieure, elle aurait ainsi compétence exclusive sur tous les litiges de plus de 200 $, soit 20 000 $ de 2017.
Donc, la Cour du Québec ne devrait pas avoir compétence jusqu’à 85 000 $, mais bien jusqu’à 10 000 $, allègue-t-on. Et cette compétence pour les litiges de moins de 10 000 $ devrait être non pas exclusive, mais concurrente avec celle des cours de juridiction fédérale.
Pouvoir de surveillance et de contrôle
D’autre part, la Cour supérieure est de par sa nature investie d’un « pouvoir de surveillance et de contrôle » qui lui donne le droit de réviser les décisions d’ordre administratif, via le mécanisme de contrôle judiciaire.
Or, un certain pouvoir de surveillance et de contrôle est maintenant attribué à la Cour du Québec, dénoncent les juges. On pense notamment à des dispositions de la Loi sur la justice administrative ou de la Loi sur le courtage immobilier qui permettent d’en appeler à la Cour du Québec de décisions d’organismes administratifs.
Cela vient déposséder la Cour supérieure d’une partie de son pouvoir au profit d’une cour provinciale, ce que la Loi constitutionnelle de 1867 ne permet pas non plus, écrit-on dans la poursuite.
Renvoi à la Cour d’appel
Les demandeurs décochent par ailleurs une flèche au gouvernement du Québec. Ils ont maintes fois exhorté celui-ci à user de son pouvoir de demander un renvoi sur la question en jeu à la Cour d’appel, déclarent-ils dans la demande. En vain. Ils lui forcent à présent la main en procédant par requête en jugement déclaratoire.
Il faut donc croire que le débat sera plutôt tranché en Cour supérieure. Ironiquement, le juge qui aura à trancher la question doit être attitré au dossier par le juge en chef Fournier! Comment la chose est-elle possible?
« Quatre juges de la Cour supérieure, qui ont des compétences particulières en matière de droit public, ont été écartés des débats des juges de la Cour supérieure sur cette question. Le juge Fournier choisira donc l’un d’eux pour juger de l’affaire », explique Madeleine Lemieux.
À moins, bien sûr, que le Procureur général du Québec, en voyant cette poursuite contre lui, ne demande carrément le fameux renvoi à la cour d’appel pour que ce soit elle qui se prononce...
incroyable
il y a 8 ansHonte à la Cour supérieure dont l,attitude hautaine et corporatiste démontre qu'elle n'a rien à cirer de l'accessibilité de la justice pour les citoyens...dans des délais raisonnable..
Anonyme
il y a 8 ansA moins d'une urgence extrême, c'est bien difficile de trouver un juge ces jours-ci dans les Palais de Justice. ...et les juges nous sermonnent sur l'accès à la justice.
On attend actuellement 3 ans pour un procès à Montréal en Cour supérieure et 11 mois en Cour du Québec et ils en veulent plus!!! Honteux.
Avocat
il y a 8 ansMais pas une première. Nos juges n'avaient-ils pas déjà revendiqué la gratuité pour le stationnement avant de laisser tomber sous la pression de l'opinion publique?
Legal Counsel
il y a 8 ansConstitutionally speaking, I'm reasonably sure that the Superior Court has a strong case, on the merits.
However, talk about bad timing! In a post-Jordan era, where delays are already ridiculous in Quebec and access to justice is severely limited, this is not the opportune moment to be raising this issue.
On a side note, I wonder if this case will suffer the same long delays regularly faced by other actions brought before the Superior Court!
And how can any Superior Court justice be expected to render judgement on this issue without at least the appearance of partiality? Could the Government just submit this question to the Court of Appeal and be done with it, for goodness' sake?!?
Anonyme
il y a 8 ans"Constitutionally speaking, I'm reasonably sure that the Superior Court has a strong case, on the merits."
Sadly this seems to have no bearing on the commentators on this site who rarely rise above the level of le Journal de Montréal.
Justicier
il y a 8 ansIt's call the doctrine of necessity:
Renvoi relatif à la rémunération des juges de la Cour provinciale (Î.-P.-É.), [1998] 1 R.C.S. 3, see par.4 and the following.
Oyoyoy
il y a 8 ansSur un plan strictement juridique, voilà une cause intéressante depuis un moment.
Lex
il y a 8 ansAvec les délais actuels devant la Cour supérieure, je ne comprends pas pourquoi le gouvernement du Québec refuse de demander un renvoi à la Cour d'appel sur une question de droit constitutionnel qui à première vue semble légitime.
Disons que ça serait l'occasion rêvée pour mettre de l'avant les nouveaux principes directeurs de la procédure civile et donner l'exemple aux justiciables. À moins que le gouvernement doute de la validité de sa position et souhaite faire traîner les choses en longueur. Ça ne serait pas la première fois.
Joseph
il y a 8 ansShame à la CS et vive le principe de l'indépendance judiciaire.
Anonyme
il y a 8 ansOn verra si sa boule de cristal (favorable à la C.Q.) était bien alignée sur les astres, mais vu la nature éminenment politique de la question il est probable que l'issue sera d'abord décidé, hors de tout considération juridique, et que les arguments de droits seront modelés en conséquence.
Anonyme
il y a 8 ansCher anonyme, auriez-vous le lien vers l'avis du professeur Jutras? Je trouve la question très intéressante.
MAJ
il y a 8 ansNous savons tous que la récusation peut être demandée en raison d'une crainte raisonnable de partialité de la part du juge ? Le bureau de Langlois Avocats qui maintenant représente la magistrature fédérale dans (pour) une cause qui leurs est semble-t-il à cœur, peuvent 'il aussi faire des représentations devant ces derniers ?
Anonyme
il y a 8 ansDes juges de la Cour supérieure qui vont soumettre un litige à un autre juge de la Cour supérieure sur la Cour supérieure. Ouf ! Un peu incestueux tout ça ?
Anonyme
il y a 8 ansOuais monsieur ! On me s'enfarge pas dans les fleurs du tapis.
Avocat
il y a 8 ansDes bons moyens de défense consigné oralement par écrit (en 30 lignes) vont régler le problème :
La cour du Québec à compétence pour les motifs qui seront plus amplement exposés lors de l'audience.